Cette semaine, le coronavirus a passé la barre des 2000 morts (2442 décès selon le dernier bilan dimanche), essentiellement en Chine. Alors que l'Organisation mondiale de la santé se veut rassurante sur la maîtrise de la pandémie, des chercheurs européens traquent toujours les traces numériques de la maladie.
L'équipe du Centre européen de prévention et de contrôle des maladies, composée de data-managers et de médecins épidémiologistes, scrute la toile, les médias et les réseaux sociaux à la recherche de nouveaux cas.
L’Epidemic Intelligence est un système mondial de détection précoce des épidémies. Dès que l’algorithme repère l'annonce d'un cas de coronavirus sur la toile, les chercheurs s’assurent qu’il est avéré et qu’il s’agit bien du COVID-19. Il est ensuite répertorié numériquement.
Lutte contre les fake news
Mais sa tâche principale est de faire la chasse aux fausses informations. Une véritable course contre la monte pour Thomas Mollet, expert principal pour le projet Epidemic Intelligence à Stockholm.
"Les premières grosses crises que nous avons connues avec les fake news ont été les pandémies, notamment Ebola entre 2014 et 2016. C’est un gros de travail de détection. Actuellement, nous avons un problème de fake news sur les vaccins et évidemment sur le coronavirus", confie Thomas Mollet à l'émission Tout un Monde.
Pour vérifier les informations, les chercheurs ont créé des outils spécifiques pour analyser les réseaux sociaux. "Nous voyons des pics d’informations sur certains mots-clés. Quand nous détectons une fausse information qui commence à se propager, nous communiquons rapidement pour rétablir les faits."
Des millions de tweets chaque jour
Une fois la fake news détectée par la machine, c’est à l’humain de lancer les vérifications.
"Le risque d’avoir une fausse alerte est très élevé", estime Philippe Cudré-Mauroux, professeur à l'Université de Fribourg. "C’est pourquoi il faut encore des humains pour procéder à des vérifications. Les grandes entreprises, comme Google ou Facebook, investissent des millions de dollars pour avoir une information filtrée automatiquement. Actuellement, c’est impossible techniquement."
La tâche est titanesque. Pour le coronavirus, des millions de tweets sont analysés chaque jour par le projet Epidemic Intelligence. "Il faut des ordinateurs puissants", prévient Thomas Mollet. "L’objectif est d’extraire rapidement de l’information. On peut rater des infos, mais généralement nous détectons les informations importantes. Actuellement, il y en a une ou deux par jour."
Cette épidémie de coronavirus est une grande première en termes d’échange d’informations, selon Thomas Mollet. "Les Chinois communiquent surtout pour les Chinois. En même temps, ils partagent énormément d’informations avec le reste du monde. C’est la première fois qu’on arrive à suivre en temps réel une épidémie, car désormais les Etats ont compris qu’il faut collaborer en cas de pandémie."
Un travail de fourmi
Cette technologie Epidemic Intelligence va compléter la recherche de terrain effectuée par des épidémiologistes et des médecins. Dès qu'un malade est recensé, c'est un autre travail de fourmi qui commence.
Les scientifiques utilisent des techniques policières pour déterminer qui a été en contact avec qui. C'est précisément ce qui se passe en ce moment avec les voyageurs du navire Westerdam. Les 1200 voyageurs ont été autorisés à débarquer au Cambodge. Mais ils ont découvert qu'une Américaine, présente sur ce bateau, était porteuse du virus. Un long travail de recherche est en cours.
Natacha Van Cutsem