La piste xénophobe privilégiée après les fusillades qui ont fait dix morts en Allemagne
Les fusillades ont visé des bars à chicha de cette ville d'environ 90'000 habitants située près de Francfort. Le tireur a tout d'abord visé un bar au centre, puis il a quitté ce site en voiture. Une seconde fusillade s'est alors produite dans la zone fumeur d'un deuxième bar. Huit personnes ont été tuées.
Après plusieurs heures de recherches, l'auteur de la tuerie, un Allemand de 43 ans, a été retrouvé mort dans une maison, aux côtés d'un autre corps, sa mère âgé de 72 ans.
Les enquêteurs ont également retrouvé sa voiture qui contenait des munitions et chargeurs, a précisé la presse locale, ajoutant que le suspect était muni d'un permis de chasse.
Un acte xénophobe
Selon Peter Beuth, ministre de l'Intérieur du Land de Hesse, où se trouve Hanau, il s'agit d'un acte xénophobe. Le parquet anti-terroriste allemand s'est saisi de l'enquête jeudi matin. "Il existe des indices d'un arrière-plan extrémiste de droite", a indiqué l'un de ses porte-parole. Plusieurs victimes des fusillades sont d'origine turque.
Selon une source proche de l'enquête, une lettre d'aveux et une vidéo ont été retrouvées. La presse précise que l'homme, qui n'était pas connu des services de renseignement, y exprime des positions d'extrême droite, évoquant des peuples qu'il faut éliminer, exprimant sa haine des étrangers et déclarant que la science prouve que certaines races sont supérieures.
Dans la vidéo, l'homme tient des propos assez délirants, dénonçant des maltraitances d'enfants dans des installations militaires américaines souterraines. Et dans la lettre de 24 pages, rédigée dans un allemand parfait, il dit notamment qu'il a été surveillé toute sa vie par les services secrets et qu'il n'a jamais eu de relation intime avec une femme.
Merkel fustige le "poison" du racisme
Réagissant à la mi-journée, la chancelière Angela Merkel a fustigé le "poison" du racisme en Allemagne. "Le racisme est un poison, la haine est un poison. Et ce poison existe dans notre société, depuis les actes de la NSU jusqu'au meurtre de Walter Lübcke et aux assassinats de Halle", a déclaré la dirigeante, évoquant la série de meurtres et d'attentats d'un trio néo-nazi dans les années 2000, le meurtre en juin d'un élu pro-migrants, puis l'attaque visant une synagogue qui a fait deux morts en octobre.
"Nous nous opposons avec force et détermination à tous ceux qui tentent de diviser l'Allemagne", a-t-elle ajouté. Elle a insisté sur "les droits et la dignité de chaque personne dans notre pays", sans distinction "d'origine ou de religion".
"C'est un véritable scénario d'horreur", a de son côté déploré la députée conservatrice de la circonscription, Katja Leikert. Le maire social-démocrate de Hanau, Claus Kaminsky, a lui évoqué une "soirée terrible, qui nous hantera certainement pendant très, très longtemps.
Un important dispositif policier a été déployé dans la région durant toute la nuit. Une école voisine a été fermée pour la journée après ce drame.
boi avec agences
"Esprit charognard de l'extrême droite"
Interrogé par la RTS, Gilbert Casasus, professeur en études européennes à l'Université de Fribourg, estime que l'extrémisme en Allemagne vit "deux phénomènes en même temps". "Il y a une extrême droite très violente et une autre de plus en plus présente politiquement. Jusqu’à il y a quelques années, la violence traduisait une faiblesse politique, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui."
"Il faut s’inquiéter de cette concomitance", estime le spécialiste. "L’extrême droite allemande n’aime pas la République fédérale d’Allemagne (RFA). Ses partisans détestent cette Allemagne, son ancrage démocratique, citoyen, international et notamment européen. Il y a des liens idéologiques entre la période nazie et leur volonté de casser et de mettre fin à la RFA", assure-t-il.
"L’Allemagne a un passé qui n’est pas celui d’autres pays. Cet esprit charognard de l’extrême droite de détruire la démocratie est très présent. Il devrait être combattu avec force et détermination", estime Gilbert Casasus.
>> L'interview de Gilbert Casasus:
Les réactions à l'étranger
Je suis profondément choquée par la tragédie qui s’est déroulée hier soir à Hanau. Ce matin, c’est avec beaucoup de tristesse que je pense aux familles et aux proches des victimes, à qui je veux transmettre mes plus sincères condoléances. Aujourd’hui, nous partageons votre deuil.
— Ursula von der Leyen (@vonderleyen) February 20, 2020
Une immense tristesse et mon plein soutien à l’Allemagne face à cette attaque tragique. Nos pensées vont aux victimes et aux familles en deuil. Je suis aux côtés de la Chancelière Merkel dans ce combat pour nos valeurs et la protection de nos démocraties.
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) February 20, 2020