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La satire politique s'invite au carnaval de Rio de Janeiro

L'école Vigario Geral a présenté vendredi soir un clown géant avec l'écharpe présidentielle et faisant le signe d'une arme. [Enredo e Samba/YouTube - Capture d'écran]
La satire politique s'invite au carnaval de Rio de Janeiro / Le Journal horaire / 1 min. / le 23 février 2020
Les écoles de samba qui défilent depuis vendredi soir au Sambodomo, la fameuse avenue d'un kilomètre de long, défient ouvertement les politiciens et en particulier le président. Une caractéristique du carnaval de Rio est d'être le reflet du pays.

Le défilé des écoles de samba cette année ne fait pas dans la demi-mesure, tout comme les blocos, les fanfares de musiciens: tous aiment mêler la politique à la fête.

L'école Vigario Geral a présenté vendredi soir un clown géant avec l'écharpe présidentielle et faisant le signe d'une arme. Le clown était bien une allégorie de Jair Bolsonaro dont se moque aussi l'école Sao Clemente qui a construit son défilé autour des fake news, en partie responsables de l'élection du président.

Un Jésus noir au corps de femme

L'école de samba de Mangueira, située dans la favela du même nom juchée sur une colline qui surplombe le mythique stade Maracana, fait figure de bastion de la résistance face à la vague ultra-conservatrice qui a déferlé sur le pays.

Elle fait aussi une référence à Jair Bolsonaro avec son samba qui invite à ne pas "croire aux messies qui ont des armes à la main". Mangueira s'attaque surtout aux conservateurs religieux qui ont pris un rôle politique important cette année.

"Notre défilé est un cri de liberté contre le fascisme", déclare Marcus Portugal Feital, professeur de littérature de 61 ans, en plein milieu d'une répétition nocturne qui réunit plusieurs centaines de personnes dansant au rythme frénétique de la samba.

L'école présentera dimanche soir un Jésus noir, avec du sang indien et surtout un corps de femme. Une offense pour certains religieux, alliés de Bolsonaro et qui ont tenté en vain d'empêcher son défilé. On ignore encore la réaction du président mais on ne doute pas qu'il n'appréciera guère la satire qui le vise particulièrement  cette année.

"Jésus protège les plus vulnérables, les populations abandonnées par les pouvoirs publics, les Noirs qui vivent dans des ghettos. Il représente tout ce que ce facho de Bolsonaro ne fait pas", conclut Marcus Portugal Feital.

Sujet radio: Anne Vigna

Adaptation web: Stéphanie Jaquet/afp

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La transgression du carnaval

Le carnaval de Rio a toujours été synonyme de transgression. C'est le moment où toutes les folies sont permises avant la période d'abstinence du carême.

À Rio, les tensions politiques liées au carnaval sont d'autant plus exacerbées que le maire Marcelo Crivella est un évangélique qui a snobé les festivités depuis sa prise de fonction en 2017.

L'an dernier Mangueira avait remporté le titre grâce à un défilé contestataire mettant en lumière les héros populaires noirs et indigènes oubliés des livres d'histoire.

Tonalité politique exacerbée par "le gouvernement réactionnaire"

L'école avait également rendu un vibrant hommage à Marielle Franco, conseillère municipale noire et lesbienne assassinée en mars 2018.

"Le carnaval a toujours eu une tonalité politique, mais cette fois, c'est plus explicite, parce que nous sommes en présence d'un gouvernement réactionnaire", résume l'historien Luiz Carlos Simas.

afp/sjaq