Comme le relevait le Washington Post le 21 février dernier, les autorités américaines ont averti Bernie Sanders que la Russie était en train d'essayer d'aider sa campagne dans la course à l'investiture.
Dans l'immédiat, il n'a pas été spécifié par quels moyens les Russes étaient en train de prêter assistance au sénateur du Vermont mais, en 2016, c'est notamment à travers l'utilisation de bots sur les réseaux sociaux que des hackers russes avaient déjà aidé à rendre Bernie Sanders populaire au détriment de sa rivale Hillary Clinton. La même année et toujours face à Hillary Clinton, c'est Donald Trump qui avait été soutenu sur les réseaux sociaux par des comptes localisés en Russie.
Face à ces nouvelles accusations d'ingérences russes dans une élection américaine, le "socialiste" Bernie Sanders se veut très clair: "Je me fiche de qui Vladimir Poutine veut comme président. Mon message à Poutine est clair: restez en dehors des élections américaines. Et quand je serai président, je vais m'assurer que cela soit le cas".
L'objectif, créer le chaos
"C'est vraiment une opération à bas coûts et on ne sait pas dans quelle proportion elle est commanditée par le sommet de l'Etat russe ou peut-être par des oligarques qui cherchent à gagner les faveurs de Poutine en jetant quelques millions de dollars dans l'opération", explique Gennady Rudkevich, politologue au Georgio College, près d'Atlanta.
Interviewé par la RTS, il estime que l'objectif des Russes est surtout de créer le chaos. C'est pour cela que les hackers aident aussi sur les réseaux sociaux à booster Donald Trump.
"En choisissant à la fois le candidat anti-establishment à gauche et le candidat anti-establishment à droite, vous vous assurez que les deux côtés du spectre politique vont s'affronter en interne et plus ils se diviseront, moins il y aura de tentatives de s'opposer aux opérations de la Russie au Moyen-Orient, en Afrique ou partout ailleurs", juge Gennady Rudkevich.
Et d'ajouter: "Plus la Russie peut montrer que le démocratie en Occident est une faillite, qui crée ce genre de problèmes où les élites empêchent la population de nominer leur propre candidat - et c'est le discours de Sanders - plus les médias vont s'en servir pour dire: 'la démocratie est une institution horrible et vous les Russes, vous devriez être heureux avec ce que vous avez'."
Grosse incertitude après le "Super Tuesday"
Les informations concernant l'aide russe apportée à Bernie Sanders ont été divulguées une dizaine de jours avant le "Super Tuesday". Le sénateur progressiste était alors en position de favori après avoir notamment remporté la primaire du New Hampshire et le caucus du Nevada.
Il avait d'ailleurs tenté d'utiliser cette information pour excuser certains de ses militants, jugés parfois trop agressifs sur les réseaux sociaux: "En 2016, la Russie a mis en place un système de propagande sur internet pour semer la division dans notre pays. Selon ce que je comprends, ils recommencent en 2020. Certains contenus intolérables attribués à notre campagne pourraient bien ne pas provenir de mes vrais supporters."
Il est bien sûr impossible de dire si ces informations ont eu une influence sur le choix des électeurs, mais force est de constater que depuis, Bernie Sanders a perdu du poil de la bête. Face au ralliement de l'ensemble des centristes autour de Joe Biden, le politicien de 78 ans n'a réussi qu'à limiter la casse en arrivant en tête en Californie. Il est désormais passé de favori à outsider. Du coup, Moscou continuera-t-elle à le soutenir, d'une manière ou d'une autre?
Pour Gennady Rudkevich, le problème n'est pas là: "Tant que Sanders continue à représenter une candidature crédible, il va paralyser le parti démocrate et peut-être le pays tout entier. La Russie n'a pas besoin de le voir gagner."
Sujet radio: Cédric Guigon
Adaptation web: ther