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Quand l'humain n'est pas là, la nature danse, mais compte aussi des perdants

Boris Jollivet, preneur de son nature et audio-naturaliste. [Boris Jollivet]
La nature au temps du coronavirus / Prise de terre / 10 min. / le 28 mars 2020
De nombreuses espèces animales et végétales profitent du confinement des hommes dans un grand nombre de pays pour recoloniser des espaces d'où elles avaient été chassées. Mais la main de l'homme nourrissait et protégeait aussi certaines d'entre elles.

Le confinement partiel ou total imposé à une grande partie de la population mondiale en marge de l'épidémie de Covid-19 a des effets positifs sur certaines plantes et animaux, ont constaté des spécialistes de la faune et de la flore. Avec la baisse brutale de la présence humaine, les animaux sauvages urbains "ont quartier libre pour circuler dans les villes", explique Romain Julliard, directeur de recherche au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN) français. Il cite l'exemple des renards, qui "changent très vite leurs comportements. Quand un espace est tranquille, ils y vont".

>> Lire à ce sujet : Un tiers de l'Humanité est en confinement depuis mardi soir

>> Vidéo: des sangliers vagabondent dans les rues de Barcelone:

Les habitants de certains quartiers des grandes villes ont redécouvert le gazouillis des oiseaux. Des sangliers ont été aperçus à Barcelone, et un jeune puma s'est aventuré dans les rues de Santiago du Chili. Les animaux et les oiseaux vivant dans les parcs urbains, comme les moineaux, les pigeons et les corneilles, peuvent quitter leurs territoire habituel et "libérer de la place pour d'autres animaux", poursuit le chercheur.

"Dépollués du bruit humain"

Les oiseaux sont-ils vraiment plus nombreux qu'avant en milieu urbain? "C'est plutôt qu'on les entend mieux. Certains d'entre eux s'arrêtent de chanter quand il y a du bruit", explique de son côté Jérôme Sueur, un spécialiste de l'acoustique du MNHN. Le bruit perturbe aussi leurs comportements et génèrent du stress, poursuit-il. La disparition de la cacophonie des hommes est donc bénéfique pour certains animaux. "Ils sont dépollués du bruit humain", résume le chercheur.

Une buse à queue rousse déguste un pigeon à New York, dans un Central Park presque désert [Reuters - Mike Segar]
Une buse à queue rousse déguste un pigeon à New York, dans un Central Park presque désert [Reuters - Mike Segar]

La quarantaine intervient quand, pour certaines espèces, la saison des amours bat son plein. C'est le cas pour le crapaud commun et la salamandre tachetée, qui "traversent les routes et se font écraser régulièrement", indique un autre spécialiste. Le parc national des calanques, non loin de Marseille, est fermé aux promeneurs et aux plaisanciers. Là-bas, "la nature et les espèces retrouvent leurs espaces naturels à une vitesse qui nous surprend", indique son président Didier Réault. "Les puffins, qui nichaient sur des archipels, dans des zones de haute protection, se regroupent aujourd'hui sur l'eau".

Mauvaise nouvelle pour certains animaux

Les plantes tirent elles aussi parti de l'épidémie. Les orchidées sauvages, protégées, poussent fin avril/début mai et sont parfois cueillies par des promeneurs. Elles pourraient y échapper cette année. En ville, les pelouses non tondues fleurissent et offrent "des ressources pour les bourdons, les abeilles, les papillons", explique Romain Julliard. Pour le scientifique, "le phénomène le plus important est peut-être que notre attention à la nature change: les personnes confinées réalisent à quel point la nature leur manque".

>> Lire à ce sujet : "Profiter du confinement pour réfléchir à sa relation à l'environnement"

Le confinement des humains pourrait toutefois être une mauvaise nouvelle pour des espèces habituées à se nourrir de leurs déchets. Autre inconvénient: les opérations d'aide aux espèces menacées ou la lutte contre les espèces invasives peuvent être ralenties ou interrompues.

Une ONG nourrit les chiens errants dans la banlieue de la capitale turque Ankara [AFP - Esra Hacioglu]
Une ONG nourrit les chiens errants dans la banlieue de la capitale turque Ankara [AFP - Esra Hacioglu]

Il faudra aussi gérer la sortie du confinement. "Il y aura un besoin de nature, et une surfréquentation qui peut être défavorable à la faune et la flore", avertissent certains biologistes. Des oiseaux qui auraient décidé de nicher dans une cour d'école désertée pourraient être dérangés au moment où ses petits occupants humains reprendront leurs jeux.

Un agent de sécurité nourrit un écureuil dans un parc de Sofia, Bulgarie [Reuters - Dimitar Kyosemarliev]
Un agent de sécurité nourrit un écureuil dans un parc de Sofia, Bulgarie [Reuters - Dimitar Kyosemarliev]

afp/Vincent Cherpillod

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La nature a aussi ses "Fake News"

En ces temps d'épidémie, nombreuses sont les fausses informations qui circulent à propos du Covid-19, des précautions bidon à prendre pour éviter la contamination aux chaînes de messages soi-disant envoyés par le personnel du corps médical, en passant par les arnaques qui visent à profiter du stress ambiant.

>> Plus de détails dans notre article: Comment se prémunir contre les fausses informations sur le Covid-19?

Et les bonnes nouvelles n'échappent pas à ce genre d'infos inventées, prévient le National Geographic dans un article publié mardi dernier. Ainsi, aucun dauphin n'a été observé dernièrement dans les canaux vénitiens. Des éléphants ne se sont pas non plus enivrés de vin de riz dans un village chinois du Yunnan avant de s'assoupir dans une plantation de thé, relate le magazine américain, alors que ces nouvelles, accompagnées de photos modifiées ou prises ailleurs, ont envahi les réseaux sociaux.

Cygnes à Venise: habituel

Et si les canaux de Venise, plus précisément ceux de Burano, pas tout près du centre historique, ont bien accueilli des cygnes, leur visite y est très régulière, confinement des hommes ou non.

Selon la sociopsychologue Erin Vogel, l'émergence et le partage généralisé de ce genre de messages n'est pas étonnant vu le développement de l'épidémie. "Dans une période où l'on se sent très seul, il est tentant de s'y accrocher. (...) L'idée d'un épanouissement des animaux et de la nature pendant cette crise peut nous donner un sens et un but, de type 'toute cette souffrance n'aura pas été vaine'", explique l'experte.

>> Ecouter l'émission Médialogues revenir sur les moyens de résister aux Fake News: