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La messe en latin réhabilitée par Benoît XVI

Ecône refuse les aspects novateurs du concile Vatican II.
Benoît XVI fait un pas dans la direction de l'Eglise d'Ecône
Le pape a réhabilité la messe en latin, à la satisfaction des catholiques intégristes. Mais son décret s'accompagnera d'une lettre d'explication pour désamorcer les inquiétudes de nombreux fidèles.

Le «motu proprio» (décret) de Benoît XVI visant à libéraliser la
célébration de la messe «tridentine» en latin a été présenté à des
évêques mercredi et sera diffusé dans «quelques jours», a annoncé
jeudi le Vatican dans un communiqué. Dans une «lettre personnelle»
aux évêques, Benoît XVI explique «pourquoi il remet en valeur la
forme liturgique pré-conciliaire qui constitue une grande richesse»
pour l'Eglise, a précisé le cardinal Tarcisio Bertone, secrétaire
d'Etat du Vatican.

Benoît XVI a souvent critiqué les «abus» auxquels aurait donné
lieu la liturgie moderne qui a pris la place de l'ancienne après le
concile Vatican II (1962-65). Annoncé depuis plusieurs mois, son
«motu proprio» (décret) ne supprime pas la liturgie moderne mais
ouvre la porte à un usage plus large de l'ancienne, comme le
réclamaient les intégristes adeptes de l'évêque Marcel Lefebvre,
réunis au sein de la Fraternité Saint Pie X, fondée à Ecône (VS).
Mgr Lefebvre, aujourd'hui disparu, avait été excommunié par le pape
Jean Paul II en 1988

Craintes de nombreux évêques

L'un de leurs chefs de file en France, l'abbé Philippe Laguérie,
s'est déclaré «très content que ce document arrive». «Mais je ne
peux pas le commenter puisque je ne l'ai pas lu, il faut savoir
s'il y a des conditions et ce qu'elles sont», a-t-il déclaré. Le
communiqué du Vatican indique que le «motu proprio» concerne
«l'usage du missel promulgué par Jean XXIII en 1962»: il s'agit de
la dernière version de la messe «selon saint Pie V», encore appelée
«messe tridentine» (liturgie en latin célébrée par un prêtre le dos
tourné aux fidèles) qui a subi de nombreuses retouches depuis sa
promulgation au XVIème siècle.



Le cardinal Bertone a affirmé que «le rôle des évêques reste
central» dans le dispositif prévu. Alors que les fidèles, dans leur
immense majorité, sont aujourd'hui attachés à la liturgie moderne,
célébrée dans leur langue, de nombreux évêques craignent d'être
soumis aux pressions des petites minorités activistes qui ont fait
de la «messe de saint Pie V» leur cheval de bataille.

Dialogue repris avec Ecône

Le cardinal Jean-Pierre Ricard, président de la conférence
épiscopale française, avait fait valoir que les différends avec les
adeptes de Mgr Lefebvre n'étaient pas seulement liturgiques mais
aussi «théologiques (relatifs à la liberté religieuse, à
l'oecuménisme, au dialogue interreligieux) et politiques».



Benoît XVI avait repris le dialogue direct avec les intégristes le
29 août 2005 en recevant leur supérieur, Mgr Bernard Fellay. Par le
passé, Jean Paul II avait aussi cherché à leur faire réintégrer
l'Eglise. Il avait déjà entrouvert la porte à la célébration de la
messe tridentine à la condition qu'elle soit strictement encadrée
par les évêques.



agences/jab

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Des mots qui suscitent la polémique

Les griefs des cardinaux opposés à la messe en latin concernent notamment les mots utilisés dans ce rite tridentin, ou la forme de rejet qu'il constituerait par rapport aux avancées du Concile Vatican II, qui a eu lieu de 1962 à 1965, et qui a symbolisé l'ouverture de l'Eglise au monde moderne.

Le rabbin David Rosen, chargé des relations interreligieuses au Comité juif américain, avait écrit au mois de mars à plusieurs cardinaux pour exprimer son inquiétude concernant une prière pour les "infidèles" formulée pendant la messe de rite tridentin, ainsi qu'une prière utilisée pendant la Semaine sainte qui contenait des références aux "perfides", ou infidèles, les juifs.

Le cardinal Walter Kasper, chargé des relations entre le Vatican et les juifs, l'a toutefois assuré que le missel tridentin utilisé aujourd'hui ne contenait pas de référence au juif "perfide".