Poutine s'en prend à la politique américaine
"Les Etats-Unis sortent de leurs frontières nationales dans tous
les domaines et cela est très dangereux, personne ne se sent plus
en sécurité parce que personne ne peut plus trouver refuge derrière
le droit international", a déclaré le chef de l'Etat russe, devant
la 43ème conférence de Munich sur la sécurité. La conférence,
surnommé le "Davos de la sécurité", réunit quelque 270 experts
civils et militaires d'une quarantaine de pays.
Quand la chancelière Angela Merkel a ouvert les débats, évoquant
les conséquences potentielles "dramatiques", en termes de guerres
et d'immigration, du réchauffement climatique, et appelant la
communauté internationale à faire front face à cette menace, M.
Poutine et le président pro-occidental ukrainien Viktor
Iouchtchenko étaient assis côte à côte au premier rang, devisant
sans acrimonie apparente.
"Rien à voir avec la démocratie"
Le chef de l'Etat russe a ensuite pris la parole pour un
discours qui devait être le point fort de la conférence: "Un monde
unipolaire ne signifie en pratique qu'une chose, un centre de
pouvoir, un centre de force, un centre de décision agissant comme
un maître unique, un souverain unique, qui s'effondrera de
l'intérieur. Cela n'a rien de commun avec la démocratie", a-t-il
dit en allusion aux Etats-Unis et en présence de plusieurs
sénateurs américains, dont le Républicain John McCain.
Ce monde unipolaire, qui après la fin de la Guerre froide n'a
jamais vraiment fonctionné, serait de toutes manières inopérant en
raison de la montée en puissance économique de l'Inde, de la Chine,
du Brésil et de la Russie, a estimé en substance M. Poutine. Il a
saisi l'occasion pour critiquer de nouveau l'extension du bouclier
antimissile américain en Pologne et en République tchèque, un
projet qui selon lui "n'a rien à voir avec les menaces actuelles
dans le monde".
Le président russe, très à l'aise pour répondre aux questions
critiques du parterre sur la démocratie ou les relations avec
l'Iran, a cependant eu un bon mot pour George W. Bush: "le
président des Etats-Unis qui est mon ami est critiqué pour tout ce
qu'il fait, mais c'est un homme honnête et on peut faire des
affaires avec lui", a-t-il dit.
Nucléaire iranien
En présence d'Ali Larijani, le négociateur iranien sur le
nucléaire, la chancelière Angela Merkel a exhorté lors de la même
conférence l'Iran à se plier "sans conditions" et "sans
finasseries" aux exigences de la communauté internationale de
suspendre son programme d'enrichissement de l'uranium.
Ce pays est menacé de tomber dans un "isolement plus grand", a
ajouté la présidente de l'UE, lui rappelant l'offre de coopération
qui lui a été faite s'il suspend ce programme.
Ali Larijani, cité à son arrivée à Munich par l'agence officielle
iranienne IRNA, a réaffirmé les intentions pacifiques de l'Iran,
pays, a-t-il rappelé, affecté par plusieurs grandes guerres ces
vingt dernières années.
Selon la télévision iranienne, Ali Larijani qui doit prendre la
parole dimanche devant la conférence, aura des entretiens avec des
responsables allemands et européens, qui devraient l'exhorter à
revenir à la table de négociations.
afp/sun
La Maison Blanche "surprise et déçue"
"Nous sommes surpris et déçus par les déclarations du président Poutine. Ses accusations sont fausses. Nous comptons poursuivre la coopération avec la Russie dans les domaines importants pour la communauté internationale comme la lutte contre le terrorisme et la réduction de la menace des armes de destruction massive et de leur prolifération", a dit dans un communiqué un porte-parole du conseiller à la Maison Blanche pour la sécurité nationale, Gordon Johndroe.
Poutine: Bush est pire que Saddam
Vladimir Poutine a aussi estimé que l'intervention américaine avait fait plus de mal à l'Irak que Saddam Hussein, dans une interview à la chaîne de télévision satellitaire Al-Jazira.
Rappelant que Saddam Hussein a été pendu pour l'exécution de 148 villageois chiites, Vladimir Poutine a souligné que "pendant les combats en Irak plus de 3000 Américains ont été tués et (que) les victimes civiles en Irak sont estimées à des centaines de milliers".
"Peut-on comparer l'un et l'autre?", s'est-il interrogé. Il a une nouvelle fois appelé les Etats-Unis à établir un délai pour le retrait des troupes multinationales d'Irak et a critiqué la stratégie américaine.