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Jacques Chirac quitte le pouvoir

Sans surprise, Jacques Chirac ne sera pas candidat à sa succession
Sans surprise, Jacques Chirac ne sera pas candidat à sa succession
Après 12 ans à la tête de l'Etat français, le président Jacques Chirac a annoncé comme prévu dimanche à la télévision qu'il ne briguerait pas un troisième mandat. Il n'a pas recommandé de candidat à sa succession.

Il a ainsi mis un terme à une carrière politique d'une longévité
exceptionnelle: plus de 40 ans. Plus des trois-quarts des Français
ne souhaitaient pas qu'il reste dans la course après l'avoir élu en
1995 et 2002.



"Mes chers compatriotes, au terme du mandat que vous m'avez
confié, le moment sera venu pour moi de vous servir autrement. Je
ne solliciterai pas vos suffrages pour un nouveau mandat", a-t-il
dit lors d'une déclaration très attendue en direct.



"D'une manière différente, mais avec un enthousiasme intact et la
même passion d'agir pour vous, je continuerai à mener les combats
qui sont les nôtres, les combats de toute ma vie, pour la justice,
pour le progrès, pour la paix, pour la grandeur de la France",
a-t-il ajouté.

Sarkozy toujours pas adoubé

Jacques Chirac est resté muet dimanche sur son éventuel soutien
à Nicolas Sarkozy. Le président sortant entretient toujours le
mystère sur la position qu'il prendra finalement vis-à-vis d'un
homme avec lequel il entretient des relations ambivalentes.



"J'aurai l'occasion d'exprimer mes choix personnels", a-t-il
simplement dit dans son allocution. Le chef de l'Etat attendra
"quelques jours" pour rendre publique "sa décision ou pas quant à
son choix d'un candidat éventuel", a affirmé dimanche Nicolas
Sarkozy.



Evoquant son bilan après 12 années à l'Elysée, Jacques Chirac a
déclaré: "j'aurais voulu, bien sûr, bousculer davantage les
conservatismes et les égoïsmes, pour répondre plus vite aux
difficultés que connaissent certains d'entre vous. Mais je suis
fier du travail que nous avons accompli ensemble".

Rejet des extrémismes

Il a surtout voulu adresser plusieurs "messages" pour l'avenir
aux Français. Et "d'abord, ne composez jamais avec l'extrémisme, le
racisme, l'antisémitisme ou le rejet de l'autre", a-t-il plaidé.
"Dans notre histoire, l'extrémisme a déjà failli nous conduire à
l'abîme. C'est un poison. Il divise. Il pervertit, il détruit. Tout
dans l'âme de la France dit non à l'extrémisme".



"Mon deuxième message, c'est que vous devez toujours croire en
vous et en la France", a dit Jacques Chirac. "Nous ne devons pas
craindre les évolutions du monde (...) Il faut continuer à y
imprimer notre marque. Et il faut le faire sans jamais brader notre
modèle français". Son troisième message a été pour "l'Europe"
malgré l'échec du référendum de 2005. "Il est vital de poursuivre
la construction européenne".

Révolution écologique

Sur le plan international, "face au risque d'un choc des
civilisations", la France "doit défendre la tolérance, le dialogue
et le respect entre les hommes et entre les cultures", a souhaité
le chef de l'Etat. Jacques Chirac a aussi évoqué "la révolution
écologique qui s'engage".



"Si nous ne parvenons pas à concilier les besoins de croissance de
l'humanité et la souffrance d'une planète à bout de souffle, nous
courons à la catastrophe", a-t-il averti. "C'est avec beaucoup
d'émotion que je m'adresse à vous ce soir. Pas un instant, vous
n'avez cessé d'habiter mon coeur et mon esprit. Pas une minute je
n'ai cessé d'agir pour servir cette France magnifique", a-t-il
conclu.

Bilan négatif

Réagissant à l'annonce du retrait du président de la République,
le premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande a
estimé que «le bilan qui est le sien ne l'autorisait pas à briguer
un nouveau mandat».



Rappelant le thème de campagne de Jacques Chirac en 1995, la
«fracture sociale», il a déclaré que «douze ans après (...) les
inégalités se sont creusées, le problème du logement a été reposé
de manière dramatique lors de l'hiver, il y a un problème de
pouvoir d'achat, le chômage ne baisse que dans les
statistiques».



"Il y a une dignité d'intervention du chef de l'Etat qui fait
référence à des valeurs constitutionnelles qui nous appartiennent à
tous", a estimé Ségolène Royal sur la chaîne de télévision TF1.

"Plus mauvais président de l'Histoire"

Jean-Marie Le Pen, qui avait perdu en 2002 face à Jacques Chirac
après s'être hissé au deuxième tour à la surprise générale, a
qualifié Jacques Chirac de "plus mauvais président de la République
de l'Histoire de France" et jugé qu'il avait été "le symbole de la
corruption politique". Il a aussi affirmé qu'il perdait "son pire
ennemi".



Le bras droit de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux, s'est dit quant
à lui "frappé" par "la très grande pudeur", la "forte
authenticité", la "grande vérité", et la "véritable confiance en
l'avenir" qui ressort de l'intervention



présidentielle. "L'émotion était perceptible".

"Coup de chapeau" de Bayrou

Le centriste François Bayrou a pour sa part tiré un «coup de
chapeau» à Jacques Chirac pour les douze ans passés à l'Elysée. Il
n'y a pas eu pendant cette période «de ces explosions qui déchirent
un pays», a-t-il estimé.



Il a toutefois regretté que le président n'ait pas conduit une
politique «plus rassembleuse, ouverte et dynamique» après sa
réélection en 2002 et qu'il ait été «un peu moins entraînant au
niveau européen que je ne l'aurais souhaité».



agences/het/tac

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Longévité exceptionnelle

Il a eu maille à partir avec Margaret Thatcher, accueillait Saddam Hussein en tant que Premier ministre en 1975 et aurait pu poser avec Mao: gravitant dans les hautes sphères du pouvoir depuis 30 ans, et depuis 12 ans à son sommet, Jacques Chirac peut se prévaloir d'une longévité exceptionnelle, sans équivalent en Europe.

Entré en politique en 1965 (en Corrèze, département rural dont il sera député pendant près de 30 ans), Jacques Chirac a été nommé pour la première fois Premier ministre en 1974, poste qu'il a occupé à nouveau en 1986. Quittant le pouvoir à 74 ans, il aura exercé les fonctions de président de la République pendant 12 ans.

Une telle longévité n'est pas une première en France: en 1995, François Mitterrand avait 79 ans quand il a quitté l'Elysée, après deux septennats. Un record. Au total, la France n'aura donc connu que deux présidents en 26 ans, un cas unique en Europe.

Ses partisans voient en lui un homme chaleureux, généreux, «toujours attentif aux autres». Ses adversaires le décrivent comme un président «versatile», sans vision, «plus capable de conquérir le pouvoir que de l'exercer».

Ses biographes s'accordent toutefois à reconnaître que l'homme est bien plus complexe que l'image qu'il a longtemps donnée: un bon vivant au parler cru, amateur de bière mexicaine et de tête de veau. Car cet homme toujours en mouvement est aussi un amoureux de l'Asie, expert passionné de sumo, grand défenseur des «peuples oubliés», artisan du dialogue des cultures.

L'homme Chirac -qui se faisait parfois passer pour un "analphabète" mais s'est passionné pour l'Asie, les arts premiers et le dialogue entre les civilisations- restera par bien des côtés une énigme pour ses contemporains. On prête désormais au chef de l'Etat la volonté de créer une fondation pour l'environnement ou la solidarité avec les pays pauvres.

L'immunité de Chirac se termine en mai

Le temps de l'immunité présidentielle touche à sa fin pour Jacques Chirac. Une fois son mandat achevé en mai prochain, il risque d'être rattrapé par plusieurs affaires judiciaires datant pour la plupart de l'époque désormais lointaine où il était maire de Paris et président du RPR. Protégé par l'immunité conférée au chef de l'Etat, le président ne peut en effet être entendu comme témoin et mis en examen qu'une fois qu'il n'est plus en fonction.

L'affaire la plus dangereuse reste celle du financement occulte du RPR dans laquelle le nom de Jacques Chirac est apparu pour la première fois au détour d'une lettre. Le juge avait déjà mis en examen plusieurs cadres du RPR, dont Alain Juppé.