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La lourde facture de la pandémie pour les universités australiennes

L'Australie accueille de nombreux étudiants. [EPA/Keystone - Dean Lewins]
La lourde facture de la pandémie pour les universités australiennes / Tout un monde / 3 min. / le 10 juin 2020
La fermeture des frontières en Australie pour cause de pandémie éloigne les étudiants étrangers, ce qui pourrait coûter très cher aux universités. Elles estiment que leur manque à gagner potentiel dépassera l'équivalent de 10 milliards de francs d'ici 2023.

Après les Etats-Unis et le Royaume Uni, l'Australie est le troisième pays où les universités comptent le plus grand nombre d'étudiants internationaux. Ils sont plus de 500'000 chaque année, originaires essentiellement d'Asie et d'Amérique latine, à venir étudier ici. Sur certains campus, ils représentent même plus de la moitié des étudiants.

Cette configuration coûte aujourd'hui très cher aux universités qui, en faisant venir toujours plus d'étudiants étrangers, ont surtout cherché à compenser le recul constant des financements publics au cours des vingts dernières années.

Ce qui risque de ne pas arranger les choses, c'est que le gouvernement n'a rien fait pour ces étudiants étrangers. Au contraire, le Premier ministre Scott Morrison les a invités, au début de la crise, à rentrer chez eux. Sauf que pour beaucoup d'entre eux, ça n'était pas possible. Andréa, une étudiante colombienne rencontrée par Tout un monde dans le local d'une association qui donne des paniers de nourriture aux nécessiteux, s'offusque: "On a l'impression de n'être que des numéros dans ce pays, on n'est pas pris en compte en tant qu'humains, on n'est qu'une statistique. Je trouve ça très frustrant". Cette frustration est partagée par des milliers d'étudiants dans la même situation et pourrait ternir l'image de l'Australie en tant qu'eldorado des études.

Quatrième produit d'exportation

Si les étudiants venaient à déserter l'Australie, c'est toute l'économie du pays qui en souffrirait. L'éducation y est le quatrième produit d'exportation, après le fer, le charbon et le gaz naturel. Les étudiants étrangers injectent chaque année près de 25 milliards de francs dans l'économie. Ils étudient, mais paient aussi des loyers, dépensent dans les magasins et participent à la vie nocturne. Quand ils le peuvent, ils voyagent aussi et contribuent donc à faire marcher le tourisme.

Ce sont les universités qui captent l'essentiel de cette manne. Gaby Ramia, professeur de politiques publiques à l'Université de Sydney, chiffre la contribution des étudiants étrangers à environ 26% des revenus des universités et ajoute que cette contribution finance 240'000 emplois en Australie. Sans ces étudiants étrangers, ce sont donc des dizaines de milliers d'emplois qui seraient menacés, d'autant plus que le gouvernement, qui a débloqué des dizaines de milliards pour financer des mesures de chômage partiel, a refusé d'en faire bénéficier les employés des universités.

Un corridor étudiant

Pour ne pas ruiner complètement ce secteur d'activité très lucratif, les frontières de l'Australie pourraient rouvrir aux détenteurs d'un visa étudiant. Gaby Ramia évoque un projet en cours, un corridor avec certains pays, notamment d'Asie, qui sont une source majeure d'étudiants étrangers, pour que les étudiants puissent revenir en Australie.

Mais la seule très bonne réputation des universités australiennes ne suffira peut-être pas à faire revenir ces étudiants étrangers, car ils seront peut être moins enclins à payer de très onéreux frais de scolarité pour des cours qui resteront encore longtemps essentiellement en ligne.

Gregory Plesse / lbw

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