Pékin n'a pas hésité à dégainer diverses taxes commerciales, arme pourtant décriée par le gouvernement chinois au moment où Washington optait pour cette même méthode de confrontation.
Fin mai, la Chine a imposé des droits de douanes de plus de 80% sur l'orge australien… De quoi sinistrer cette industrie qui a vu se refermer soudainement son plus gros marché d'exportation. Autre mesure: l'importation de viande issue des quatre plus gros abattoirs australiens, des mastodontes de la découpe, est aussi désormais interdite.
Pékin déconseille en outre à ses ressortissants de se rendre en Australie: touristes et étudiants sont priés de considérer d'autres destinations, un coup dur pour le pays et ses universités, dont les visiteurs et étudiants chinois représentent une manne financière importante.
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D'autres cibles sont encore dans le viseur: les produits laitiers et le vin pourraient être les prochaines victimes de la vindicte chinoise.
Des sanctions une semaine après des critiques australiennes
Officiellement, Pékin invoque toutes sortes de raisons pour justifier ces sanctions, notamment des subventions déloyales de l'Australie à son agriculture ou des discriminations à l'encontre des ressortissants asiatiques. Mais dans les faits, la foudre chinoise s'est abattue une semaine tout juste après les critiques de Canberra au sujet de la gestion de la crise du coronavirus en Chine. La question des origines de la pandémie est un sujet délicat pour le pouvoir chinois qui rejette toutes critiques à son encontre.
La dégradation de la relation entre les deux pays remonte pourtant à plus loin. Les incidents se sont multipliés ces dernières années, entre affaires d'espionnages ou encore achats de politiciens: la Chine tente d'influencer activement la politique et la société australienne. Pour nombre d'experts, le territoire du bout du monde est un laboratoire démocratique pour Pékin qui y teste différents leviers d'action. Ces récents scandales ont suscité une levée de boucliers en Australie. Les faucons antichinois ont le vent en poupe dans le pays, grand allié de Washington dans la région.
Vers une alliance entre Etats-Unis, Japon, Australie et Inde?
Proche des États-Unis, dont elle partage les valeurs, l'Australie entretient une alliance militaire historique avec Washington. Depuis l'ouverture économique de Pékin dans les années 1980, Canberra a cependant aussi développé d'intenses relations avec la Chine dont elle dépend aujourd'hui largement sur le plan économique.
Les récentes tensions pourraient considérablement renforcer les liens entre Canberra et Washington qui tente d'étendre ses alliances militaires régionales avec son projet baptisé Quad. Le concept repose sur un grand quadrilatéral stratégique composé des Etats-Unis, du Japon, de l'Australie et de l'Inde. En voie de discussion, le projet pourrait devenir réalité.
D'autant plus que l'Inde, frileuse jusqu'ici, paraît de plus en plus favorable à cette idée. New Dehli et Pékin s'affrontent en ce moment à la frontière sino-indienne dans l'Himalaya dans un face-à-face militaire sous haute tension.
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L'attitude agressive de la Chine est qualifiée de catastrophe diplomatique par de nombreux observateurs qui craignent de voir cette stratégie offensive se retourner contre elle.
Michael Peuker/ebz