Jeune, fringant et charismatique, Fabio Fara a insisté sitôt entré dans ses fonctions sur l'importance de "pacifier" le pays en proposant un "armistice patriotique", une sorte d'union sacrée pour combattre le coronavirus, dont le Brésil est le deuxième foyer dans le monde, après les Etats-Unis.
Un ton conciliant pour ce ministre âgé de 42 ans, visiblement choisi pour redorer l'image d'un gouvernement secoué par une crise politique qui pourrait coûter son mandat à l'actuel chef d'Etat.
Tout l'inverse donc du ton belliqueux de Jair Bolsonaro, impulsif et corona-sceptique, en conflit perpétuel avec le Parlement, la Cour suprême et les gouverneurs ayant mis en place des mesures de confinement pour tenter d'endiguer la pandémie.
Un président qui entretient depuis le début de son mandat des relations très conflictuelles avec une partie de la presse, qu'il traite souvent avec mépris et qui le lui rend bien. Il a affirmé que les journalistes étaient "une espèce en voie d'extinction".
Les atouts du nouveau ministre
Pour donner une image plus respectable du gouvernement, Fabio Faria va aussi devoir s'affirmer face à un "cabinet de la haine", qui serait mené par Carlos Bolsonaro, fils cadet du président d'extrême droite.
Ce groupe informel qui opère depuis le palais présidentiel du Planalto, à Brasilia, est à l'origine de campagnes incendiaires sur les réseaux sociaux contre les ennemis de Jair Bolsonaro. Il est aussi soupçonné de disséminer de fausses informations.
Autre atout du nouveau ministre: il est député du "Centrão", un groupe de 200 parlementaires d'une douzaine de partis centristes, représentant près du tiers des sièges de la Chambre.
Leur vote serait décisif en cas d'ouverture d'une procédure de destitution de Jair Bolsonaro, soupçonné entre autres d'ingérence dans des enquêtes policières visant ses proches.
Communication ou propagande?
"Le ministère de la Propagande a été recréé", a ironisé sur Twitter Sergio Moro, ancien ministre de la Justice, qui avait claqué la porte il y a deux mois.
Une référence aux régimes totalitaires, mais aussi au Département de Presse et Propagande créé en 1939 par le président Getulio Vargas au moment de l'Estado Novo, un régime d'inspiration fasciste, pour museler la presse et diffuser massivement l'idéologie du gouvernement.
Le ministère des Communications avait été créé en 1967, en pleine dictature militaire. Il est resté en place ensuite, avant d'être absorbé par le ministère des Sciences et Technologies en 2016.
Le ministère est aussi chargé de l'attribution des concessions pour les chaînes hertziennes et des dépenses du gouvernement en publicité institutionnelle dans les grands médias. Jair Bolsonaro a menacé à plusieurs reprises de priver de cette manne des journaux ou des chaînes de télévision trop critiques envers lui.
"Bolsonaro veut clairement se rapprocher de certains groupes de presse qui lui sont plus favorables", estime Fernando Nogueira, un spécialiste en administration publique à la Fondation Getulio Vargas.
La Fédération Nationale des Journalistes (Fenaj) du Brésil a dénoncé dans un communiqué un "conflit d'intérêts" de Fabio Faria, en raison de ses liens étroits avec un des plus grands magnats de la télévision du pays.
afp/ddup
Pour la première fois, un ministre noir
Pour succéder à Abraham Weintbraum, le ministre de l'Education qui a démissionné après avoir insulté la Chine et les juges de la Cour suprême, le président brésilien a choisi Alberto Decotelli, militaire et universitaire. Il a d'emblée promis de reprendre le dialogue avec les enseignants. Ce choix a surpris, d'abord parce que Jair Bolsonaro nomme là la première personne noire dans son gouvernement. Ensuite, parce qu’il montre une volonté d'apaisement en nommant une personne peu marquée à l’extrême droite.