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Emmanuel Macron, en marche forcée vers une France plus verte

Vague verte aux municipales françaises
Vague verte aux municipales françaises / 12h45 / 1 min. / le 29 juin 2020
Les écologistes ont remporté plusieurs grandes villes françaises, dont Lyon et Bordeaux, dimanche au deuxième tour des élections municipales. Un séisme politique dont le président Emmanuel Macron, à mi-mandat, a déjà commencé à prendre la mesure.

Près de 60% des électeurs inscrits n'ont pas voté, mais le président de la République ne pouvait pas ignorer longtemps le palmarès impressionnant des villes raflées par des écologistes au deuxième tour des élections municipales.

>> Lire aussi : Vague verte lors des municipales en France, Hidalgo et Philippe réélus

Lyon, Bordeaux, Strasbourg, Besançon ou encore Annecy ont répondu à l'appel des Verts, au détriment souvent des candidats présentés par La République en marche (LREM), la formation d'Emmanuel Macron. Par endroits, d'illustres inconnus ont même été préférés à des ténors de la politique française.

La fin d'une époque à Lyon

C'est le cas par exemple à Lyon où les électeurs et électrices signent la fin de l'ère Gérard Collomb, maire socialiste pendant près de vingt ans et ancien ministre de l'Intérieur d'Emmanuel Macron, dont il fut l'un des soutiens de poids en 2017.

Les Verts ont une sorte de virginité politique que n'ont pas les partis traditionnels. On se tourne vers eux pour incarner une alternative politique

Jean Garrigues, historien

La liste menée par Grégory Doucet, 46 ans et une carrière dans l'humanitaire derrière lui, arrive ainsi largement en tête avec 52,4% des suffrages, selon les résultats définitifs, devant le candidat LREM, le gymnaste Yann Cucherat. Ce  dernier s'était pourtant allié après le premier tour avec le candidat Les Républicains (droite), Etienne Blanc, ancien député-maire de Divonne-les-Bains, qui tentait sa chance à Lyon, preuve s'il en est que la stratégie choisie par le camp Macron n'a pas fonctionné.

>> Revoir le reportage du 19h30 :

Municipales en France: vague verte à Lyon
Municipales en France: vague verte à Lyon / 19h30 / 2 min. / le 29 juin 2020

Une "déception" pour le gouvernement

"C'est un échec qui était prévisible. Emmanuel Macron anticipait avant même le second tour ce que pourrait être le rebond et la deuxième moitié de son quinquennat", souligne l'historien Jean Garrigues, interrogé dans La Matinale de la RTS lundi matin. "Cela rappelle la difficulté pour LREM qui s'est construite autour de l'adhésion à un homme, de se constituer en véritable parti, à construire des réseaux et à se construire une identité politique à travers des alliances, en général avec Les Républicains, parfois avec la gauche", analyse-t-il.

Invitée dimanche soir sur le plateau de la télévision publique France 2, la porte-parole du gouvernement a fait part de "la déception" de la majorité, qui a enregistré des scores parfois "extrêmement décevants", en raison de "ses divisions" lors de ces municipales. Sibeth Ndiaye a également laissé entendre que LREM ne pourrait plus se permettre de telles fractures à l'avenir. Et pour cause, arrivé à la moitié de son quinquennat, Emmanuel Macron doit désormais commencer à préparer la présidentielle de 2022.

Remaniement ministériel évoqué

C'est pour évoquer la stratégie des mois à venir que le président a rencontré son Premier ministre, dès lundi matin, alors que la rumeur d'un remaniement enfle à Paris. La principale inconnue repose sur le maintien ou pas d'Edouard Philippe à Matignon.

Le chef du gouvernement français, confortablement élu au Havre, où il a été maire de 2010 à 2017 et où il ne se présentait au demeurant pas sous les couleurs de LREM, a d'ores et déjà fait comprendre qu'il n'assumerait pas un virage social ou écologiste trop marqué si tel devait être la direction prise par l'Elysée.

"Comme une inflexion écologique doit se concrétiser, s'incarner dans les hommes, il serait surprenant que le remaniement ministériel qu'on annonce n'acte pas cette évolution écologique", relevait l'historien Jean Garrigues sur La Première. Le chef de file des Verts Yannick Jadot a cependant exclu toute entrée d'Europe Ecologie - Les Verts (EELV) au gouvernement.

Premier train de mesures annoncé

En annonçant que 15 milliards d'euros supplémentaires seront injectés sur deux ans pour la conversion écologique de l'économie française, le président a en tout cas tiré les leçons des élections municipales et esquissé les lignes de la fin de son quinquennat.

Le sujet pour le président, c'est pas d'enrayer la montée des écologistes, c'est d'enrayer la montée des températures, du niveau de la mer, des inégalités, de la défiance dans notre pays

Yannick Jadot, député européen Europe Ecologie - Les Verts

Devant la Convention pour le climat, un groupe de 150 citoyens tirés au sort et chargés d'élaborer des réponses à l'urgence climatique, il a également annoncé qu'il allait transmettre au gouvernement ou au Parlement, ou encore soumettre à référendum, "la totalité des 149 propositions à l'exception de trois d'entre elles".

Un rôle pivot pour les Verts

Plus tôt dans la journée, le député européen Verts Yannick Jadot avait appelé le président Macron à sortir du "déni écologique", se positionnant en leader d'opposition, lui qui ne cache pas son ambition de jouer un rôle majeur dans un paysage politique français en pleine recomposition.

Au point que le numéro un du PS Olivier Faure s'est même dit prêt, lundi sur RTL, à se ranger, pour la présidentielle, derrière le candidat qui "incarnera le bloc social-écologiste".

Mais avec près de 40% d'opinions favorables, soit le double de son prédécesseur François Hollande à la même période de son mandat, Emmanuel Macron n'a pas encore dit son dernier mot.

>> L'interview de l'historien français Jean Garrigues dans La Matinale :

Records d’abstention au second tour des municipales en France: interview de Jean Garrigues (vidéo)
Records d’abstention au second tour des municipales en France: interview de Jean Garrigues (vidéo) / La Matinale / 9 min. / le 29 juin 2020

Juliette Galeazzi

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La défaite en creux du Rassemblement national

Principal adversaire d'Emmanuel Macron au plan national, le Rassemblement national (RN) a remporté Perpignan, 120'000 habitants. En battant le maire LR sortant Jean-Marc Pujol avec 53,1 à 54% des voix selon les estimations, l'ex-compagnon de Marine Le Pen, Louis Aliot, redonne au parti le contrôle de sa première ville de plus de 100'000 habitants depuis Toulon, en 1995. Le parti a également remporté Bruay-la-Bussière (Pas-de-Calais) et Moissac (Tarn-et-Garonne).

"Ce n'est pas seulement d'ailleurs une victoire symbolique, c'est un vrai déclic, parce que nous allons aussi pouvoir démontrer que nous sommes capables de gérer de grandes collectivités", s'est réjouie Marine Le Pen.

"Le déclic reste cependant discret", comme le relève le quotidien Le Monde, qui souligne que la formation d'extrême droite a aussi perdu deux des dix communes conquises en 2014, Le Luc, dans le Var, et Mantes-la-Ville en région parisienne. Le sénateur Stéphane Ravier a en outre été défait à Marseille, ce que le parti passe sous silence.

Pas de majorité trouvée à Marseille

La candidate de l'union de la gauche à Marseille, Michèle Rubirola, a reconnu n'avoir obtenu qu'une "victoire relative" au second tour des municipales, tout en soulignant que la droite, arrivée derrière le Printemps marseillais, n'était "plus en mesure de gouverner la ville".

"Cette victoire ne nous offre qu'une majorité relative en sièges, fruit d'un système électoral par secteurs qui est un contresens démocratique", a déclaré l'écologiste Michèle Rubirola. "C'est une victoire relative pour nous mais c'est une défaite pour la droite, la droite n'est plus en mesure de gouverner cette ville."

"Ce soir, je n'ai pas perdu, ce soir, il n'y a pas de majorité à Marseille", a déclaré Martine Vassal, tête de liste Les Républicains. Sa défaite dans un secteur jugé imperdable par la droite, où Jean-Claude Gaudin était régulièrement élu dès le premier tour, affaiblit la droite qui ne s'avoue pas encore vaincue après 25 ans à la tête de la ville. Une troisième tour est possible.