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Premières arrestations liées à la nouvelle loi sécuritaire à Hong Kong

Manifestations à Hong Kong: premières arrestations liées à la loi sur la sécurité nationale.
Manifestations à Hong Kong: premières arrestations liées à la loi sur la sécurité nationale. / 19h30 / 2 min. / le 1 juillet 2020
"La Chine doit revoir sa loi sur la sécurité nationale à Hong Kong", estiment 27 États, dont la Suisse, dans un communiqué au Conseil des droits de l’Homme des Nations Unies à Genève. Entré en vigueur peu avant minuit dans l’ancienne colonie britannique, le texte a déjà mené à une trentaine d'arrestations.

Promulgué mardi par le président chinois Xi Jinping après avoir été adopté par le comité permanent du Parlement, le contenu de ce texte controversé visant à museler l’opposition pro-démocratique hongkongaise a été dévoilé au moment de sa mise en œuvre. Les Hongkongais en ont découvert le contenu simultanément, limitant les critiques ou les contestations. Ce fait accompli est une mise au pas sans précédents de la part de Pékin.

Hong Kong se réveille ainsi sonnée par un coup de massue dont le mouvement pro-démocratique pourrait ne pas se relever. Rédigée de manière ambiguë, la loi criminalise comme annoncé les actes de séparatisme, de subversion, de terrorisme et de collusion avec les Etats étrangers.

Les accusés de ces quatre types de crimes risquent jusqu’à la prison à perpétuité, tout comme les individus qui "incitent à la haine contre les gouvernements de Pékin ou de Hong Kong". Des extraditions en Chine continentale pourront être décidées dans certains cas. A noter enfin que cette loi supplante le droit et les institutions hongkongaises.

Drapeaux et slogans interdits

À titre d'exemple, paralyser des infrastructures ou vandaliser les transports publics sera considéré comme des actes de subversion ou de terrorisme, tandis qu'appeler au soutien d'un État tiers ou à des sanctions internationales contre la Chine et Hong Kong sera considéré comme de la collusion. Les slogans écrits ou chantés appelant à l’indépendance, à la révolution ou remettant en cause l’unité de la Chine sont par conséquent désormais illégaux.

Au-delà de ces détails visant à prévenir de nouvelles manifestations de masse, la loi cible toute tentative de remettre en cause le système fondamental de la République Populaire de Chine, basé sur un parti unique. Le gouvernement local bénéficie de la même protection.

Premières arrestations

Un vent de panique souffle donc sur le territoire. De nombreuses formations pro-démocratiques ont été dissoutes mardi par craintes de représailles, et de nombreux commerces qui affichaient jusqu’ici de manière ostentatoire leur solidarité aux manifestations ont commencé à débarrasser les affiches et les signes de soutiens. Sur les réseaux sociaux, beaucoup de Hongkongais suppriment leurs comptes ou nettoient leurs publications.

Un homme trouvé en possession d'un drapeau en faveur de l'indépendance de Hong Kong a été arrêté mercredi matin dans le cadre de cette nouvelle loi, a annoncé mercredi la police sur son compte Twitter. Il s'agissait de la première arrestation depuis l'entrée en vigueur du texte.

Plus tard, la police a fait usage d'un canon à eau pour disperser des manifestants. Elle a annoncé avoir arrêté au moins 180 personnes mercredi, dont sept en vertu de la nouvelle loi, alors que des milliers de manifestants ont défié l'interdiction de se rassembler pour l'anniversaire de la rétrocession de la ville à la Chine.

Après des mois de contestation et un plébiscite lors des élections locales l’automne dernier, où 90% des sièges ont été raflés par l’opposition, l’aventure du mouvement pro-démocratique se termine donc en queue de poisson. Par son intervention brutale, le parti communiste rappelle qu’il ne tolère aucune contestation.

Réactions internationales

Cette législation "est un point d'inflexion entre le chaos et la bonne gouvernance", a déclaré mercredi la cheffe de l'exécutif de Hong Kong Carrie Lam lors d'une cérémonie marquant le 23e anniversaire du retour à la Chine de l'ancienne colonie britannique.

Les réactions internationales ont immédiatement afflué. Dans un communiqué au Conseil des droits de l’Homme des Nations unies à Genève, 27 Etats, dont la Suisse mais aussi la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne ou encore le Japon, ont fustigé mardi soir la nouvelle législation et ont invité la Chine à réexaminer cette loi qui "menace" selon eux les libertés à Hong Kong.

Aux États-Unis, des représentants Démocrates et Républicains au Congrès ont lancé un projet de loi bipartisan pour accorder le statut de réfugié à certains résidents de Hong Kong menacés de persécution.

De son côté, le Premier ministre britannique Boris Johnson a annoncé que le Royaume-Uni étendra les droits à l'immigration et faciliter à terme l'accès à la citoyenneté britannique pour les citoyens de Hong Kong. Les autorités britanniques avaient menacé la Chine de renforcer les droits des titulaires du passeport BN(O), pour "Citoyen Britannique (d'Outre-mer)" en cas de mise en oeuvre de cette loi.

Amnesty International a pour sa part condamné un coup de force destiné à "répandre la peur dans le territoire".

"Logique de bandits"

De son côté, le chef de la diplomatie américaine a menacé Pékin de nouvelles représailles. "Aujourd'hui est un triste jour pour Hong Kong et pour tous les amoureux de la liberté en Chine", a dénoncé Mike Pompeo dans un communiqué. "Les États-Unis ne resteront pas les bras croisés", a-t-il tonné, "nous éliminerons les exemptions politiques qui accordent à Hong Kong un traitement différent et spécial, à quelques exceptions près".

A la fin mai, Washington avait déjà frappé fort en révoquant le statut commercial préférentiel de Hong Kong.

En réaction, Pékin a fustigé mercredi "une logique de bandits" des "pays qui ont déclaré qu'ils imposeraient de lourdes sanctions à certains responsables chinois". "Nous ne vous avons pas provoqués. De quel droit êtes-vous agressifs avec nous?", s'est interrogé mercredi devant la presse le directeur adjoint du Bureau des affaires de Hong Kong et Macao du régime communiste, Zhang Xiaoming, estimant que la loi imposée mardi ne "regardait pas" les pays étrangers.

Michael Peuker/agences/jop

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La Chine s'en prend aux Etats qui la critiquent, dont la Suisse

La Chine s'est fâchée contre les 27 pays, dont la Suisse, qui ont critiqué la loi sécuritaire imposée à Hong Kong. Depuis Genève, Pékin a accusé ces pays d'interférer, en demandant de ne pas appliquer cette législation, dans ses affaires intérieures.

Dans une déclaration devant l'instance onusienne à Genève à laquelle la Suisse s'est associée, l'ambassadeur britannique avait appelé, au nom de son pays et de 26 autres, les gouvernements chinois et de Hong Kong à "reconsidérer l'imposition de cette législation".

La réponse de la Chine aux Etats qui se sont opposés, surtout des pays européens, ne se sera pas fait attendre très longtemps. La mission chinoise auprès de l'ONU à Genève a accusé dans la nuit de mardi à mercredi ceux-ci d'"interférer dans ses "affaires intérieures" et d'avoir violé la Charte des Nations Unies. Pékin affirme que ces actes sont "condamnés à échouer" et dénonce les "motivations politiques" et les "accusations injustifiées" de la Suisse et des cosignataires de la déclaration britannique.

Taiwan ouvre ses portes aux "réfugiés" hongkongais

Taiwan a ouvert mercredi un bureau destiné à aider les personnes souhaitant fuir Hong Kong après que la Chine a imposé une nouvelle loi de sécurité nationale dans l'ancienne colonie britannique. Quelque 200 ressortissants de Hong Kong ont déjà fui le territoire depuis le début du mouvement de contestation l'an dernier pour rejoindre Taiwan, selon des groupes de défense des droits civiques.

Un représentant de haut rang à Taipei a indiqué que l'île continuerait de soutenir la démocratie à Hong Kong, comme elle le fait depuis le début du mouvement. La présidente taiwanaise Tsai Ing-wen a été, en mai, la première cheffe de gouvernement à promettre des mesures de soutien aux citoyens hongkongais.

Pour rappel, Taiwan est considéré comme une province renégate par Pékin depuis 1949, qui n'exclut pas de recourir à la force pour ramener l'île dans son giron.