Le président russe a causé la sensation en proposant aux
Etats-Unis d'utiliser pour leur bouclier des installations dans
l'ex-Union soviétique plutôt que d'en créer de nouvelles en Europe.
Il s'agirait d'"une utilisation commune de la station de radar que
nous louons en Azerbaïdjan", a-t-il déclaré à la presse à l'issue
de son premier entretien en tête-à-tête avec George W.Bush depuis
novembre, en marge du G8 de Heiligendamm.
Azerbaïdjan d'accord
Le président russe a précisé avoir déjà parlé de cette idée avec
le président azerbaïdjanais, qui a, selon lui, apporté son soutien
de principe. Un tel système, selon lui, permettrait aux Américains
et aux Russes de détecter "immédiatement" un éventuel "essai de tir
de missile à longue distance de la part de n'importe quel pays, y
compris l'Iran".
Dans un langage martial, Vladimir Poutine avait menacé de diriger
de nouveau les missiles russes vers des cibles européennes, comme
du temps de la guerre froide, au cas où Washington mettrait à
exécution son projet de bouclier anti-missile en Pologne et d'une
station radar en République tchèque.
«Suggestions intéressantes»
George W.Bush a parlé de "suggestions intéressantes", ajoutant
qu'il "est bien mieux de travailler ensemble (avec Moscou, ndlr)
plutôt que de créer des tensions" entre les deux pays, qui ont mis
sur pied un groupe d'experts chargé d'étudier la proposition russe.
Washington assure que son projet vise uniquement des "Etats voyous"
comme l'Iran, mais la Russie s'estime menacée et a vivement
réagi.
Ce dossier s'est ajouté à une série déjà longue de contentieux
avec l'Occident, sur l'indépendance du Kosovo ou la politique
énergétique menée par Moscou notamment.
Maigre accord sur le climat
La journée du G8 à Heiligendamm (nord-est de l'Allemagne) a été
par ailleurs marquée par l'annonce d'un compromis du G8 sur les
moyens de lutter contre le réchauffement climatique.
La chancelière allemande Angela Merkel, hôte de la réunion, a
d'abord parlé d'un "grand succès", affirmant que "tous les pays du
G8" s'étaient donnés comme objectif de réduire de moitié d'ici 2050
leurs émissions de gaz à effet de serre, responsables du
réchauffement climatique.
Mais le texte du communiqué distribué par la suite à la presse
montre que les pays riches en sont en fait restés au stade des
déclarations de principe, ainsi que le voulaient les Etats-Unis
depuis le début.
Nouvel accord après Kyoto
Le G8 souhaite en outre conclure d'ici 2009 un nouvel accord sur
le changement climatique qui entrerait en vigueur après Kyoto.
«Nous invitons les principales économies émergentes (Chine,
Inde...) à nous rejoindre dans cet effort», selon la déclaration du
forum qui réunit les Etats-Unis, la Russie, l'Allemagne, la France,
la Grande-Bretagne, l'Italie, le Japon et le Canada.
Si les dirigeants du G8 ont exprimé leur satisfaction, les
défenseurs de l'environnement ont exprimé de vives critiques.
Greenpeace en tête, ils ont condamné l'incapacité du G8 à
s'entendre sur des objectifs précis et contraignants.
Autre sujet de friction, l'Afrique
L'aide à l'Afrique, autre grande priorité du G8, devait être un
sujet plus consensuel que le climat, mais là aussi les huit
semblent être à la peine: certains d'entre eux sont même soupçonnés
de traîner les pieds. Le sujet sera débattu vendredi en Allemagne,
mais les ONG jugent que les pays riches sont incapables de tenir
leurs engagements.
Les pays riches avaient promis de dou bler leur aide à 50
milliards de dollars par an à partir de 2010, dont 25 milliards
pour l'Afrique noire. Les ONG craignent aussi un relâchement dans
le financement du fonds de lutte contre le sida et la
tuberculose.
afp/tac
Course-poursuite spectaculaire sur mer
La police allemande a fait chavirer jeudi deux canots pneumatiques de Greenpeace qui avaient pénétré dans le périmètre de sécurité maritime établi autour du secteur où se tient le sommet du G8 à Heiligendamm. Trois militants ont été blessés.
Greenpeace, à l'origine de l'opération, a expliqué qu'il s'agissait de remettre un message aux dirigeants du groupe des huit pays les plus industrialisés pour les exhorter à s'engager sur des objectifs chiffrés de réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Après une course-poursuite en mer Baltique, les embarcations ont été interceptées par la police. Quatre manifestants ont fini à l'eau. Les bateaux des militants ont ensuite été immobilisés.
Greenpeace dit avoir déployé onze bateaux dans la Baltique près d'Heiligendamm, mais précise qu'aucun n'a pu atteindre le site où se tient le sommet. «J'espère qu'ils ne vont pas émettre trop de dioxyde de carbone avec leurs allées et venues en bateau sur la Baltique», a ironisé la chancelière allemande Angela Merkel.
Pour la deuxième journée consécutive, des milliers de manifestants se sont rassemblés à proximité de la clôture de haute sécurité entourant le site où se déroule le sommet et des heurts ont éclaté avec les forces de l'ordre. La police a fait état de 260 arrestations pour la journée.
La principale voie d'accès à Heiligendamm est bloquée depuis plus de 24 heures. Quelque 4000 manifestants, dont beaucoup ont dormi devant la clôture, sont assis sur cette route étroite et bordée d'arbres. Des centaines d'autres affluent, souvent munis de sacs de couchage et de vivres.
La police a déclaré qu'aucun incident majeur ne s'était produit pendant la nuit et a qualifié de calme la situation autour de la station balnéaire allemande, où quelque 16 000 policiers ont été déployés.
Environ 160 manifestants avaient été arrêtés mercredi, lors d'affrontements entre quelque 10 000 protestataires et la police. Selon cette dernière, huit policiers avaient été blessés.