L'arrestation depuis vendredi soir de plusieurs des principaux leaders d'une contestation qui vise directement le chef de l'Etat n'a pas fait retomber la fièvre dans une ville préservée en temps normal par les violences djihadistes et intercommunautaires qui endeuillent le nord et le centre du pays.
Samedi, plusieurs quartiers de Bamako ont vu des hommes dresser des barrages, incendier des pneus et se livrer à des saccages, comme celui des locaux du Haut conseil des collectivités.
Résultats invalidés
En dehors du président lui-même, dont la contestation réclame la démission, la Cour constitutionnelle focalise la colère depuis qu'elle a invalidé une trentaine des résultats des élections législatives de mars-avril.
Le renvoi de ses neuf juges figurait parmi les exigences de la coalition hétéroclite, composée de chefs religieux et de personnalités du monde politique et de la société civile, qui orchestre la mobilisation.
Le mouvement de contestation canalise une multitude de mécontentements dans l'un des pays les plus pauvres du monde: mécontentement contre la dégradation sécuritaire et l'incapacité à y faire face après des années de violence, le marasme économique, la défaillance des services de l'Etat, ou encore le discrédit répandu d'institutions suspectes de corruption.
Dissolution de la Cour constitutionnelle
Dans une brève allocution télévisée au ton grave, la quatrième en seulement un mois, le chef de l'Etat, Ibrahim Boubacar Keïta, a indiqué samedi qu'il abrogerait les décrets de nomination des juges de la Cour encore à leur poste, ce qui revient selon ses mots à une "dissolution de fait".
Les nouveaux juges devraient être nommés rapidement, ce qui devrait ouvrir la voie à des législatives partielles dans les circonscriptions dont la Cour constitutionnelle a invalidé les résultats.
Symboles du pouvoir attaqués
Ibrahim Boubacar Keïta, 75 ans, président depuis 2013 et réélu en 2018, a promis que les coupables de violences seraient punis. Mais il a aussi réitéré son offre de dialogue et assuré que le prochain gouvernement, en cours de constitution, serait "consensuel, composé de cadres républicains et patriotes et non de casseurs et de démolisseurs du pays".
Depuis le début de la crise, aucune des ouvertures du président, y compris l'offre d'un gouvernement d'union nationale, n'a apaisé la contestation qui, au contraire, a pris sa tournure la plus violente vendredi, avec des attaques contre des symboles du pouvoir aussi éminents que le Parlement et la télévision nationale et la riposte à balles réelles des forces de sécurité.
afp/gma