Consacrant la division, le président et chef du Fatah Mahmoud
Abbas a chargé le ministre sortant des Finances, Salam Fayyad, un
indépendant qui a les faveurs de l'Occident, de former un nouveau
gouvernement d'urgence après le limogeage du cabinet dominé par le
Hamas, selon un responsable de la présidence, Hikmat Zeid.
Le Hamas a immédiatement jugé cette nomination «contraire à toutes
les lois» et dénoncé un «coup d'Etat contre la légalité», tandis
que le premier ministre limogé, Ismaïl Haniyeh, assurait que le
gouvernement sortant «continuerait à assumer ses fonctions».
Deux gouvernements
Les Palestiniens risquent maintenant de se retrouver avec deux
gouvernements: celui dirigé par le Hamas dans Gaza, et le nouveau
cabinet formé par Mahmoud Abbas en Cisjordanie.
Et la situation n'est pas près de se détendre: le chef du Hamas
Khaled Mechaal a déclaré dans la soirée «respecter» Mahmoud Abbas
et vouloir coopérer avec lui dans l'intérêt national», offre
immédiatement déclinée par un conseiller politique de Mahmoud
Abbas, qui a rejeté «tout dialogue» avec le Hamas.
Inquiétude internationale
La situation dans la bande de Gaza, où les combattants armés et
parfois masqués du Hamas contrôlent les rues et les bâtiments
officiels, suscitait l'inquiétude de la communauté internationale.
Le Quartette international pour le Proche-Orient (Etats-Unis, Union
européenne Russie, ONU) a affirmé son «plein soutien» à Mahmoud
Abbas.
L'UE en particulier, par la voix du porte-parole du ministère
allemand des Affaires étrangères, «soutient énergiquement» la
décision conforme à la Constitution palestinienne de Mahmoud Abbas
de «mettre en place un gouvernement d'état d'urgence pour les
territoires palestiniens».
De leur côté, les Etats-Unis et Israël s'apprêtent à assouplir les
sanctions financières infligées à l'Autorité palestinienne afin
d'aider le gouvernement de crise formé par Mahmoud Abbas.
A Gaza-ville, des milliers de partisans du Hamas se sont
rassemblés devant le Parlement pour célébrer la «victoire»,
brandissant des exemplaires du Coran, des centaines de drapeaux
verts et louant leur mouvement et sa branche armée, les Brigades
Ezzedine al-Qassam. Ses membres paradaient sur des véhicules
blindés pris à la garde présidentielle.
Coupés du monde
Le Hamas a annoncé avant l'aube avoir pris le contrôle de
l'ensemble de la bande de Gaza après s'être emparé de la totalité
des sièges des forces de sécurité fidèles à M.Abbas, qui a dénoncé
en Cisjordanie un coup militaire et limogé le gouvernement d'union.
Il a aussi annoncé des élections anticipées à une date
indéterminée.
La bande de Gaza est coupée du reste du monde, les points de
passage avec Israël et l'Egypte ayant été fermés «jusqu'à nouvel
ordre» par l'armée israélienne.
afp/nr/ant
Locaux du Fatah pillés
Les habitants ont commencé prudemment à sortir après être restés terrés chez eux du 7 au 14 juin pour échapper aux combats. D'une extrême violence, ces derniers ont fait 116 morts et des centaines de blessés.
Des activistes du Hamas ont emporté ordinateurs, documents et armes, d'al-Mountada, le complexe présidentiel abritant les bureaux de Mahmoud Abbas.
Des dizaines de Palestiniens se sont rués sur les villas abandonnées des responsables du Fatah, et ont pillé les quartiers généraux de la sécurité. Des combattants du Hamas assurent en revanche la protection de la villa de M.Abbas et empêchent quiconque de s'en approcher.
Long pourrissement de la situation
Le gouvernement d'union nationale regroupant le Hamas et le Fatah, dirigé par le Premier ministre islamiste Ismaïl Haniyeh, était en place depuis mars après un accord de réconciliation censé mettre fin aux violences.
Depuis l'accession du Hamas au gouvernement en mars 2006 après sa victoire électorale, une lutte meurtrière l'oppose au Fatah, se cristallisant autour des services de sécurité qui comptent des dizaines de milliers d'hommes pour la plupart fidèles au parti de Mahmoud Abbas.
Le Hamas, persuadé que le Fatah se sert de ces services pour l'empêcher de gouverner, affirme que les combats visent à les purger des «putschistes (...) à la solde d'Israël». Les accrochages ont aussi commencé à gagner la Cisjordanie.