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Dominique de Villepin a été mis en examen

L'ancien premier ministre de Villepin à sa sortie du tribunal
L'ancien premier ministre de Villepin à sa sortie du tribunal
L'ex-Premier ministre Dominique de Villepin a été mis en examen vendredi pour «complicité de dénonciation calomnieuse» dans l'affaire Clearstream. Ce vaste scandale politico-financier avait notamment visé Nicolas Sarkozy.

«Je tiens à redire qu'à aucun moment je n'ai demandé d'enquête
sur des personnalités politiques, qu'à aucun moment je n'ai
participé à une quelconque manoeuvre politique», s'est aussitôt
défendu devant la presse l'ancien chef du gouvernement
français.



Un de ses avocats avait auparavant précisé que l'ex-premier
ministre souhaitait prendre connaissance des 27 tomes du dossier
avant de décider ou non de contester la compétence des juges. Les
actes commis par les ministres ne peuvent en effet, en principe,
faire l'objet de procédures que devant la Cour de justice de la
République, une juridiction spéciale.

Faux listings

Dominique de Villepin a été mis en examen, comme on s'y
attendait, pour «complicité de dénonciation calomnieuse, recel de
vol, recel d'abus de confiance et complicité d'usage de
faux».



L'ex-chef du gouvernement a été entendu moins d'une heure par les
juges Jean-Marie d'Huy et Henri Pons chargés de l'enquête sur une
affaire qui a visé, notamment, à l'établissement de faux listings
bancaires impliquant des personnalités politiques.



Dominique de Villepin, qui a quitté ses fonctions à Matignon en
mai, est soupçonné d'avoir participé à une machination politique
mettant en cause Nicolas Sarkozy, son rival à l'époque dans la
course à l'Elysée, dont le nom apparaît sur les listes falsifiées
de comptes.

Se battre pour la vérité

«J'ai agi pour faire face à des menaces internationales, à des
menaces concernant nos intérêts économiques. C'était mon devoir
comme ministre», a affirmé celui qui était à l'époque des faits
ministre des Affaires étrangères puis ministre de l'Intérieur.
Notes du général Rondot Il a ajouté qu'il se battrait pour que «la
vérité puisse enfin apparaître».



«Je répondrai naturellement à l'ensemble des questions qui me
seront posées», a-t-il encore déclaré. Dominique de Villepin avait
déjà été entendu fin décembre en qualité de simple témoin par les
juges. Il s'était alors présenté comme «victime de calomnie et de
mensonge» et avait nié toute malversation.



La découverte de nouvelles notes du général Philippe Rondot, un
des protagonistes de l'affaire, en juin avait relancé les soupçons
sur l'action de l'ex-premier ministre. Selon ces notes, Dominique
de Villepin aurait demandé à l'ancien vice-président d'EADS
Jean-Louis Gergorin d'adresser ces listings à un juge.



Cet élément a été confirmé par Jean-Louis Gergorin, entendu par
les juges la semaine dernière. L'ex-dirigeant d'EADS a précisé que
Dominique de Villepin lui avait dit que l'instruction de parler à
un juge venait du président de l'époque, Jacques Chirac, selon des
extraits de son audition.

Interrogations

Il reste à ce stade deux interrogations essentielles pour
déterminer le degré de responsabilité de Dominique de Villepin:
l'ex-Premier ministre était-il au courant que les listings étaient
trafiqués et, si oui, a-t-il encouragé d'une manière ou d'une autre
l'introduction du nom de Nicolas Sarkozy?



Jacques Chirac, dont le nom apparaît également dans les notes du
général Rondot, a de son côté fait savoir le 22 juin qu'il ne
témoignerait pas devant la justice «sur des faits accomplis ou
connus durant son mandat» (1995-2007), au nom de son immunité
présidentielle. L'ex-premier ministre, placé sous contrôle
judiciaire, a l'interdiction de rencontrer Jacques Chirac et les
principales personnes mises en cause dans ce dossier.



ats/tac

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De Villepin, le "Néron" déchu

Bernadette Chirac, qui ne l'aimait guère, l'avait surnommé Néron. Dominique de Villepin, inculpé vendredi, a eu un seul mot d'ordre en politique: foncer sabre au clair, quitte au final à s'abîmer, rattrapé par sa rivalité avec Nicolas Sarkozy.

Féru d'épopée napoléonienne, Dominique de Villepin, 53 ans, a toujours cru en son destin et conçoit la vie comme un perpétuel combat. «C'est mon meilleur chef de commando», a dit de lui l'ancien président Jacques Chirac.

Secrétaire général de l'Elysée de 1995 à 2002, et à ce titre conseiller privilégié de Chirac, de Villepin est à l'origine de la dissolution de l'Assemblée nationale en 1997. Cette décision vaudra une défaite inattendue à son camp et infligera à Chirac cinq ans de cohabitation avec un Premier ministre socialiste, Lionel Jospin.

De Villepin apparaît en pleine lumière en février 2003 lors d'un discours resté célèbre à l'ONU, où il porte le non de la France à la guerre en Irak.

Ce diplomate de carrière, qui ne s'est jamais confronté au suffrage universel, décroche le ministère l'Intérieur en 2004 et devient Premier ministre un an plus tard.

Une consécration qui vient récompenser ses bons et loyaux services chiraquiens. Ou ses basses oeuvres, disent ses détracteurs: pour son ancien ami, le journaliste et écrivain Franz Olivier Giesbert, devenu férocement anti-Villepin, «cet homme reste avant tout un Mozart de la manipulation, tout miel par devant et sans pitié par derrière».