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Kadhafi en France: gros contrats signés

L'accord d'armement scellé entre Sarkozy et Kadhafi crée des remous
Mouammar Kadhafi et Nicolas Sarkozy en août dernier
Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi a été reçu par Nicolas Sarkozy lundi soir à l'Elysée, alors que cette visite de cinq jours provoque la polémique. Les deux chefs d'Etat ont signé de très gros contrats.

Il s'agit de la première visite
de Mouammar Kadhafi en France depuis 34 ans.

Durant la première rencontre entre les deux chefs d'Etat, la
France et la Libye ont paraphé lundi un accord de coopération pour
le développement des utilisations pacifiques de l'énergie
nucléaire. La Libye a aussi confirmé l'achat de 21 Airbus.

Accord

L'accord sur le nucléaire prévoit notamment la fourniture «d'un
ou plusieurs» réacteurs pour le dessalement de l'eau de mer. La
Libye est le deuxième pays arabe, après l'Algérie, à parapher un
accord de coopération nucléaire avec la France, et cela en moins
d'une semaine.



Selon un document diffusé par l'Elysée, ce texte comporte des
dispositions relatives à l'aide à la formation, à la mise en place
d'un arsenal législatif, réglementaire et administratif, à la
fourniture «d'un ou plusieurs réacteurs pour le dessalement de
l'eau de mer», et au soutien à l'exploration et l'exploitation de
l'uranium.

Washington approuve

Les Etats-Unis ont approuvé l'accord de coopération sur le
nucléaire civil conclu entre la France et la Libye, qui prévoit la
fourniture à terme d'un ou plusieurs réacteurs nucléaires.



"A la lumière de la décision historique prise en 2003 par la Libye
de renoncer à ses programmes d'armes de destruction massives, nous
pensons que toute coopération avec la Libye sur l'usage pacifique,
sûr et responsable de l'énergie nucléaire correspond aux critères
les plus élevés de la non-prolifération", a indiqué un porte-parole
du département d'Etat, Kurtis Cooper.

Achat de 21 Airbus

La Libye va en outre acheter 21 Airbus. Le premier contrat est
la confirmation de l'achat de quatre long-courriers A-350, quatre
long-courriers A-330 et sept mono-couloirs A-320 à destination de
Libyan Airlines. Le montant du contrat n'a pas été immédiatement
annoncé. La Libye a par ailleurs confirmé l'achat de six Airbus
A-350 pour la compagnie libyenne Afriqiyah.



Cette commande ferme confirme une intention d'achat avec Airbus
signée en juin lors du salon aéronautique du Bourget. Outre cette
intention d'achat, Afriqiyah avait alors passé une commande ferme
pour cinq A320. Le montant total (commande ferme et intention)
avait alors été chiffré à un montant catalogue total de 1,6
milliard de dollars.

Droits de l'homme discutés

Le fils du dirigeant libyen, Seif el-Islam Kadhafi, avait fait
état vendredi de l'achat «pour plus de 3 milliards d'euros
d'Airbus» et d'»un réacteur nucléaire», ajoutant que la Libye
voulait aussi acquérir «de nombreux équipements militaires» et
négocier sur l'avion de combat Rafale.



Nicolas Sarkozy a également affirmé avoir «demandé au colonel
Kadhafi de progresser sur le chemin des droits de l'homme», alors
que la visite du dirigeant libyen a suscité un concert de
protestations en France.



«La France reçoit un chef d'Etat qui a renoncé définitivement à la
possession de l'arme nucléaire, qui a décidé de rendre les stocks
sous contrôle des organisations internationales, qui a choisi de
renoncer définitivement au terrorisme et qui a choisi d'indemniser
les victimes», a-t-il dit. Le président français a ajouté qu'il
«recevrait également les associations de victimes» qui ont protesté
contre la venue du colonel Kadhafi.

La voie de la respectabilité

Au sommet UE/Afrique de Lisbonne ce week-end, Nicolas Sarkozy a
assuré au dirigeant libyen être "très heureux" de le recevoir. La
libération des infirmières bulgares détenues en Libye en juillet,
dans laquelle Nicolas Sarkozy a joué un rôle central, a ouvert la
voie à une normalisation des relations entre Paris et
Tripoli.



La France considère désormais que Mouammar Kadhafi, longtemps
placé au ban des nations occidentales, s'est engagé sur le chemin
de la "respectabilité", après avoir notamment renoncé à soutenir le
terrorisme et à développer des armes de destruction massive.

François Fillon critique la polémique

La polémique provoquée en France par la visite à Paris du chef
de l'Etat libyen Mouammar Kadhafi est déplacée, estime le Premier
ministre français François Fillon. «La France reçoit le colonel
Kadhafi parce que le colonel Kadhafi a libéré les infirmières
bulgares et parce que le colonel Kadhafi s'est engagé dans un
processus de réintégration dans la communauté internationale»,
a-t-il expliqué. «Il est légitime que la France entretienne des
relations d'Etat à Etat dans le respect du droit international»,
dit-il dans une interview publiée par «Les Echos» lundi.



L'opposition tire à boulets rouges sur l'accueil réservé à
Mouammar Kadhafi, surtout après ses dernières déclarations à
Lisbonne où il a justifié le recours au terrorisme par les
"faibles". Les critiques se sont étendues jusqu'au sein du
gouvernement.

Bernard Kouchner se dit "résigné"

Le chef de la diplomatie Bernard Kouchner, venu de la gauche, a
pris ses distances. "La visite de Kadhafi est un épiphénomène",
a-t-il estimé lundi. Se disant "résigné à le recevoir" parce
"c'était nécessaire", il n'assistera pas au dîner donné à l'Elysée
en l'honneur du dirigeant libyen, retenu par une importante réunion
à Bruxelles, qu'il a qualifiée d'"heureux hasard".



"La visite de Kadhafi c'est un épiphénomène qui nous permettra, je
l'espère, d'accentuer l'évolution de ce pays qui rejoint la
communauté internationale", a ajouté Bernard Kouchner.

La visite "dérange" Rama Yade

La jeune secrétaire d'Etat aux droits de l'Homme Rama Yade a
elle déclaré que Paris ne devait pas "recevoir le baiser de la
mort" de Kadhafi. Rama Yade a été reçue lundi matin à l'Elysée
après ses déclarations.



"Il serait indécent que cette visite se résume à la signature de
contrats. Que Kadhafi vienne à Paris, d'accord, mais qu'on lui
tienne un discours rigoureux sur la question des droits de l'homme.
C'est absolument indispensable parce que la France n'est pas
seulement une balance commerciale", a-t-elle dit sur RTL. Et de
rajouter: "je me retrouve avec une journée des droits de l'homme
sur les bras et Kadhafi sur le tarmac d'Orly. Pour moi, c'est un
problème".



agences/bri

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Sa tente dans le jardin

Le "Guide" libyen est arrivé en début d'après-midi à Paris, où il a été immédiatement reçu par Nicolas Sarkozy au Palais présidentiel de l'Elysée.

Un dîner sera donné en son honneur dans la soirée. Un second entretien est prévu mercredi.

Durant son séjour, Mouammar Kadhafi résidera à l'hôtel Marigny, près de l'Elysée.

Fidèle à son image, il a planté sa tente de bédouin dans le jardin de cette résidence officielle pour y recevoir ses hôtes.

Presse scandalisée

La visite du dirigeant libyen déchaînait lundi les critiques de la presse française, qui juge "indécente" cette "atteinte à notre crédit international", à l'exception notable du "Figaro" (droite) qui n'y voit "aucune honte".

"Tripoli joue un rôle clé (...) Il n'y a aucune honte à le reconnaître et à défendre nos intérêts avec réalisme", écrit ainsi Pierre Rousselin dans "Le Figaro".

Pour François Sergent dans "Libération" (gauche), "Geôlier pendant neuf ans des infirmières bulgares torturées en prison, Kadhafi est récompensé aujourd'hui d'une longue visite officielle en France". "Rien n'oblige la France à marquer pareil empressement et pareille indignité", conclut-il.

Même écho dans le journal économique "La Tribune", qui constate que "la diplomatie sarkozienne a fait son choix, celui de l'efficacité".

"Bienvenue Monsieur le démocrate...", titre de son côté "France-Soir". Enfin, le journal populaire "Le Parisien", qui qualifie Kadhafi de "tyran du désert", publie un entretien de la secrétaire d'Etat chargée des Affaires étrangères et des Droits de l'homme, Rama Yade, fâchée.