Cette déflagration d'une puissance inouïe, la plus dévastatrice vécue par le Liban, a tué au moins 154 personnes, selon le dernier bilan. Elle alimente la colère de la population, qui avait déclenché en octobre 2019 un vaste mouvement de protestation contre la classe dirigeante.
Jeudi soir, les forces de l'ordre ont même eu recours aux gaz lacrymogènes dans le centre-ville pour disperser des dizaines de manifestants enragé par l'incompétence et la corruption des autorités. Des appels circulent sur les réseaux sociaux pour une manifestation anti-gouvernementale samedi, sous le thème "Pendez-les".
L'indignation est d'autant plus grande que le gouvernement s'est avéré incapable de justifier la présence du nitrate d'ammonium au port "sans mesures de précaution", de l'aveu même du Premier ministre. Selon les autorités, l'explosion a été provoquée par un incendie dans un entrepôt où étaient stockées depuis six ans 2700 tonnes de nitrate d'ammonium, une substance chimique hautement inflammable.
Quatre corps retrouvés
Près de l'épicentre de la déflagration, à proximité des silos géants de céréales détruits, les secouristes français, italiens, allemands et autres coordonnent leurs efforts.
Vendredi matin, quatre corps ont été retrouvés par les secouristes dans le port presque entièrement détruit, mardi, par la déflagration. Elle a fait également plus de 5000 blessés, des dizaines de disparus et des centaines de milliers de sans-abri.
Dans une capitale aux airs d'apocalypse, alors que les autorités n'ont mis en place aucun dispositif pour aider les citoyens, des centaines de Libanais se sont mobilisés, dans un vaste élan de solidarité, pour poursuivre les opérations de déblaiement ou accueil des sans-abri.
Aide internationale
Plusieurs pays parmi lesquels la France ont pour leur part dépêché du matériel médical et sanitaire ainsi que des hôpitaux de campagne. L'Union européenne a débloqué 33 millions d'euros en urgence et l'armée américaine a envoyé trois cargaisons d'eau, de nourriture et de médicaments.
Des aides de l'Iran, des Emirats arabes unis et de l'Arabie saoudite étaient attendues vendredi. Dans l'immense cité sportive de Beyrouth, la Russie a installé un hôpital de campagne, dressant une vingtaine de tentes médicales où les premiers patients ont commencé à arriver, les hôpitaux de la capitale étant saturés.
La Suisse participe à l'effort
L'ambassadrice de Suisse au Liban, Monika Schmutz, a exclu toute aide financière directe de la Suisse au gouvernement libanais. Les besoins de la population sont prioritaires a assuré l'ambassadrice la radio-télévision alémanique SRF.
La crainte demeure que le gouvernement libanais, considéré comme corrompu, n'accapare les aides financières. La Suisse a déjà effectué un versement de 500'000 francs, mais à la Croix-rouge libanaise.
jpr avec les agences
Les donateurs se réuniront dimanche
Les institutions européennes participeront à une conférence des donateurs organisée dimanche par la France pour mobiliser une aide humanitaire d'urgence pour la population de Beyrouth. C'est ce qu'a annoncé vendredi la Commission européenne.
"Nous travaillons sur une estimation des besoins humanitaires et nous avons besoin du maximum d'informations possibles", a expliqué le porte-parole de l'exécutif bruxellois Eric Mamer. "Nous sommes dans une phase d'urgence. Il ne s'agit pas d'une conférence pour la reconstruction. Elle interviendra dans une phase ultérieure", a-t-il insisté.
Les agences de l'ONU ont lancé vendredi un appel urgent à la solidarité internationale, en sus des 9 millions de dollars déjà débloqués sur les fonds humanitaires des Nations unies. L'Organisation mondiale de la santé a demandé 15 millions de dollars, tandis que l'Unicef a dit vouloir recueillir au moins 8,25 millions de dollars.