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Le Premier ministre libanais annonce la démission du gouvernement

Le Premier ministre libanais annonce la démission de son gouvernement après l'explosion meurtrière à Beyrouth
Le Premier ministre libanais annonce la démission de son gouvernement après l'explosion meurtrière à Beyrouth / 19h30 / 1 min. / le 10 août 2020
Le Premier ministre libanais a annoncé lundi soir la démission du gouvernement. Elle intervient après le départ de plusieurs membres de son équipe sous la pression de la rue. Celle-ci rend la classe politique responsable de l'explosion au port de Beyrouth.

A la tête du gouvernement depuis près de sept mois, Hassan Diab s'est adressé à la nation à 19h30 locales (18h30 heure suisse) pour annoncer la démission de son équipe contestée. Durant une réunion du cabinet tenue dans l'après-midi, "la plupart des ministres étaient en faveur d'une démission", selon Vartiné Ohanian, ministre de la Jeunesse et des Sports.

Le chef du gouvernement, qui se présente comme indépendant, a rendu la classe politique traditionnelle responsable de ses échecs, fustigeant la "corruption endémique" ayant conduit à "ce séisme qui a frappé le pays".

"Aujourd'hui, nous répondons à la volonté du peuple qui exige que les responsables de ce désastre dissimulé pendant sept ans rendent des comptes, et à son désir d'un véritable changement", a déclaré Hassan Diab. "Face à cette réalité (...), j'annonce aujourd'hui la démission de ce gouvernement."

>> L'analyse du 19h30 :

L’analyse de Tristan Dessert, journaliste à la RTS.
L’analyse de Tristan Dessert, journaliste à la RTS. / 19h30 / 2 min. / le 10 août 2020

Une démission sans doute insuffisante pour les Libanais

Cette démission ne devrait cependant pas satisfaire le mouvement de protestation populaire, qui réclame le départ de toute la classe politique accusée depuis des mois de corruption et d'incompétence.

Pour rappel, plusieurs membres du gouvernement avaient par ailleurs déjà annoncé leur démission au cours des derniers jours. C'est le cas de la ministre de l'Information Manal Abdel Samad et du ministre de l'Environnement Damianos Kattar. Lundi, c'est la ministre de la Justice, Marie-Claude Najm, qui avait elle aussi annoncé sa démission, tout comme le ministre des Finances Ghazi Wazni.

Accusations de corruption

Près d'une semaine après la déflagration qui a fait au moins 158 mots, 6000 blessés et détruit une partie de la capitale, les autorités accusées de corruption, de négligence et d'incompétence par la rue, n'ont toujours pas répondu à la principale question: pourquoi une énorme quantité de nitrate d'ammonium était entreposée au port, au beau milieu de la ville?

C'est un incendie dans l'entrepôt où était stockées 2750 tonnes de nitrate depuis six ans sans "mesures de précaution" de l'aveu même de Hassan Diab, qui a provoqué l'explosion dévastatrice de mardi. 

Le président Michel Aoun, de plus en plus contesté, a rejeté une enquête internationale. Les autorités n'ont de leur côté pas communiqué sur le déroulement de l'enquête locale.

>> "Sans son port, Beyrouth est démunie": l'analyse de Samir Aïta, président du cercle des économistes arabes, dans l'émission Forum :

Sans son port, Beyrouth est démunie: Samir Aïta, président du cercle des économistes arabes
Sans son port, Beyrouth est démunie: Samir Aïta, président du cercle des économistes arabes / Forum / 7 min. / le 10 août 2020

Mis à genoux

Hassan Diab avait indiqué qu'il était prêt à demeurer dans ses fonctions pendant deux mois, jusqu'à l'organisation d'élections anticipées.

Lors des manifestations qui se sont déroulées ce week-end, réprimées par les forces de sécurité, les protestataires ont appelé à la "vengeance" contre la classe politique totalement discréditée après l'explosion, une catastrophe de plus dans un pays mis à genoux par une crise économique inédite aggravée par l'épidémie de Covid-19.

"Tous veut dire tous", ont clamé ces deux derniers jours les manifestants, appelant au départ de tous les dirigeants. Des photos de nombreux d'entre eux, dont ceux de Michel Aoun et du secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, ont été accrochées à des cordes de pendus lors des rassemblements.

>> Voir aussi le reportage de notre envoyée spéciale Mouna Hussain le week-end dernier à Beyrouth : Beyrouth, reportage au coeur d'une capitale sinistrée et en colère

Beyrouth, reportage au coeur d'une capitale sinistrée et en colère

agences/gma/ther

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Paris appelle à la formation rapide d'un nouveau gouvernement

Le ministre français des Affaires Etrangères Jean-Yves le Drian a appelé lundi le Liban à la "formation rapide d'un gouvernement qui fasse ses preuves auprès de la population", après la démission de l'actuelle équipe au pouvoir, suite à l'explosion dévastatrice au port de Beyrouth.

"La priorité doit aller à la formation rapide d'un gouvernement qui fasse ses preuves auprès de la population et qui ait pour mission de répondre aux principaux défis du pays, en particulier la reconstruction de Beyrouth et les réformes sans lesquelles le pays va vers un effondrement économique, social et politique", a déclaré le ministre dans un communiqué.

Les dirigeants ont été prévenus des risques en juillet

Des responsables de la sécurité libanaise ont prévenu le mois dernier le Premier ministre et le président que 2750 tonnes de nitrate d'ammonium étaient conservées dans le port de Beyrouth et pourraient détruire la capitale en cas d'explosion, selon des documents consultés par Reuters et des sources sécuritaires.

Un rapport de la direction générale de la Sécurité de l'Etat, portant sur les évènements qui ont mené à l'explosion, fait référence à une lettre privée adressée au président libanais Michel Aoun et au Premier ministre Hassan Diab le 20 juillet.

Bien que le contenu de cette lettre n'ai pas été reproduit dans le rapport consulté par Reuters, un responsable de la sécurité a déclaré qu'elle résumait les résultats d'une enquête judiciaire débutée en janvier qui concluait que les produits chimiques devaient être mis en sécurité immédiatement.

Les cabinets du Premier ministre et du président n'ont pas souhaité faire de commentaires sur le courrier du 20 juillet. Le parquet général s'est lui aussi refusé à tout commentaire.