Avec plus de 40% des arrivants originaires de Tunisie, le pays d'Afrique du Nord est devenu le premier pays d'origine des migrants qui ont débarqué en Italie par la mer en 2020. Au total, cela représente 5655 individus sur les 14'288 recensés au 31 juillet par le Haut-commissariat aux réfugiés (HCR).
Au premier trimestre, les Bengladais étaient les plus nombreux à arriver en Italie, suivis par les Ivoiriens, les Soudanais et les Algériens. Pourquoi un tel changement? "Il n'y a pas d'avenir ici, même les pêcheurs et les restaurateurs deviennent des trafiquants à cause de la faim", raconte le surfeur Hamza Elawares au quotidien italien La Repubblica.
De l'autre côté de la Méditerranée, l'Italie apparaît dès lors comme un eldorado pour une population tunisienne lasse de la crise économique et sociale qui secoue le pays, encore aggravée par la pandémie de Covid-19 et le confinement.
En juin, des chômeurs ont marché sur le Parlement pour réclamer une loi qui garantisse des emplois, rappelle le Washington Post. La manifestation s'est terminée par des heurts avec la police.
Inquiétude côté italien
Confrontée à ces arrivées, la ministre italienne de l'Intérieur Luciana Lamorgese s'est rendue en Tunisie fin juillet. Elle a proposé l'aide de son pays pour lutter contre les passeurs et les départs des côtes nord-africaines. Elle a aussi assuré que l'Italie était prête à "investir en Tunisie pour accélérer la reprise économique.
Côté italien, cette immigration d'un nouveau genre pose un certain nombre de problèmes. "Les migrants tunisiens essaient de fuir les centres d'accueil par tous les moyens avant la fin de la quarantaine", a relevé Luciana Lamorgese dans un communiqué. Cette attitude, qui met en danger sanitaire les populations locales, représente aussi une bombe à retardement dans la péninsule où la question de l'immigration reste sensible.
"Maintenant, ça suffit", déclare Giorgia Meloni, la leader de Fratelli d'Italia dans une vidéo partagée sur Facebook. Elle appelle le gouvernement de centre gauche à arrêter les débarquements de migrants sur les côtes italiennes.
Renvois prévus
Les migrants tunisiens arrivant en Italie à bord d'embarcations "seront rapatriés" à partir du 10 août, a averti le ministre italien des Affaires étrangères Luigi Di Maio lors d'un entretien avec l'AFP à Rome jeudi. "Pour nous, la Tunisie est un pays sûr dans lequel on peut investir (...) mais ce n'est pas un pays en guerre ou un lieu de persécutions", a-t-il indiqué, précisant qu'environ 80 renvois sont prévus chaque semaine.
Luigi Di Maio a encore précisé qu'il n'exclut pas de se rendre lui-même en Tunisie prochainement afin de trouver un nouvel accord de collaboration entre les deux pays pour enrayer les départs.
Juliette Galeazzi
En Tunisie, l'économie en chute libre
Une "crise aiguë" menace la Tunisie, a mis en garde le premier ministre désigné Hichem Mechichi, qui a indiqué lundi vouloir former une gouvernement de technocrates, rejetant l'appel du mouvement d'inspiration islamiste Ennahda, la première force au Parlement, pour une équipe politique.
"La responsabilité et le devoir nous obligent aujourd'hui à la formation d'un gouvernement de concrétisation sociale et économique", a indiqué Hichem Mechichi. "Son centre d'intérêt est le citoyen et sa priorité est de lui présenter des solutions urgentes sans qu'il soit soumis à des tiraillements ou à des conflits politiques".
Le produit intérieur brut tunisien est en repli de 6,5%, l'endettement représente 86% du PIB et le taux de chômage pourrait dépasser 19% d'ici à la fin 2020, selon les prévisions actuelles. (afp)