Les gigantesques feux, dont nombre seraient d'origine
criminelle, ont fait au moins 64 morts, sans compter les dégâts
causés à des centaines de propriétés et à l'environnement. Au coût
humain, économique et écologique de ce drame, pourrait venir
s'ajouter un impact d'ordre politique, comme l'illustrent certains
sondages montrant une colère croissante au sein de la population à
quelques semaines des élections générales anticipées.
Mercredi, les opérations demeuraient concentrées sur l'île
d'Eubée, au nord d'Athènes, et sur le Péloponnèse, dans le sud du
pays, où les soldats du feu envoyés par 21 pays soutenaient leurs
collègues grecs dans la lutte contre les flammes. Au moins deux
incendies échappaient à tout contrôle près de la frontière nord
avec l'Albanie, selon les pompiers. Mais tous les feux à Eubée, île
durement touchée, étaient sous contrôle.
Recul général
Dans le Péloponnèse, région la plus touchée, les soldats du feu
ont réussi à contenir les flammes. Pour autant, cinq villages ont
dû être évacués mercredi soir autour de Karytaina, dans le centre
du Péloponnèse à cause d'un foyer ranimé par le vent.
Tous les sinistres importants ont généralement "reculé", a de fait
expliqué le porte-parole des pompiers Nikos Diamandis, faisant état
de températures plus fraîches et de vents moins soutenus. Reste
qu'une reprise des incendies durant les prochains jours représente
un "sérieux danger", et que le dispositif de lutte va être
maintenu.
Si la météo plus clémente a apporté un certain répit sur le front
des incendies, la colère semble en revanche gagner du terrain au
sein de la population: nombre de Grecs reprochent au gouvernement
de Costas Caramanlis sa gestion de la crise, son manque
d'organisation et la lenteur de la riposte face aux flammes
meurtrières.
Toujours la grogne
Plusieurs milliers de personnes, 10'000 selon les médias grecs,
se sont rassemblées mercredi soir sur la place centrale d'Athènes
pour protester contre les carences de l'Etat dans la gestion de la
crise. A Salonique, dans le nord de la Grèce, une manifestation du
même type a rassemblé un millier de personnes, selon un
correspondant de l'AFP sur place.
A l'approche des élections générales du 16 septembre, les
incendies risquent donc fort d'être au coeur de la campagne. Selon
un sondage national effectué les 26 et 27 août auprès d'un
échantillon de 1309 adultes (marge d'erreur d'environ 2,55 points
de pourcentage), la majorité conservatrice sortante a reculé de 1,6
point la semaine dernière mais conserve deux points d'avance devant
le Parti socialiste, avec 35,2% d'avis favorables.
Ce sondage MRB diffusé mardi soir par la chaîne privée Alpha
indique une hausse de popularité pour trois petits partis
d'opposition, suggérant du même coup un rétrécissement de la
majorité des conservateurs, qui détient 164 des 300 sièges dans le
Parlement sortant.
Benoît XVI dénonce les actes criminels
Sur le plan de l'environnement, les services des
sapeurs-pompiers n'ont pas annoncé d'évaluation globale des dégâts,
mais selon des estimations indépendantes, quelque 200'000 hectares
de forêts, d'oliviers et de broussailles sont partis en fumée, soit
la superficie la plus importante depuis le début des relevés
officiels dans les années 1950.
De même, les feux qui ont fait rage durant six jours ont détruit
un fragile écosystème dans des zones montagneuses, et toute une vie
rurale, menaçant de transformer des milliers de villageois en
réfugiés. Au total, 11 personnes ont été accusées d'avoir
délibérément allumé certains des feux.
A Rome, Benoît XVI a condamné les "actes criminels" et le
"comportement irresponsable" des incendiaires. Ils "mettent en
danger la sûreté humaine et détruisent l'environnement", a dénoncé
le pape, en invitant à "prier pour les victimes de ces
tragédies".
ap/ats/sun
Mesures financières exceptionnelles
Des centaines de personnes qui ont perdu maisons, biens et bétail dans les incendies ont afflué dans des banques du sud du pays pour recevoir jusqu'à 13'000 euros d'aide promis immédiatement par le gouvernement.
Il leur était simplement demandé de signer un bon stipulant que les feux avaient endommagé ou détruit leur propriété.
"Le Premier ministre a ordonné l'abolition de toutes les procédures bureaucratiques qui, des années durant, ont été nécessaires pour recevoir de l'aide en cas de catastrophe", a précisé le porte-parole gouvernemental Theodoros Roussopoulos.
Le ministère des Finances a également déclaré qu'il suspendait la TVA (taxe à la valeur ajoutée) dans les zones sinistrées pendant six mois et interdisait la saisie de terres pour non-paiement de dettes.
Bien que le gouvernement ait déjà prévu le déblocage de près d'un tiers d'un milliard d'euros pour l'aide, le coût économique devrait être beaucoup plus élevé, selon le ministère de l'Economie.
Super Pumas suisses toujours en action
Trois Super Pumas de l'armée suisse ont poursuivi mercredi leur lutte contre les incendies en Grèce.
Le Conseil fédéral a dans l'intervalle réglé les modalités de l'aide suisse dans le Péloponnèse, dont les coûts ne sont pas encore connus. Il a donné son feu vert à l'engagement d'au maximum 50 personnes, pour une durée maximale de 20 jours.
Actuellement, une vingtaine de personnes de l'armée suisse sont engagées dans le Péloponnèse, entre les équipages des trois appareils encore sur place et le personnel au sol.
Un quatrième Super Puma, arrivé en Grèce lundi déjà, est retourné mercredi à sa base de stationnement, au Kosovo.
En plus du personnel de l'armée, la Suisse a dépêché cinq spécialistes de l'aide humanitaire. La Direction du développement et de la coopération (DDC) évalue actuellement quelle aide peut encore être apportée dans ce domaine.
Les autorités grecques sont prêtes à prendre en charge les coûts de l'aide internationale si certains pays en font la demande, a indiqué mercredi une porte-parole de la Commission européenne.