Cette enquête a été réalisée auprès de 12'344 adolescents. Pour Laurent Bègue, professeur de psychologie sociale à l'Université de Grenoble Alpes et auteur de cette étude, "7%, cela semble évidemment beaucoup trop. Mais par rapport aux statistiques disponibles qui ont été publiées dans des journaux de criminologie, par exemple une étude genevoise qui indiquait 12%, on est un petit peu en dessous".
Des études américaines arrivent même jusqu'à 25 à 40%, a-t-il expliqué cette semaine dans l'émission CQFD.
Contrôle, préjugé, vengeance
Cette violence intentionnelle a été commise sur des animaux avec lesquels les jeunes étaient en contact. Ces comportements renvoient à différents types de motivations. Une motivation par exemple de contrôle: "L'animal va être blessé ou battu pour qu'il arrête un comportement indésirable, par exemple des aboiements", poursuit Laurent Bègue. La seconde motivation, c'est le châtiment: on va punir un animal pour un comportement qui semble inapproprié, par exemple un animal qui blesse une autre personne ou qui fait ses besoins dans la cuisine.
La troisième motivation renvoie aux préjugés entretenus envers une espèce dont on a une image très négative, comme les serpents, les insectes ou les crapauds. "Peut-être qu'on va davantage commettre des comportements violents envers ces espèces", relève le chercheur. La vengeance peut aussi être une motivation: on va blesser les animaux des autres. "On a un large spectre, qui va de comportements relativement légers à des comportements graves."
Souvent pas de conséquences par la suite
Les actes de maltraitance commis par des jeunes enfants, par exemple sur des insectes, sont souvent commis par curiosité et n'ont pas de conséquences par la suite, explique le scientifique.
"En revanche, chez ceux qui sont par la suite plus engagés dans la maltraitance et la violence, on retrouve très fréquemment des traces de comportements cruels envers les animaux durant leur adolescence ou leur enfance." Raison pour laquelle, parfois, des travailleurs sociaux ou la police sont incités à prendre en compte cette donnée dans l'analyse de la criminalité.
Davantage les garçons
Les statistiques montrent que les garçons sont massivement plus impliqués dans ces maltraitances: entre deux tiers et trois quarts. "C'est un invariant: il n'y a aucune étude connue où les filles soient plus impliquées que les garçons dans les cruautés envers les animaux", précise Laurent Bègue. Et d'ajouter que ce résultat traduit d'ailleurs une donnée universelle selon laquelle les violences envers les personnes ou les animaux sont le plus souvent le fait des garçons et des hommes.
Quant à savoir si les personnes souffrant de psychopathie auraient connu des expériences de violence envers les animaux dès l'enfance, le chercheur français répond qu'il n'existe pas de relation déterministe.
"Si quelqu'un est auteur de violences contre des animaux à 14 ans, on ne sait pas, à cet âge-là, s'il sera auteur de violences contre des êtres humains 20 ou 30 ans plus tard. Par contre, ce que l'on sait, c'est que 90% des auteurs, par exemple, de meurtres en série avec comportement sadique ont été, durant leur jeunesse, impliqués dans des comportements de cruauté envers des animaux. Cela traduit des dispositions psychologiques", analyse Laurent Bègue.
Lien avec d'autres comportements problématiques
Parmi les 7% d'adolescents auteurs de maltraitance envers des animaux, on relève souvent des problèmes relationnels avec leurs parents, des épisodes dépressifs, de l'ébriété ou du harcèlement. "Les comportements cruels envers les animaux participent d'un syndrome général de déviance. La cruauté fait souvent partie d'autres conduites problématiques", conclut l'auteur de l'étude française.
Interview radio: Anne Baecher.
Adapatation web: Jean-Philippe Rutz