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La police russe ouvre une enquête après l'hospitalisation d'Alexeï Navalny

Une personne marche dans les couloirs de l'hôpital berlinois où est soigné l'opposant Alexeï Navalny. [Keystone - Filip Singer]
Une personne marche dans les couloirs de l'hôpital berlinois où est soigné l'opposant Alexeï Navalny. - [Keystone - Filip Singer]
La police russe a annoncé jeudi avoir lancé un premier "examen préliminaire" de l'affaire Alexeï Navalny, victime probable d'un empoisonnement selon ses médecins allemands. Moscou a demandé à l'Allemagne ses données sur la santé de l'opposant.

"La partie allemande a été invitée à fournir aux autorités russes les explications, informations et preuves des diagnostics préliminaires formulés par elles, ainsi que les documents concernant les données médicales et de recherche de spécialistes allemands" a indiqué le Parquet russe jeudi dans un communiqué.

La police des transports russe a lancé "des examens préliminaires liés à l'hospitalisation d'Alexeï Navalny le 20 août à Omsk", a annoncé plus tôt la branche sibérienne du ministère russe de l'Intérieur, ajoutant que les lieux où il était passé ont été inspectés et "plus de 100 objets qui peuvent avoir valeur de preuve" saisis.

"La chambre d'hôtel dans laquelle il résidait" à Tomsk, ville où il aurait été empoisonné selon ses proches, a aussi été examinée et "les données des caméras de vidéo-surveillance analysées", précise ce communiqué.

Coma artificiel

Alexeï Navalny, 44 ans, qui s'est fait un nom en dénonçant la corruption de l'élite russe et dans l'entourage du président Vladimir Poutine, a été admis en réanimation la semaine dernière dans un hôpital d'Omsk, en Sibérie, après avoir fait un malaise dans un avion.

Son entourage a immédiatement dénoncé un empoisonnement et bataillé pour un transfert médicalisé en Allemagne, soupçonnant les médecins russes de s'efforcer de camoufler le crime. Il a finalement été transféré à Berlin, où il est plongé dans un coma artificiel, dans un état grave même si sa vie n'est pas en danger.

"Formulations hâtives"

Les médecins allemands soignant l'opposant ont annoncé lundi qu'il avait été intoxiqué par "une substance du groupe des inhibiteurs de la cholinestérase", mais sans pouvoir préciser laquelle.

Ces produits sont susceptibles d'être utilisés, à faible dose, contre la maladie d'Alzheimer. Mais en fonction du dosage, ils peuvent être très dangereux et produire aussi des agents neurotoxiques puissants, du type de l'agent innervant Novitchok.

Le Kremlin s'est dit mercredi "en désaccord total" avec ces "formulations hâtives": "Comment peut-on parler d'empoisonnement s'il n'y a pas de poison?", a notamment déclaré le porte-parole de Vladimir Poutine, Dmitri Peskov.

afp/gma

>> Lire également l'interview donnée par Alexeï Navalny à la RTS en 2017 : Alexeï Navalny: "Avec des élections libres, je gagnerais contre Poutine"

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Silence radio de Vladimir Poutine

Interviewé par la télévision publique russe jeudi sur une variété de sujets d'actualité, le président Vladimir Poutine n'a pas eu un mot pour son principal opposant, dont il refuse depuis de nombreuses années à prononcer le nom, tout comme son porte-parole.

Podcast: pourquoi empoisonne-t-on encore des opposants politiques en 2020 ?

"Les empoisonnements sont la signature des services secrets russes", souligne le philosophe Michel Eltchaninoff, spécialiste de la culture russe, interrogé dans le Point J.

A ses yeux, "la tentative d’empoisonnement d’Alexeï Navalny n’étonne pas grand monde en Russie (…), parce que cela fait plusieurs années qu’on empoisonne soit des anciens espions, soit des journalistes, soit des personnalités politiques". Il précise d’ailleurs qu’en 1921, l’Union soviétique s’était dotée d’un "laboratoire des poisons".

L’empoisonnement est-il une "spécialité russe"? Vise-t-il toujours à tuer ?

>> Ecouter l’épisode en entier :

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Pourquoi on empoisonne encore en 2020? / Le Point J / 10 min. / le 27 août 2020