Chef de la prison S-21 des Khmers rouges, le tortionnaire Douch est mort

Kaing Guek Eav, alias Douch, "est mort à l'hôpital", a déclaré Neth Pheaktra, porte-parole du tribunal cambodgien parrainé par l'ONU pour juger les principaux responsables khmers rouges. Il était en prison depuis 1999. "Il souffrait d'une maladie pulmonaire depuis plusieurs années", a indiqué une source sous couvert d'anonymat, sans donner davantage de détails.

Né le 17 novembre 1942 dans un village de la province de Kompong Thom, au nord de Phnom Penh, Douch a été professeur de mathématiques avant de rejoindre le régime des Khmers rouges en 1967. Arrivée au pouvoir en 1975, cette dictature ultra-maoïste est tombée le 7 janvier 1979 sous les chenilles des chars du Vietnam socialiste, "frère ennemi". En moins de quatre ans, près de deux millions de personnes furent tuées, soit environ 20% de la population du pays.

15'000 prisonniers torturés et exécutés

Douch, l'un des chefs du Santebal, la police politique du régime, dirigeait la prison de Tuol Sleng ou S-21, principal centre de détention de la capitale Phnom Penh, où environ 15'000 prisonniers ont été exécutés et très souvent torturés.

Après la chute du régime, il a continué d'appartenir au mouvement, puis a travaillé pour des organisations humanitaires. Caché pendant des années, il a été repéré en 1999 par un photographe irlandais, Nic Dunlop, puis arrêté et placé en détention. En 2010, il devient le premier Khmer rouge condamné par un tribunal pour crimes de guerre. Il écope de 30 ans de prison en première instance. Deux ans plus tard, en appel, il est condamné à la prison à perpétuité.

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"Je suis responsable émotionnellement et légalement"

Lors du premier procès, il a longuement expliqué devant les juge le processus au cours duquel les suppliciés étaient emmenés sur un site d'exécution, à quelques kilomètres de la prison qu'il dirigeait. "Méticuleux, consciencieux, attentif à être bien considéré par ses supérieurs" selon les psychiatres, le tortionnaire avait tenu une administration rigoureuse des activités de la prison. L'accusation a décrit son "enthousiasme et sa méticulosité dans chacune de ses tâches", mais aussi sa "fierté" de diriger le centre de torture et "son indifférence à la souffrance" d'autrui.

Converti au christianisme dans les années 1990, il a demandé pardon aux rares survivants et familles des victimes, acceptant d'être condamné à la peine la plus stricte. "Je suis responsable émotionnellement et légalement", avait-il reconnu. Mais l'accusé a ensuite abandonné cette stratégie d'aveux et de coopération avec la justice et réclamé sa libération, se qualifiant de simple secrétaire du régime.

Il restera comme une personnalité profondément ambiguë, capable de coopérer avec la justice et de pleurer d'émotion à l'audience en première instance, avant de faire volte-face et de plaider l'incompétence de la cour.

Aide à la compréhension de l'histoire des Khmers

Invité dans Forum, son ancien avocat François Roux rappelle que "le procès Duch a été le premier procès du tribunal des Khmers rouges. Il ne faut pas enlever toute la coopération de Duch pour faciliter la compréhension de la dramatique histoire des Khmers. D'ailleurs, les juges d'instruction avaient beaucoup insisté dans leur ordonnance de renvoi sur toute la coopération que Duch avait apporté à la justice."

>> Ecouter l'interview dans Forum de son ancien avocat François Roux :

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afp/vic