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Quelque 20'000 manifestants à Rangoon

De nombreux moines qui avaient manifesté ont été arrêtés
Les bonzes ont appelé à la manifestation cette fois-ci
La contestation des moines bouddhistes prend encore de l'ampleur en Birmanie: une nouvelle manifestation contre le régime, la plus importante à ce jour, a réuni dimanche quelque 20'000 personnes dans les rues de Rangoon.

Environ 10'000 moines bouddhistes, soutenus par un nombre au
moins équivalent de civils, ont manifesté contre la junte birmane,
accentuant la pression sur les généraux au pouvoir. Il s'agit du
plus important défilé depuis le début de la protestation contre la
vie chère, déclenché il y a tout juste cinq semaines.



De son côté, la secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a
dénoncé à New York le régime "brutal" au pouvoir et affirmé suivre
de "très près la situation".

Des religieuses aussi présentes

Pour la 6e journée consécutive, les religieux ont marché dans
Rangoon. Ils sont partis sous la pluie de la célèbre pagode
Shwedagon, complexe de temples qui est aussi l'une des principales
attractions touristiques de Birmanie.



Leur nombre a nettement augmenté lorsqu'ils ont atteint, une heure
plus tard, une autre pagode, celle de Sule, dans le centre-ville,
où étaient rassemblés d'autres moines et leurs partisans, selon des
témoins.



Les bonzes, en robe couleur cannelle ou safran, marchaient pour la
plupart pieds nus. Portant des drapeaux religieux et des images de
Bouddha, ils étaient accompagnés pour la première fois par 150
religieuses en robe rose pâle.

Premiers appels des bonzes à manifester

Pour la première fois aussi, des bonzes qui dirigeaient la
manifestation ont appelé explicitement la population à manifester.
"Nous marchons pour le peuple", ont-ils scandé, ajoutant: "Nous
voulons que la population se joigne à nous".



Quelque 200 personnes formaient une chaîne humaine devant des
rangées de moines, en majorité jeunes, qui étaient eux-mêmes suivis
par un grand nombre de civils, ont précisé des témoins. Des badauds
se pressaient sur les trottoirs et applaudissaient, offrant de
l'eau, des fleurs et même du baume pour apaiser les douleurs aux
pieds.

Pour la réconciliation nationale

"Nous voulons la réconciliation nationale, le dialogue avec les
militaires et la liberté pour Aung San Suu Kyi et les autres
prisonniers politiques", a lancé un des leaders de la manifestation
en utilisant un mégaphone. Après chaque slogan, la foule levait les
mains en l'air et criait: "Notre Dieu".



Après la pagode Sule, les manifestants se sont rassemblés sur une
place toute proche où se trouve la municipalité de Rangoon.
Ensuite, la foule s'est scindée en plusieurs groupes, ont indiqué
des témoins, précisant que d'autres moines semblaient manifester
ailleurs dans la ville. Aucun incident n'avait été signalé cinq
heures après le début du premier grand défilé qui s'est
dispersé.

D'autres villes touchées

D'autres manifestations ont été signalées dimanche, notamment à
Magwe et à Mandalay, la deuxième ville de Birmanie, qui compte de
nombreux monastères et centres d'éducation religieuse, selon des
habitants.



Des moines sont désormais à l'avant-garde du mouvement de
protestation déclenché le 19 août par des opposants en Birmanie
(que la junte a décidé d'appeler Myanmar en 1989) après
l'augmentation massive des prix des carburants et des transports en
commun, qui affecte durement la population de ce pays pauvre d'Asie
du Sud-Est.



afp/ap/bri

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Pas d'accès à la résidence de Suu Kyi

Dimanche, un petit groupe composé de 120 bonzes et de 100 civils s'est arrêté à deux mètres d'une barrière érigée par les forces de sécurité qui ont, cette fois, empêché les manifestants d'entrer sur l'avenue de l'Université bordant le lac Inya où Aung San Suu Kyi est maintenue en isolement.

Samedi, les autorités sous pression avaient laissé environ 2000 bonzes et civils passer devant la maison du Prix Nobel de la Paix 1991. La célèbre opposante était alors brièvement sortie en larmes pour saluer respectueusement les moines.

Aung San Suu Kyi et la Birmanie

Prix Nobel de la Paix en 1991, Aung San Suu Kyi est assignée à résidence depuis 2003. Elle l'avait déjà été entre 1989 et 1995.

Elle a toujours prôné la non-violence dans une Birmanie gouvernée par des juntes militaires successives depuis 1962. Le régime du généralissime Than Shwe redoute sa popularité "comme la peste".

Née le 19 juin 1945, elle est la fille d'Aung San, héros de l'indépendance de la Birmanie assassiné en 1947.

Assistante à l'Ecole des études orientales de Londres, elle a épousé en 1972 un Britannique spécialiste du bouddhisme, avec qui elle a eu deux enfants.

Revenue en Birmanie en 1988 au chevet de sa mère, elle a exigé des élections libres avant de fonder la Ligue nationale pour la démocratie (LND).

En 1990, son parti a très largement remporté des élections pluralistes. La junte, sonnée par les résultats, a refusé de s'incliner.

Ses détracteurs lui ont parfois reproché son intransigeance, notamment ses appels aux sanctions internationales et au boycottage du tourisme birman.

Le régime des sanctions, imposé dans les années 1990 par l'UE et les USA, s'était révélé inefficace, des pays comme la Chine, l'Inde et la Thaïlande participant aux efforts intenses visant à exploiter les ressources du pays, notamment gazières.