Le 4 octobre 2019, après 4 jours d'émeutes consécutives, des dizaines de journalistes et photographes filment une manifestation pro-démocratie au cœur de la ville. Parmi eux, Marc Progin, un citoyen suisse résidant à Hong Kong, documente au quotidien la contestation. Ce jour-là, un banquier de Chine continentale est chahuté par une foule de manifestants. Marc Progin photographie la scène. Dans la confusion, le banquier est roué de coups par un jeune manifestant cagoulé.
Sur les réseaux sociaux, des dizaines de milliers de comptes pro-Pékin se lancent dans une chasse à l'homme. L'agresseur n’est pas retrouvé. Marc Progin, l’unique Occidental visible sur la scène, est identifié. Il est pris pour cible sur des vidéos et des montages tronqués qui l’accusent d'avoir créé le désordre et de complicité. Il reçoit par courrier et sur internet des menaces pour lui et sa famille.
Jusqu'à une année de prison
Fin 2019, Marc Progin est arrêté, il passe 12 heures en détention. Son procès va débuter le 9 septembre prochain. Le Suisse risque une année de prison pour incitation au désordre public et complicité dans l'agression d’un citoyen chinois.
"Je n’ai évidemment pas participé à cette attaque, a-t-il expliqué à Mise au Point. Je ne connaissais personne et suis resté moins de 3 minutes sur les lieux. Il est toutefois difficile pour moi de prouver mon innocence ayant été au mauvais endroit au mauvais moment. Aucun témoin de la scène n’a souhaité parler. Tout le monde a peur de la répression chinoise, la situation est vraiment devenue tendue à Hong Kong."
Marc Progin vit dans l’ex-colonie britannique depuis plus de 40 ans. Originaire de Peseux, il y est venu pour le travail. Il n’est jamais reparti et "fait partie des meubles", comme il aime à le dire. Le Suisse avait été suivi par une équipe de Mise au Point lors des manifestations de 2019.
>> Le reportage de Mise au Point de 2019 : Comment Pékin essaie de faire taire la contestation à Hong Kong
"La liberté d'expression est remplacée par l'autocensure"
Ce procès survient dans un contexte de répression du gouvernement chinois contre le mouvement pro-démocratique. Le 30 juin dernier, les autorités de Pékin ont imposé une nouvelle loi sur la sécurité nationale. Celle-ci criminalise le fait d'appeler à l'indépendance ou à une plus grande autonomie de Hong Kong. Plusieurs figures de la contestation ont également été arrêtées. Les élections législatives ont été reportées d'une année.
Pour Marc Progin, "un climat de crainte s'est abattu sur Hong Kong. La liberté d'expression est remplacée par l'autocensure. Tout le monde se tait sous le masque du Covid qui sert de prétexte. Je ne reconnais plus ma ville d’adoption. Comme beaucoup d’expatriés, je réfléchis à quitter le pays après le procès et l’éventuelle condamnation."
François Ruchti/asch
Voir le reportage dans Mise au Point dimanche à 20h10
La police s'en prend aux manifestations contre le report des législatives
Près de 300 personnes ont été arrêtées par la police de Hong Kong dimanche à l'occasion de rassemblements de militants pro-démocratie contre le report des législatives.
Ce scrutin devait se tenir dimanche et permettre de renouveler le Conseil législatif (Legco, le Parlement), l'un des rares qui permet aux Hongkongais de voter.
La cheffe de l'exécutif local, Carrie Lam, nommée par Pékin, avait annoncé le 31 juillet le report d'un an de ces élections, le justifiant par la pandémie de coronavirus. Cette décision a suscité la colère de l'opposition, qui entendait capitaliser dans les urnes le ressentiment anti-gouvernemental.
Des centaines de policiers anti-émeute ont été déployés dimanche dans le quartier de Kowloon afin de contrecarrer les appels à manifester lancés sur internet.