Le tribunal a reconnu Alberto Fujimori coupable "avec
circonstances aggravantes". Il a assimilé ses crimes, "selon le
droit international, à des crimes contre l'humanité".
Il a précisé que l'ancien président âgé de 70 ans, en raison des
deux ans qu'il a déjà passés en prison, devrait exécuter sa
sentence jusqu'au 10 février 2032. Il devra aussi verser des
dommages et intérêts aux familles de 29 victimes.
A.Fujimori, qui était resté impassible pendant les trois heures et
demie d'énoncé du jugement, prenant constamment des notes, a
immédiatement indiqué qu'il ferait appel de la sentence, sans autre
commentaire.
Appel à la manifestation
A l'extérieur de la salle d'audience, où des centaines de
sympathisants fujimoristes s'étaient rassemblés dans la matinée, la
fille de l'ex-président, la populaire députée Keïko, a appelé ces
partisans à "sortir dans les rues" pour manifester contre une
sentence "injuste", et défendre l'héritage de l'ancien chef d'Etat,
qui selon elle "sauva le pays du terrorisme".
Un imposant dispositif de 2000 policiers contrôlait les abords de
la Direction des opérations spéciales de la police à Ate, dans
l'est de Lima, où s'est déroulé depuis fin 2007 le procès de
l'ancien homme fort du pays. Huit mille autres ont été placés en
état d'alerte jusqu'à mercredi. Aucun incident sérieux, hormis des
débuts de bousculade et des face-à-face crispés avec les forces de
l'ordre, n'avait été relevé à la mi-journée.
L'impact politique du jugement reste incertain au Pérou, où
l'ancien chef d'Etat populiste à la poigne de fer a gardé un écho
31% partagent ses idées, selon un sondage récent -, près de 10 ans
après sa chute sur fond de scandales de corruption.
ats/afp/bri
Violation des droits de l'Homme
Ayant dirigé le pays d'une main de fer, Alberto Fujimori avait envoyé dans les années 1990 l'armée combattre la guérilla maoïste, dont le Sentier lumineux, provoquant une longue guerre qui a fait 70'000 morts et disparus, d'après les organisations des droits de l'Homme.
Alberto Fujimori, 70 ans, était jugé pour son rôle dans le massacre en 1991 de 15 habitants d'un quartier à Lima et l'assassinat en 1992 de 9 étudiants et d'un professeur de l'Université de la Cantuta, perpétrées par un "escadron de la mort".
A.Fujimori était aussi jugé pour les séquestrations à la même époque, par ses services secrets, d'un journaliste correspondant du journal espagnol El Païs et d'un entrepreneur.
Le tribunal a reconnu A.Fujimori coupable de toutes les charges, mais n'a pas suivi l'accusation qui avait requis 30 ans de prison.
La défense avait réclamé l'acquittement, tandis que Fujimori assurait n'avoir jamais eu connaissance des opérations incriminées, ni «ordonné la mort de quiconque».
«Jour historique»
«C'est un jour historique», a commenté l'organisation Amnesty International. «Ce n'est pas tous les jours qu'un ancien chef d'Etat est condamné pour des violations des droits de l'Homme comme la torture, la séquestration et la disparition de personnes».
Human Rights Watch a pour sa part salué un jugement «emblématique» qui a «respecté les standards internationaux qui garantissent un procès équitable». Ce procès «a démontré au monde que même les anciens chefs d'Etat ne peuvent réussir à garder leurs crime impunis».
Les organisations ont espéré que le procès Fujimori en appellera d'autres, en Amérique latine et dans le monde.