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La tension monte en Birmanie: quatre morts

En Birmanie, la police a usé de gaz lacrymogènes pour disperser les moines
La police a usé de gaz lacrymogènes pour disperser les moines
La tension s'est accrue mercredi en Birmanie où les manifestations ont été réprimées pour la première fois par les forces de sécurité. Quatre personnes ont été tuées. Le Conseil de sécurité doit se réunir pour évoquer la question birmane.

Au moins trois moines figurent parmi les victimes, selon un
bilan qui n'a pas été confirmé. Un bonze a été tué par un coup de
feu alors qu'il tentait de désarmer un soldat, alors que deux
autres religieux ont été battus à mort, a déclaré un responsable
birman sous couvert de l'anonymat.

Des blessés

De plus, on dénombre une centaine de blessées, dont une
cinquantaine de moines bouddhistes. Au total, environ 100'000
personnes auraient participé pendant six heures à plusieurs
rassemblements et tentatives de défilés qui, cette fois, ont été
réprimés par des soldats et des policiers ayant fait usage de
matraques, de gaz lacrymogène, et eu recours à des tirs de
sommation, selon des témoins.



Selon un premier bilan, au moins 17 bonzes ont été blessés lors
d'une première charge. Des dizaines de personnes ont par ailleurs
été arrêtées, selon des témoins (lire encadré).
Les manifestations à Rangoon se sont dispersées en début de
soirée.

Couvre-feu instauré

La première ville de Birmanie est, depuis la nuit de mardi à
mercredi, placée sous un régime de couvre-feu nocturne et d'accès
restreint, un statut spécial qui ressemble à l'état d'urgence.
Mandalay, la deuxième ville du pays située dans le centre, fait
également l'objet des mêmes mesures.



Une camionnette de police avec à son bord 30 policiers
anti-émeutes se trouvait par ailleurs près de la résidence de
l'opposante Aung San Suu Kyi. On ignore toujours si elle a été
emprisonnée ou non. Mardi, la police indiquait qu'Aung San Suu Kyi
était toujours en résidence surveillée à Rangoon. La police
démentait là des informations selon lesquelles la lauréate du prix
Nobel de la paix aurait été transférée en prison.



agences/hof/boi



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INTERNET A CHANGE LA DONNE DEPUIS 1988

Grâce aux nouvelles technologies de
communication, les manifestations contre la junte birmane sont
visibles du monde entier, contrairement à 1988, où peu
d'informations avaient filtré sur la répression sanglante.



La vague de protestation de ces derniers jours ne manque pas
d'analogies avec le mouvement pro-démocratique de 88, écrasé dans
le sang par les militaires (3000 morts). Comme à l'époque, ce sont
des revendications d'ordre économique qui ont mis le feu aux
poudres.

Isolement impossible

Mais au contraire de 1988, les images et les informations
provenant des téléphones portables, caméras et autres blogs qui
arrivent à éviter la censure permettent de témoigner de la
situation.



"C'est vraiment le résultat de la globalisation. Que la junte le
veuille ou non, le gouvernement ne peut isoler le pays du reste du
monde", a estimé un journaliste birman en exil en Inde.

Internet fonctionne

La junte a pourtant largement réduit les accès à internet. Mais
quelque 200 cafés internet ont continué à fonctionner à Rangoon,
permettant à des étudiants de transmettre des vidéos et des
photographies grâce à des blogs.



"En 1988, nous n'avions aucun moyen pour alerter le monde.
Personne n'avait été mis au courant des premières manifestations",
se souvient un ancien protestataire. La Birmanie est considérée
comme l'un des pays du monde où la presse est le moins libre.

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200 arrestations

La police birmane a par ailleurs arrêté mercredi au moins 200 manifestants.

Dans la nuit de mardi à mercredi, d'autres arrestations avaient été signalées, notamment celles de Zaganar, le plus célèbre des acteurs birmans, et de Win Naing, un homme politique modéré.

Ces deux personnalités avaient été vues ces derniers jours en train d'offrir de la nourriture et de l'eau aux bonzes.

Réunion d'urgence du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni tard mercredi soir à l'initiative notamment du chef de la diplomatie français Bernard Kouchner pour discuter de la Birmanie.

Evoquant les résultats que l'on pouvait attendre de cette réunion qu'il a convoquée, Bernard Kouchner a indiqué que cela pouvait "aboutir à un texte de condamnation, de vigilance, d'appui à la mission des Nations unies" en Birmanie.

Le Premier ministre britannique Gordon Brown avait lui aussi appelé le Conseil de sécurité de l'ONU à tenir une réunion d'urgence sur la crise en Birmanie, prévenant la junte militaire que "le monde entier observe" ce pays.

En attendant, les condamnations se sont multipliées tout au long de la journée. Les Etats-Unis, le G8 et l'Union européenne ont notamment appelé les autorités birmanes à cesser les violences.

La Chine, l'Espagne et de nombreux pays ont également enjoint la junte à la retenue. La France a demandé des sanctions immédiates contre le régime.

Seule la Russie a jugé qu'il s'agissait d'une "affaire interne" au pays, qui ne présentaient "pas de danger pour la paix et la sécurité internationales et
régionales".