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Birmanie: la junte maintient la pression

La junte militaire birmane continue les arrestations
La junte surveille tous les faits et gestes des habitants de Rangoun
La junte militaire birmane a continué mercredi d'interpeller des personnes ayant participé aux manifestations de la semaine dernière. Elle a cependant libéré 80 moines et 149 femmes présumées être des religieuses bouddhistes.

Une semaine après l'écrasement par la force d'un mouvement de
protestation populaire emmené par des moines bouddhistes, des
militaires circulant dans des véhicules équipés de haut-parleur ont
prévenu les habitants de Rangoun que les protestataires étaient
connus et qu'ils seraient bientôt arrêtés.

«Vous devez rester chez vous. Ne sortez pas. Nous avons les
photos des personnes que nous recherchons», ont dit les soldats
dans la plus grande ville de Birmanie.

Employée de l'ONU interpellée

«Je ne peux plus dormir chez moi la nuit. Je me cache ailleurs
et je change d'endroit», a expliqué un des manifestants, menacé
d'être interpellé comme l'ont été des centaines voire des milliers
d'autres, à la faveur du couvre-feu en vigueur.



La junte a ainsi interpellé mercredi une employée locale des
Nations unies. La femme de 38 ans, son mari et deux membres de leur
famille ont été emmenés par les forces de sécurité, a précisé le
représentant de l'ONU en Birmanie, Charles Petrie.

Agressions verbales

La junte a parallèlement libéré 149 religieuses. Un proche de
ces dernières a précisé que les détenus interrogés avaient été
classés en quatre catégories: ceux qui passaient par là, ceux qui
regardaient, ceux qui applaudissaient et ceux qui s'étaient joints
aux manifestations.



Un jeune moine âgé d'une vingtaine d'années, visiblement nerveux
et souhaitant garder l'anonymat, a déclaré pour sa part avoir été
libéré et reconduit avec 79 autres religieux aux premières heures
de la journée au monastère de Mingala Yama. Selon lui, les seize
autres moines arrêtés dans ce monastère de Rangoun doivent être
libérés sous peu.



Il a précisé qu'ils avaient été interrogés «jour et nuit» à
l'ancien Institut technologique public d'Insein, dans le nord de la
capitale, non loin de la sinistre prison du même nom. Il a assuré
qu'ils avaient été agressés verbalement mais pas physiquement
maltraités.

Nombreux bonzes portés manquants

Les habitants vivant à proximité de la quinzaine de monastères
où ont eu lieu ces rafles, témoignent avoir vu les forces de
sécurité frapper et battre les moines pour les entasser dans des
camions. Selon les moines, six des leurs ont été tués lors de ces
descentes ou d'échauffourées avec les forces de sécurité.



Le site internet de la Voix démocratique de Birmanie a diffusé une
photo d'un moine gisant dans un fossé. Des Birmans continuaient
d'affirmer que de nombreux bonzes étaient portés manquants. Selon
un bilan officiel, la violente répression des manifestations a fait
13 morts, nettement plus selon des diplomates.



ats/afp/ant

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L'UE veut renforcer ses sanctions

La réponse des pays occidentaux à la violente répression de la junte s'organise. Les 27 pays européens sont tombés d'accord mercredi à Bruxelles sur le principe d'un renforcement des sanctions contre la Birmanie.

De retour à New York, l'envoyé spécial des Nations unies Ibrahim Gambari doit informer jeudi le secrétaire général Ban Ki-moon des résultats de sa mission de quatre jours en Birmanie.

En Birmanie, le diplomate nigérian a effectué une navette diplomatique entre la junte et l'opposante et prix Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi, assignée à résidence depuis 2003.

Seuls les Chinois peuvent faire pression

Soumis à un régime totalitaire par la junte militaire, la Birmanie est l'un des pays les plus isolés du monde avec la Corée du Nord. Seuls les Chinois ont des moyens de pression, affirme un connaisseur du pays, Jean-Claude Bührer, auteur avec Claude Levenson de «Aung San Suu Kyi, demain la Birmanie».

«Il ne faut pas se faire d'illusions sur les protestations internationales», affirme Jean-Claude Bührer. Selon lui, les militaires s'en moquent. «Ils ont l'habitude de vivre en autarcie. Même des sanctions économiques renforcées n'auraient pas d'effet».

La Birmanie fait 80% de son commerce avec les pays voisins, dont 50% avec Pékin. La Chine exploite les ressources naturelles birmanes dont elle a un urgent besoin, gaz, pétrole, bois.

«Les autorités de Pékin prêchent la modération. Elles ne veulent pas de bain de sang qui les éclabousserait au moment des Jeux olympiques. Mais si l'ordre est rétabli, si les dégâts sont limités, elles n'iront pas jusqu'à demander aux militaires de céder la place».