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Décès de la doyenne de la Cour suprême américaine Ruth Bader Ginsburg

La juge progressiste de la cour suprême Ruth Bader Ginsburg est morte
La juge progressiste de la cour suprême Ruth Bader Ginsburg est morte / 19h30 / 2 min. / le 19 septembre 2020
Juge à la Cour suprême des Etats-Unis, Ruth Bader Ginsburg est décédée vendredi à 87 ans. Le décès de cette figure progressiste nommée par le président démocrate Bill Clinton ouvre la voie à une intense bataille politique. Donald Trump une nomination "sans délai".

Devenue une véritable icône à gauche, Ruth Bader Ginsburg est morte des suites d'un cancer du pancréas, entourée par sa famille, a annoncé la plus haute juridiction des Etats-Unis dans un communiqué.

Fragile depuis quelques années, cette championne de la cause des femmes, des minorités ou encore de l'environnement avait été hospitalisée à deux reprises cet été et sa santé était suivie de près par les démocrates qui craignent que le président Donald Trump s'empresse de nommer son successeur.

Trump veut une nomination "sans délai"

Donald Trump a affirmé samedi qu'il était dans "l'obligation" de nommer un nouveau juge à la Cour suprême "sans délai" au lendemain de la mort de sa doyenne Ruth Bader Ginsburg.

Nommer les magistrats du temple du Droit est "la décision la plus importante" pour laquelle un président est élu, a-t-il justifié dans un tweet.

Soucieux de galvaniser les électeurs de la droite religieuse, Donald Trump a déjà publié une liste de juges conservateurs, pour la plupart opposés à l'avortement et favorables au port d'armes, dans laquelle il piochera pour choisir le prochain sage de la Cour suprême.

Selon la Constitution, il reviendrait alors au Sénat d'avaliser le choix du président. Compte tenu de la majorité républicaine à la chambre haute, il est très possible, sauf défection d'élus modérés, que son candidat entre au sein du temple du Droit. Cela cimenterait la majorité conservatrice de la haute juridiction, qui a le dernier mot sur les sujets qui divisent le plus la société américaine: avortement, droit des minorités, port d'armes, peine de mort...

Le chef républicain du Sénat a déclaré qu'il organiserait un vote à la chambre haute du Congrès si Donald Trump nommait avant l'élection du 3 novembre un successeur à Ruth Bader Ginsburg.

>> Voir les explications de Gaspard Kuhn dans le 19h30 :

Gaspard Kuhn: "La nomination à la Cour suprême est une des décisions les plus importantes que puisse prendre un président".
Gaspard Kuhn: "La nomination à la Cour suprême est une des décisions les plus importantes que puisse prendre un président". / 19h30 / 1 min. / le 19 septembre 2020

"Le peuple doit avoir son mot"

L'inquiétude s'est rapidement exprimée dans l'opposition. Quelques instants à peine après l'annonce de son décès, le chef des démocrates au Sénat Chuck Schumer a salué une "géante de l'Histoire américaine" mais demandé à ne pas précipiter le choix de son successeur.

"Le peuple américain doit avoir son mot dans la sélection du prochain juge de la Cour Suprême. Son poste ne doit pas être attribué tant que nous n'avons pas un nouveau président", a-t-il tweeté.

Selon la radio NPR, elle avait elle-même confié ses dernières volontés à sa petite-fille, Clara Spera. "Mon voeu le plus cher est de ne pas être remplacée tant qu'un nouveau président n'aura pas prêté serment", lui a-t-elle dicté quelques jours avant sa mort.

>> Ecouter l'analyse d’Anne Deysine, spécialiste des questions politiques et juridiques aux Etats-Unis, dans Forum :

Le bâtiment de la Cour suprême américaine à Washington. [EPA/Keystone - Michael Reynolds]EPA/Keystone - Michael Reynolds
Le poids de la Cour suprême aux Etats-Unis: interview d’Anne Deysine / Forum / 7 min. / le 19 septembre 2020

Les juges conservateurs ne font pas bloc

Aujourd'hui, les cinq juges conservateurs - sur neuf - ne font en effet pas bloc, et il est fréquent que l'un d'entre eux vote avec ses confrères progressistes. A l'inverse, le quatuor progressiste, dont la juge surnommée "RBG" était la figure la plus connue, vote souvent de concert pour défendre le droit des femmes à avorter, des homosexuels à se marier ou des immigrés.

Nommée en 1993 à la haute cour par le président Bill Clinton, Ruth Bader Ginsburg était devenue extrêmement populaire malgré le sérieux de sa fonction. Grâce à son positionnement en phase avec les aspirations des plus jeunes, elle les avait conquis, au point de gagner le surnom de "Notorious RBG" en référence au rappeur Notorious BIG.

Hommage immédiat

Malgré son positionnement à gauche, républicains et démocrates lui ont immédiatement rendu hommage. "La juge Ginsburg a ouvert la voie à tant de femmes, moi compris. Il n'y aura jamais personne comme elle. Merci RBG", a tweeté l'ancienne candidate à la présidentielle Hillary Clinton.

Elle "était une pionnière, passionnée par ses causes, elle a servi avec honneur et distinction la Cour suprême", a renchéri le sénateur républicain Lindsey Graham, un proche du président.

afp/jpr

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Trump et Biden saluent la mémoire de Ruth Bader Ginsburg

Donald Trump a salué la "vie exceptionnelle" de Ruth Bader Ginsburg, après avoir appris son décès à l'issue d'un déplacement de campagne dans le Minnesota. Il l'a qualifiée de "colosse du Droit".

Le président républicain a salué dans un communiqué un "esprit brillant" dont les décisions, notamment sur les droits des femmes, "ont enthousiasmé tous les Américains". "Combattante jusqu'au bout", cette magistrate progressiste "a prouvé qu'on peut être en désaccord sans être désagréable", a-t-il ajouté.

Son rival démocrate, Joe Biden, a lui aussi rendu un hommage appuyé à la magistrate la plus connue des Etats-Unis. "Ruth Bader Ginsburg s'est battue pour nous tous, et elle était très aimée", a-t-il souligné.  Elle était "une héroïne américaine" et "une voix infatigable dans la quête de l'idéal américain suprême : l'égalité de tous devant la loi".

Il a appelé à ne pas se précipiter pour la remplacer. "Les électeurs doivent choisir le président, et le président doit proposer un juge au Sénat".

Une révolutionnaire en habits de cour

Une révolutionnaire en habits de cour, une juge érudite devenue icône de la gauche, frêle et pourtant endurante: la doyenne de la Cour suprême des Etats-Unis, Ruth Bader Ginsburg, qui s'est éteinte vendredi, était un paradoxe à bien des égards.

Championne d'abord de la cause des femmes, cette brillante juriste a, au cours de ses 27 ans au sein du temple du droit américain, épousé d'autres causes progressistes, comme la défense des homosexuels ou des migrants.

Fière de son indépendance, elle n'hésitait pas à rompre avec la majorité de ses collègues. "I dissent" (je ne suis pas d'accord), avait-elle écrit en omettant la formule consacrée "respectueusement", quand, lors de la présidentielle contestée de 2000, ses pairs avaient majoritairement tranché en faveur de George Bush.

La phrase, classique dans le jargon juridique, lui est restée accolée dans la culture populaire. Au point que des t-shirts, des pin's ou des tasses à son effigie la reproduisent.

Sa vie a inspiré des films, des documentaires et même des livres pour enfants. Sa petite silhouette frêle, et son visage mince barré de grandes lunettes étaient connus de tous les Américains. Dans les magasins de souvenirs de la capitale fédérale, les T-shirts ou les tasses à son effigie s'arrachent depuis l'annonce de sa mort.