Le président Sarkozy a affirmé mardi matin qu'il irait "chercher
tous ceux qui restent, quoi qu'ils aient fait" au Tchad, où sont
encore détenus notamment six bénévoles français de l'association
L'Arche de Zoé, accusés d'avoir voulu emmener en France 103
enfants.
"Ce n'est pas le président Sarkozy qui décidera", a
immédiatement réagi le ministre tchadien de la Justice, jugeant sa
déclaration "inopportune". Le président tchadien Idriss Déby Itno a
enfoncé le clou en fin de journée: "Il ne me semble pas nécessaire
que ces membres de l'ONG soient expatriés ailleurs pour faire la
justice. La justice se fera ici au Tchad", a-t-il affirmé.
N'Djamena reste ferme
"Il n'est pas question pour le moment que les juridictions
tchadiennes se dessaisissent du dossier. Au contraire, les
juridictions tchadiennes vont aller jusqu'au fond", a ajouté le
chef d'Etat africain, soulignant que son opinion nationale était
"très sensible à cette question". "Il ne s'agit pas de se mettre
d'accord ou de ne pas se mettre d'accord. Il s'agit simplement de
respecter la souveraineté d'un Etat, la justice d'un Etat", a-t-il
insisté.
Dans une "mise au point" aux déclarations du président français,
l'avocat de l'Etat tchadien a jugé "impossible qu'il y ait une
extradition quand on lit la convention (judiciaire de 1976) qui lie
le Tchad à la France". "Un des articles de la convention, indique
que l'extradition est refusée quand une infraction est commise en
tout ou en partie sur le territoire de l'Etat requis, en l'espèce
le Tchad ", a-t-il expliqué.
Un insulte au Tchad
Mardi matin, dans une interview à un quotidien français, le
ministre tchadien de l'Intérieur Ahmat Mahamat Bachir avait estimé
qu'"un procès en France constituerait une insulte pour le peuple
tchadien". "Quand nos délinquants se font arrêter chez vous, ils ne
sont pas amenés ici", avait-il ajouté. "Les faits ont été commis au
Tchad. C'est pourquoi ces bandits doivent être jugés et condamnés
ici".
Le ministre de l'Intérieur tchadien a en plus estimé mardi qu'ils
devraient "également purger leur peine dans une prison tchadienne"
avant d'être expulsés, bien qu'un article de la convention
judiciaire prévoit que les éventuels condamnés puissent être
emprisonnés en France.
agences/boi
Chronologie des faits
25 octobre: 6 Français de l'association l'Arche de Zoé sont arrêtés au Tchad, alors qu'ils s'apprêtaient à emmener vers la France, où les attendaient des familles d'accueil, 103 enfants de 1 à 10 ans présentés comme des "orphelins du Darfour". Trois journalistes français et sept membres d'équipage d'un avion espagnole sont également arrêtés.
26 octobre: N'Djamena accuse l'Arche de Zoé de "trafic d'enfants", ce que dément l'association.
28 octobre: Nicolas Sarkozy, qui s'est entretenu avec le président tchadien Idriss Déby, condamne l'opération de l'ONG qu'il qualifie d'"illégale et inacceptable". Un pilote belge est arrêté.
31 octobre: Nicolas Sarkozy appelle Idriss Déby au respect de la présomption d'innocence. Il demande la libération des trois journalistes français, inculpés par la justice tchadienne d'"enlèvements de mineurs" et "escroquerie" comme les membres de l'Arche de Zoé. Les sept membres d'équipage de l'avion espagnol sont eux poursuivis pour "complicité", à l'instar du pilote belge et de deux Tchadiens.
1er novembre: le CICR et le HCR annoncent que 91 des enfants avaient au moins une personne adulte qu'ils considèrent comme un parent.
4 novembre: Nicolas Sarkozy ramène du Tchad les trois journalistes français et quatre hôtesses de l'air espagnoles, remis en liberté quelques heures auparavant mais toujours inculpés