Trois jours après la remise, par la troïka des médiateurs
internationaux (Europe, Etats-Unis, Russie), d'un rapport à l'ONU
constatant l'échec de quatre mois de pourparlers, les Kosovars
albanais ont annoncé qu'ils allaient entamer sans tarder des
consultations avec leurs soutiens occidentaux pour leur demander
officiellement de reconnaître leur proclamation d'indépendance.
Urgence
Celle-ci, selon un porte-parole des négociateurs de la majorité
albanophone, «surviendra bien avant le mois de mai», l'idée
généralement admise étant qu'elle pourrait avoir lieu à partir de
la fin janvier.
«Le Kosovo a un besoin urgent de clarté sur son avenir», a déclaré
Skender Hyseni, porte-parole des négociateurs kosovars. Les
Etats-Unis et la plupart des pays de l'Union européenne (UE)
devraient soutenir l'indépendance du territoire. La Serbie et son
alliée russe s'opposent elles farouchement à l'indépendance du
Kosovo et réclament la poursuite des négociations.
Belgrade, qui a proposé une large autonomie à la province, insiste
pour que l'indépendance soit reconnue au préalable par le Conseil
de sécurité de l'ONU, où Moscou dispose d'un droit de veto.
La CIJ saisie?
La Serbie a également annoncé lundi soir qu'elle allait proposer
au Conseil de sécurité de saisir la Cour internationale de justice
(CIJ) de La Haye afin qu'elle statue sur la légitimité d'une
proclamation de l'indépendance du Kosovo.
Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a estimé que toute
proclamation unilatérale risquait de provoquer une «réaction en
chaîne» dans les Balkans et «d'autres régions du monde». Il
s'exprimait lors d'une visite à Chypre, seul pays membre de l'UE
ouvertement hostile à une indépendance sans l'aval de l'ONU.
"Cohésion de l'UE"
Les ministres des Affaires étrangères de l'UE se sont eux
engagés à faire preuve de cohésion sur le dossier. Le ministre
suédois des Affaires étrangères Carl Bildt a estimé que 26 des 27
Etats membres de l'UE étaient prêts à accepter une proclamation de
l'indépendance du Kosovo sans une résolution du Conseil de
sécurité.
Le Conseil de sécurité débattra du sort de la province le 19
décembre, mais Moscou a déjà prévenu que la Russie lancerait un
appel en faveur d'un nouveau cycle de négociations, ce qu'Etats
occidentaux et musulmans jugent inutile. «Si la Russie ne change
pas d'avis, l'idée est de modifier le statut du Kosovo sur la base
des résolutions existantes du Conseil de sécurité», a indiqué un
diplomate occidental.
La résolution-clé a été votée en 1999. Elle avait fixé le cadre de
l'intervention de la communauté internationale après 78 jours de
bombardements de l'Otan sur la Serbie.
Selon les Etats-Unis et l'UE, rien dans cette résolution 1244 ne
fait obstacle à l'indépendance de la province. Ce scénario
respecterait les grandes lignes du plan proposé par l'émissaire de
l'ONU Marrti Ahtisaari. L'UE assumerait les missions de police et
de justice à la place de l'ONU et nommerait un représentant avec un
rôle de superviseur.
agences/cer
La Kfor reste en place
L'UE aborde cette période délicate avec une certaine confiance, aucune des deux communautés n'ayant menacé de recourir à la violence, même si les Serbes ont évoqué la possibilité d'un blocus économique du Kosovo.
Mais les Européens, en coordination avec l'Otan, ont pris les devants au cas où la situation viendrait à dégénérer.
L'Otan a annoncé qu'elle maintiendrait les 16'000 hommes de sa force au Kosovo (Kfor).
Depuis juin 1999, le Kosovo est administré par l'ONU, appuyée par la Kfor.
De son côté, la République de Chypre redoute qu'une déclaration d'indépendance du Kosovo, géré depuis 1999 par l'ONU, ne soit utilisée comme un précédent par la République turque de Chypre du Nord (RTCN), reconnue uniquement par Ankara.
La Russie prévient
Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov a averti lundi qu'une déclaration d'indépendance unilatérale du Kosovo constituerait une violation de la loi internationale.
"Cela déclenchera une réaction en chaîne dans les Balkans et dans d'autres régions du monde. Et ceux qui travaillent à ce genre de projet, doivent réfléchir très attentivement aux conséquences", a-t-il ajouté.