Chantal Sébire, 52 ans, souffre d'une «esthesioneuroblastome»,
une tumeur évolutive des sinus et de la cavité nasale. Cette
maladie très rare - 200 cas recensés dans le monde en 20 ans - est
incurable et provoque une déformation irréversible du visage et des
souffrances atroces.
Deux semaines après avoir lancé un appel au secours dans les
médias pour «qu'on l'accompagne dignement dans la mort», Chantal
Sébire a saisi la justice d'une «demande exceptionnelle»
d'euthanasie. Le président du tribunal de grande instance de Dijon
doit se prononcer lundi.
Sarkozy touché, mais inflexible
Je suis allée au
bout de ce que je peux supporter.
On est là «aux
limites de ce que la société peut dire, de ce que la loi peut
faire», a estimé jeudi le Premier ministre François Fillon,
estimant difficile de répondre à une telle demande.
La ministre de la Justice, Rachida Dati, s'est montrée plus
péremptoire: «Je considère que la médecine n'est pas là pour
administrer des substances létales», a-elle déclaré sur France
Inter. «Ce n'est pas notre droit et nous avons fondé notre droit et
la convention européenne des droits de l'Homme sur le droit à la
vie», a-t-elle ajouté.
Quant au président Nicolas Sarkozy, «très touché» selon son
porte-parole David Martinon par une lettre que lui a adressée
Chantal Sébire, il lui a proposé «qu'un nouvel avis soit donné sur
son cas par un collège de professionnels de la santé du plus haut
niveau pour que l'on s'assure ensemble que toutes les ressources de
la médecine sont épuisées».
«Pour le moment, nous restons dans le cadre de la loi Leonetti»,
a déclaré jeudi David Martinon. Cette loi adoptée en avril 2005
permet d'arrêter des traitements et d'administrer massivement des
médicaments anti-douleur même s'ils présentent un risque vital,
mais pas de mettre fin à la vie de patients.
«Nous jugeons que la loi Leonetti est une bonne loi, une loi
d'équilibre qui doit être expliquée mais une bonne loi», a déclaré
le porte-parole du président de la République.
Deux pays européens, la Belgique et les Pays-Bas, ont légalisé
l'euthanasie active dans un cadre très rigoureux. La Suisse
autorise elle l'assistance au suicide (lire
ci-contre).
ats/afp/ant
Débat relancé
L'affaire relance un débat ancien qui fut vif en 2003 avec la mort provoquée médicalement de Vincent Humbert, un jeune homme totalement paralysé, muet et aveugle après un accident.
«Aujourd'hui, je suis allée au bout de ce que je peux supporter et mon fils et mes filles n'en peuvent plus de me voir souffrir», avait pour sa part témoigné Chantal Sébire le 27 février lors d'un entretien avec l'AFP.
L'euthanasie: différentes législations
On parle d'euthanasie passive lorsqu'un soignant arrête ou renonce à un traitement qui pourrait prolonger son existence, mais sans le guérir. Cette forme d'euthanasie n'est pas punissable en Suisse, et la France l'admet depuis 2005.
Egalement tolérée dans les deux pays, l'euthanasie active indirecte découle de l'utilisation d'un traitement pour combattre la douleur, comme la morphine, susceptible d'abréger la vie du malade.
L'euthanasie active directe - c'est-à-dire quand une personne prend une mesure provoquant la mort immédiate d'un malade incurable, par exemple l'injection d'un cocktail létal - est interdite dans les deux pays.
Par contre, la Suisse autorise l'assistance au suicide pour autant qu'elle ne soit pas motivée par un mobile égoïste (art. 115 du Code pénal). Dans ce cas, c'est la personne désireuse d'abréger ses souffrances qui fait elle-même le geste ultime qui provoquera sa mort. (source: Le Temps)
La Belgique et les Pays-Bas ont légalisé l'euthanasie active dans un cadre très rigoureux.