Le parent et le militant Abdelhakim Sefrioui avaient "nommément désigné le professeur comme cible sur les réseaux sociaux", a souligné le procureur de la République antiterroriste Jean-François Ricard lors d'une conférence de presse à Paris.
Le premier avait posté plusieurs vidéos dans lesquelles il "tenait des propos menaçants" à l'égard de l'enseignant au sujet d'un cours sur la liberté d'expression et avait été en contact par messages avec l'assaillant. Le second, bien connu des services depuis de nombreuses années, l'avait accompagné dans sa mobilisation. Tous deux ont été mis en examen mercredi soir pour "complicité d'assassinat terroriste".
Deux amis de l'auteur des faits, l'un soupçonné de l'avoir convoyé et l'autre de l'avoir accompagné lors de l'achat de son arme, sont aussi mis en examen pour le même chef. Un dernier homme, proche lui aussi, est poursuivi pour "association de malfaiteurs terroriste en vue de commettre des crimes d'atteintes aux personnes".
Les deux collégiens aussi poursuivis
Parmi les sept personnes déférées devant la justice se trouvent également deux collégiens de 14 et 15 ans, soupçonnés d'avoir désigné l'enseignant à l'assaillant en échange d'une somme d'argent de 300 à 350 euros. Ils ont également été mis en examen mercredi soir pour "complicité d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste" et placés sous contrôle judiciaire, selon une source judiciaire contactée par l'AFP.
Tous les adultes ont été placés en détention provisoire, sauf le parent d'élève qui a toutefois été incarcéré dans l'attente d'un débat sur cette question.
"Contexte d'appels aux meurtres"
Selon le procureur, cet assassinat s'inscrit dans un "contexte d'appels aux meurtres" lancés depuis la republication des caricatures de Mahomet par Charlie Hebdo début septembre avant l'ouverture du procès des attentats de janvier 2015 à Paris.
Jean-François Ricard a notamment évoqué l'attaque au hachoir perpétrée le 25 septembre devant les anciens locaux de Charlie Hebdo et "trois communications" d'Al-Qaïda et de sa branche yéménite qui appelaient au "meurtre" de ceux qui avaient été à l'origine de la rediffusion de ces dessins.
>> Lire : L'identité et le parcours de l'auteur de l'attaque au hachoir de Paris sous la loupe
Message audio en russe
Selon des sources proches du dossier relayées par l'AFP, l'auteur des faits a envoyé un message audio en russe sur les réseaux sociaux après avoir posté la photo de sa victime.
Dans ce message authentifié par la source et dont l'AFP a eu connaissance, le jeune homme de 18 ans dit, dans un russe hésitant, qu'il a "vengé le prophète", en reprochant au professeur d'histoire-géographie de l'avoir "montré de manière insultante".
L'assaillant est essoufflé dans ce message ponctué d'épithètes coraniques. "Frères, priez pour qu'Allah m'accepte en martyr", dit-il selon une traduction de l'AFP.
Peu après son acte, à deux cents mètres du corps de sa victime, il avait été tué par balles par des policiers appelés en intervention.
afp/oang
Hommage national rendu à la Sorbonne
Un hommage national présidé par Emmanuel Macron a été rendu au professeur mercredi soir dans la cour de la célèbre université parisienne de la Sorbonne, lieu symbolique de l'enseignement. 400 invités, dont une centaine d'élèves de région parisienne, étaient présents.
Dans un bref discours, le chef de l'Etat a dénoncé "les lâches" qui l'ont livré "aux barbares" (...) "Je ne parlerai pas du cortège des terroristes, de leurs complices et de tous les lâches qui ont commis et rendu possible cet attentat", a-t-il lancé devant la famille du défunt et une large partie de la classe politique.
Samuel Paty était "de ces professeurs que l'on n'oublie pas", a encore souligné Emmanuel Macron qui avait remis auparavant la Légion d'honneur à titre posthume à l'enseignant.
Collectif propalestinien dissous
Le conseil des ministres français a prononcé mercredi, comme annoncé, la dissolution du collectif pro-palestinien Cheikh Yassine, "impliqué" dans l'assassinat de l'enseignant.
Ce groupe - du nom du fondateur du mouvement islamiste palestinien Hamas tué par l'armée israélienne en 2004 - avait été créé par Abdelhakim Sefrioui, militant islamiste radical en garde à vue dans l'enquête sur l'attentat de vendredi.
Cette mesure s'ajoute à la fermeture prévue mercredi soir de la mosquée de Pantin, en banlieue nord de Paris, pour avoir notamment relayé une vidéo dénonçant le cours de Samuel Paty, ainsi qu'aux "expulsions des personnes radicalisées en situation irrégulière".
Une cinquantaine d'autres associations françaises jugées proches de "l'islamisme radical" pourraient également être fermées.