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Kenya: la situation reste toujours tendue

Certains corps, non recensés, sont toujours dans les campagnes
De nombreuses personnes ont été tuées par balles à Kisumu
Une centaine de personnes ont à nouveau été tuées dans la nuit de lundi à mardi, portant à 300 le nombre de victimes depuis les élections présidentielles du 27 décembre. De nouvelles émeutes ont éclaté dans tout le pays.

Entre 15 et 30 personnes ont été brûlées vives à l'intérieur
d'une église à Eldorat, dans l'ouest du pays. Elles s'y étaient
réfugiées pour fuir les violences post-électorales.

Une cinquantaine de cadavres, la plupart avec des blessures par
balles, ont été apportés dans la nuit de lundi à mardi à la morgue
de Kisumu (ouest), selon un employé de la morgue. Trois enfants
figuraient parmi eux et quatre avaient été frappés à la
machette.

101 cadavres à la morgue

A Kisumu, troisième ville du Kenya, les violences se sont
également poursuivies. La morgue de ce bastion du chef de
l'opposition Raila Odinga, qui a rejeté la victoire du président
sortant Mwai Kibaki a reçu 101 cadavres depuis lundi. Des heurts
ont aussi été signalés à Mombasa et Nairobi, les deux plus grandes
villes du pays.



Dans le bidonville de Kondele, à Nairobi, les policiers ont tiré
sur les gens, selon un habitant. Un couvre-feu a été imposé à
Kisumu de 6h à 18h et la police "a reçu l'ordre d'abattre" ceux qui
ne le respecteraient pas, avait indiqué lundi un haut responsable
de la police.

300 morts en quelques jours

Les nouvelles victimes de la nuit portent à 300 le nombre de
morts dans les violences qui secouent le Kenya depuis les élections
générales du 27 décembre, selon un bilan établi à partir de sources
policières. Ces violences urbaines à caractère politique sont les
pires dans le pays depuis une tentative de coup d'Etat avortée en
1982.



Quelques minutes après l'annonce de la victoire contestée de Mwai
Kibaki dimanche, des émeutes meurtrières avaient éclaté dans les
fiefs du candidat de l'opposition Raila Odinga, à Kibera, plus
grand bidonville de Nairobi, et dans plusieurs villes de l'Ouest.
Odinga avait accusé Kibaki de fraudes électorales.



Au moins 70'000 personnes ont également été déplacées par les
violences selon la Croix-Rouge kényane. Celle-ci a dénoncé "une
tuerie insensée" et un "désastre national". Des images aériennes de
zones de l'ouest du pays montre des centaines de maisons et huttes
incendiées et des barrages routiers installés tous les dix
kilomètres sur les routes.

Appel à la prudence du DFAE

le millier de touristes suisses au Kenya n'est pas touché par
les troubles qui secouent le pays depuis les élections du 27
décembre. Les hôtels qui les abritent au bord de la mer sont
éloignés des foyers de violence, selon les voyagistes
helvétiques.



Le DFAE a appelé lundi les touristes suisses au Kenya "à la plus
grande prudence". Mais contrairement à d'autres pays, Berne ne
déconseille pas les voyages vers ce pays.



Paris, Rome et Vienne ont eux prié leurs ressortissants d'éviter
les voyages au Kenya. Tout comme la Suisse, la Grande-Bretagne et
l'Allemagne disent suivre de très près la situation sur le
terrain.



agences/boi/tac

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Partenaires inquiets

Les affrontements du week-end, dans un pays d'ordinaire calme mais qui a une tradition de violences électorale, et les accusations de fraudes ont provoqué l'inquiétude des partenaires occidentaux de Nairobi.

Si le département d'Etat américain a tout d'abord félicité Mwai Kibaki, il s'est ensuite rétracté, se disant inquiet des irrégularités dans le décompte des voix et appelant à lever ses doutes rapidement.

L'Union européenne et la Grande-Bretagne, l'ancienne puissance coloniale, ont eux accueilli très froidement l'annonce de la victoire du président sortant.

La Commission européenne souligne que "le résultat serré des votes donne aux camps en présence, guidés par leurs dirigeants, une responsabilité politique, celle de travailler ensemble dans un esprit d'unité.

Depuis le jour de Noël, toute activité économique a presque cessé au Kenya, en raison des fêtes, des élections générales du 27 décembre et des tensions post-électorales.

Le gouvernement kényan a également ordonné dimanche soir la suspension immédiate de la diffusion en direct par les radios et télévisions des reportages sur les émeutes.

Jeune démocratie

Quelque 14 des 36 millions de Kenyans ont voté jeudi dernier à l'issue d'une campagne axée sur la corruption, que le chef de l'Etat sortant et à nouveau candidat Mwai Kibaki avait déjà promis d'éradiquer il y a cinq ans.

Mwai Kibaki avait succédé en 2002 à Daniel Arap Moi, que la Constitution empêchait de se représenter après 24 ans passés au pouvoir et des réélections marquées par des accusations de fraude en 1992 et 1997.

Indépendant depuis 1963, le Kenya est l'un des pays les plus développés d'Afrique, avec une industrie du tourisme en pleine expansion et l'un des taux de croissance les plus dynamiques. Pour nombre d'observateurs, ces élections auraient dû servir de test pour ce qui reste une jeune démocratie.