Au cours d'une conférence de presse organisée mercredi à
Nairobi, plusieurs ministres du gouvernement kényan sortant ont
ainsi accusé les partisans de Raila Odinga de commettre un génocide
dans la vallée du Rift (ouest).
Le secrétaire général du Mouvement démocratique orange (ODM),
Anyang' Nyong'o, a en retour condamné la répression policière des
violences la qualifiant lui aussi de "génocide".
Accusations non étayées
Au moins 300 personnes ont été tuées dans le pays depuis le 27
décembre, selon des sources policières, hospitalières et de la
morgue de Kisumu (ouest). "Il devient de plus en plus évident que
ces actes de génocide et de nettoyage ethnique bien organisés ont
été soigneusement préparés et répétés par les dirigeants de l'ODM
avant les élections", a déclaré à la presse le ministre des Terres
Kivutha Kibwana.
Kivutha Kibwana, interrogé par la presse, a toutefois été dans
l'incapacité d'étayer ces accusations. "Comment pouvons-nous être
(tenus) pour responsables lorsque les gens sont en colère parce que
Kibaki a volé les élections? Il s'agit d'un génocide car la police
tue des gens. Le meurtre de masse est un génocide", a pour sa part
rétorqué Anyang' Nyong'o.
Un peu plus tôt, le porte-parole du gouvernement Alfred Mutua
avait accusé Raila Odinga d'être responsable de ces violences,
qualifiées de "nettoyage ethnique", visant la communauté kikuyu, la
plus nombreuse du Kenya et dont est issu le président réélu Mwai
Kibaki. "Ce sont les partisans de Raila (Odinga) qui sont impliqués
dans les violences et un leader est responsable des actions de ses
supporters", a-t-il affirmé.
Nombreux massacres
"En l'espèce, ce sont les communautés pro-Odinga qui ciblent des
Kikuyus d'une manière qui répond au critère de nettoyage ethnique",
a accusé Alfred Mutua. Un haut responsable de la police kényane
avait estimé mardi que les violences en cours dans la vallée du
Rift, notamment à Eldoret (ouest), pouvaient être qualifiées de
"nettoyage ethnique".
Mardi, à Kiamba près d'Eldoret (ouest), au moins 35 personnes,
dont des femmes et des enfants, ont été brûlées vives dans une
église incendiée par une foule en colère. Quelque 300 à 400
personnes s'étaient réfugiées dans l'édifice religieux pour fuir
les violences. Les victimes sont membres de la tribu kikuyu dont
est issu le président réélu.
afp/kot
Les émeutes baissent d'intensité dans l'ouest
Les corps de huit personnes ont été amenés à la morgue de Kisumu (ouest du Kenya) mercredi au cours d'affrontements entre émeutiers et forces de l'ordre qui ont diminué d'intensité par rapport aux deux nuits précédentes, a-t-on appris auprès d'un employé de la morgue et de source policière.
Douze autres cadavres ont été transportés dans la nuit de mardi à mercredi à la morgue du centre hospitalier universitaire d'Eldoret (ouest), selon une source hospitalière.
Ces nouvelles victimes portent à 328 le nombre de morts dans les violences à la fois politiques et interethniques depuis la réélection contestée du président Mwai Kibaki le 27 décembre, selon un bilan établi par l'AFP sur la base d'informations de la police, des hôpitaux et d'un employé la morgue de Kisumu.
Le DFAE déconseille le pays
Comme plusieurs pays européens, la Suisse déconseille désormais les voyages vers le Kenya. Les troubles post-électoraux pourraient se prolonger, selon le DFAE, qui a appelé les acteurs politiques kenyans au dialogue.
"Tant que la situation ne s'est pas clarifiée, il est déconseillé de se rendre au Kenya pour des voyages touristiques ou autres qui ne présentent pas un caractère d'urgence", a indiqué le DFAE.
Jusqu'ici, Berne avait appelé les touristes sur place "à la plus grande prudence" mais n'avait pas déconseillé les voyages vers le Kenya. Un pas qu'avaient déjà franchi plusieurs pays comme la France, l'Italie, l'Autriche ou la Belgique.
Un millier de touristes suisses séjournent dans la région de Mombasa.
Les services de Micheline Calmy-Rey ont par ailleurs condamné mercredi les violences post-électorales au Kenya. Exprimant sa "préoccupation", le DFAE a appelé les acteurs politiques "à tout entreprendre pour trouver la voie d'un dialogue sur l'avenir politique du pays".