"Nous avons au moins 600 morts (...), certains corps sont
toujours dans les campagnes, là où les affrontements ont eu lieu",
a déclaré à Nairobi un haut responsable de la police nationale sous
couvert d'anonymat.
Un autre haut responsable a confirmé ce nouveau bilan. Le
gouvernement kényan a de son côté fait état de "486 morts et de
255'600 personnes déplacées dans les violences
post-électorales".
Déchaînement de violence
L'annonce de la réélection du président Mwai Kibaki le 30
décembre avait été suivie d'un déchaînement de violences notamment
dans l'ouest du pays et dans les bidonvilles de Nairobi, où son
rival Raila Odinga compte de nombreux partisans.
Lundi, 11 pays de la sous-région réunis dans la Conférence
internationale pour la région des Grands lacs africains (CIRGL) ont
estimé que certaines de ces violences s'apparentaient à des actes
"de nettoyage ethnique et de génocide".
"Certaines des tueries ont été perpétrées (...) de sang-froid,
s'apparentant à des actes de nettoyage ethnique et de génocide, car
elles ciblaient les plus vulnérables, y compris les femmes et les
enfants", indique un communiqué de la CIRGL rendu public à Nairobi.
"Les réfugiés, les déplacés internes, les campagnes de haine et les
menaces de génocide font leur retour dans la région", s'alarme le
communiqué.
Parlement convoqué le 15 janvier
Sur le plan diplomatique, la secrétaire d'Etat adjointe
américaine aux Affaires africaines, Jendayi Frazer, devait
rencontrer une nouvelle fois Mwai Kibaki et Raila Odinga pour
tenter d'élaborer un scénario de sortie de crise, au troisième et
dernier jour de ses entretiens à Nairobi.
Par ailleurs, le président kényan Mwai Kibaki, dont la réélection
est contestée par l'opposition politique, a annoncé lundi la
convocation du Parlement à partir du 15 janvier.
Dans un signe d'apaisement, le Mouvement démocratique orange (ODM)
de Raila Odinga a décidé d'annuler des manifestations prévues mardi
dans le pays en expliquant sa décision par la venue prochaine du
président en exercice de l'Union africaine (UA), John Kufuor. La
visite de M. Kufuor au Kenya, "pour servir de médiateur", avait été
annoncée dimanche par le Premier ministre britannique Gordon
Brown.
Le gouvernement kényan s'est aussitôt félicité de l'annulation de
ces manifestations interdites par les autorités. "C'est bon de
savoir qu'il (Raila Odinga) a répondu à l'appel à la paix du
gouvernement", a déclaré le porte-parole du gouvernement, Alfred
Mutua.
afp/tac
Rappel des faits
Jeudi et vendredi, la police, massivement déployée et faisant usage de canons à eaux et de gaz lacrymogènes, avait empêché les partisans de Raila Odinga de rallier le centre-ville de Nairobi où l'opposant avait appelé à une "marche pacifique".
Dimanche, Raila Odinga, qui accuse le président sortant de lui avoir volé la victoire, a plaidé pour un règlement négocié de la crise et s'est dit disposé à un partage du pouvoir, à la condition que sa victoire à la présidentielle soit reconnue.
Samedi, Mwail Kibaki s'était dit de son côté "prêt à former un gouvernement d'union nationale", au sortir d'un entretien avec Mme Frazer, proposition immédiatement rejetée par son rival qui posait comme préalable à tout dialogue la présence d'un médiateur international.
Le gouvernement a dépêché des émissaires dans plusieurs pays africains pour défendre son point de vue en présentant "une image claire de ce qu'est la situation politique et sécuritaire dans le pays".
Crise humanitaire
Le Kenya est à présent confronté à une crise humanitaire après une semaine de violences qui ont entraîné le déplacement de plus de 255'000 personnes. Les populations touchées par le déferlement de violences ont besoin d'aide, particulièrement dans la région de la vallée du Rift (ouest), où 100'000 personnes relèvent de l'urgence humanitaire, selon l'ONU.
Lundi, le centre-ville de Nairobi avait renoué avec son habituelle frénésie alors même que la rentrée scolaire, initialement prévue lundi, a été repoussée d'une semaine par les autorités.