Le résultat, encore partiel, a été proclamé par le président d'une Commission électorale indépendante (CEI) dans la nuit de lundi à mardi. Le taux de participation est de 53,9%.
Selon les scores annoncés par la CEI, le candidat indépendant Kouadio Konan Bertin arrive en deuxième position avec 1,99% des voix. L'ancien président Henri Konan Bédié et l'ex-Premier ministre Pascal Affi N'Guessan, qui avaient appelé au boycott, ont obtenu respectivement 1,66% et 0,99% des voix.
Il appartient désormais au Conseil constitutionnel de valider les résultats et de proclamer le vainqueur après avoir étudié les éventuels recours de candidats.
L'opposition annonce créer son propre gouvernement
En réaction à l'annonce du résultat provisoire, l'opposition ivoirienne a annoncé lundi la création d'un "Conseil national de transition", dirigé par l'ex-président Henri Konan Bédié, qui veut former un "gouvernement de transition".
"Le Conseil national de transition aura pour mission de préparer le cadre d'une élection présidentielle juste transparente et inclusive", a affirmé l'ancien Premier ministre Pascal Affi N'Guessan, au nom de toute l'opposition, qui a "constaté la vacance du pouvoir exécutif avec la fin du mandat présidentiel d'Alassane Ouattara".
Troisième mandat controversé
L'opposition dénonçait la candidature d'Alassane Ouattara, âgé de 78 ans, comme une tentative illégale de se maintenir au pouvoir, alors que le nombre de mandats présidentiels consécutifs était jusqu'ici limité à deux par la loi fondamentale ivoirienne.
Mais le Conseil constitutionnel a estimé qu'avec la nouvelle Constitution adoptée en 2016, le compteur des mandats présidentiels a été remis à zéro, autorisant Alassane Ouattara à briguer un troisième mandat. Ce que l'opposition conteste.
Alassane Ouattara, réélu une première fois en 2015 avec plus de 80% des voix, avait annoncé en mars qu'il ne briguerait pas un troisième mandat. Mais il est revenu sur sa décision en août après la mort de son Premier ministre, Amadou Gon Coulibaly, qui avait été désigné candidat de la majorité présidentielle.
Violences post-électorales
Des violences secouent le pays depuis le vote de samedi, passant presque systématiquement du champ politique à l'affrontement inter-ethnique. Selon un décompte de l'AFP, au moins neuf personnes ont été tuées dans le sud depuis samedi.
De son côté, l'Union européenne a "pris note" des résultats provisoires mais a exprimé mardi sa "vive préoccupation" face aux tensions post-électorales dans le pays. Elle a appelé toutes les parties au dialogue.
"De nombreux Ivoiriens se sont rendus aux urnes, mais de nombreux autres ne l'ont pas fait, soit par choix, soit par empêchement en raison des violences et blocages", a souligné Josep Borrell, relevant également "les très fortes disparités du taux de participation dans les différentes régions du pays".
jop avec agences
Nouvelle élection dans la violence
Le désaccord concernant la candidature d'Alassane Ouattara a provoqué des violences meurtrières en amont de l'élection, qui ont fait au moins 30 morts. Au moins neuf personnes supplémentaires ont par ailleurs été tuées depuis samedi, selon des représentants et un décompte de l'AFP.
En raison des violences, environ 5000 bureaux de votes n'ont pas pu ouvrir. Le nombre d'électeurs est donc passé de 7,5 à 6 millions d'inscrits. Des militants de l'opposition ont saccagé ou empêché l'ouverture de certains bureaux.
En 2010 déjà, l'annonce de la victoire d'Alassane Ouattara, rejetée par le président sortant Laurent Gbagbo, avait déclenché une guerre civile de plusieurs mois. Ouattara avait accédé au pouvoir après la victoire de ses forces en 2011. Le conflit avait fait quelque 3000 morts.
"Réformateur démocrate" ou "technocrate autoritaire" ?
Alors qu'il voulait laisser l'image d'un économiste bâtisseur et démocrate, ayant pacifié son pays après une longue crise meurtrière, cette élection sur un score stalinien a désormais abîmé son image. L'opposition l'accuse d'être un "dictateur", "technocrate international", sans volonté sociale et ayant instrumentalisé la justice contre ses opposants.
"Je n'ai certainement pas tout réussi, mais les résultats sont là", avait-il résumé en mars, rappelant qu'il a hérité d'un pays "en lambeaux" qu'il aurait "remis au travail " et dans lequel il aurait "ramené la paix et la sécurité".