"C'est ma maison, je ne peux pas la laisser aux Turcs", comme sont souvent qualifiés les Azerbaïdjanais par les Arméniens, a expliqué le propriétaire d'une maison dans le village de Charektar, dans la région de Kalbajar, qui doit être cédée à l'Azerbaïdjan, en jetant des planches de bois enflammées et des tisons imbibés d'essence pour incendier le parquet de son ancien salon, dans une habitation complètement vidée.
Rien que dans ce village, marquant la limite avec le district voisin de Martakert, qui lui doit rester sous contrôle arménien, au moins six habitations étaient en feu samedi matin. Une dizaine avaient aussi brûlé la veille.
"On attendait pour être fixé. Mais quand ils ont commencé à démonter la station hydro-électrique, on a compris", a ajouté l'habitant avant son départ pour l'Arménie. "Tout le monde va brûler sa maison aujourd'hui (...) On nous a donné jusqu'à minuit pour partir". "On a aussi bougé la tombe des parents, les Azerbaïdjanais vont se faire un malin plaisir à profaner nos tombes, c'est insupportable", regrette-t-il.
Un accord sous l'égide de la Russie
Un accord de paix signé entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan sous égide de Moscou a mis fin à sept semaines d'intenses combats au Haut-Karabakh, enclave montagneuse disputée depuis des décennies entre ces deux pays du Caucase. Selon ce texte, l'Azerbaïdjan reconquiert de larges territoires qui étaient sous contrôle arménien depuis le début des années 1990.
Dans la région, les armes sont toujours là, mais elles se sont tues. "Toutes les lignes de front se sont calmées dès l'annonce de l'accord", relate un officier de l'armée russe. Aux violents combats de ces sept dernières semaines et aux bombardements qui faisaient trembler chaque jour les immeubles de la ville, un calme presque étrange a succédé.
Les soldats de la paix russes sont déployés au coeur de l'enclave, séparant les belligérants sur les nouvelles positions conquises par les forces azerbaïdjanaises. Leur uniforme flanqué d'un écusson aux lettres "MC" (pour "forces de paix"), ils contrôlaient déjà vendredi les abords de Stepanakert, la capitale du Haut-Karabakh.
Plus de 4000 morts
L'Arménie a reconnu samedi avoir perdu plus de 2300 soldats dans le conflit. Ce lourd bilan représente près du double des pertes précédemment annoncées par Erevan, en plus de 50 civils arméniens tués.
L'Azerbaïdjan pour sa part ne communique pas ses pertes militaires, rapportant simplement 93 civils tués par les bombardements arméniens.
Le président russe Vladimir Poutine, qui fait office d'arbitre dans la région, avait affirmé de son côté vendredi que les combats au Haut-Karabakh avaient fait plus de 4000 victimes et 8000 blessés, ainsi que des dizaines de milliers de réfugiés.
afp/boi