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Le pouvoir biélorusse essaie d'éradiquer les manifestations par tous les moyens

Les manifestations se poursuivent en Biélorussie, mais par petits groupes, comme ici le 6 décembre à Minsk. [Keystone - AP]
Une Suissesse condamnée à deux ans et demi de prison en Biélorussie / La Matinale / 1 min. / le 8 décembre 2020
En Biélorussie, malgré la répression de plus en plus violente, une partie de la population continue de manifester, par petits groupes, pour déjouer la police. Mais le pouvoir use de méthodes de plus en plus inquiétantes.

Lundi, une citoyenne suisso-biélorusse de 51 ans, Natalia Hershe, a été condamnée à deux ans et demi de prison pour avoir arraché la cagoule d'un policier lors d'une manifestation contre le président Alexandre Loukachenko. Elle a été reconnue coupable d'avoir résisté à un policier dans l'exercice de ses fonctions.

"Je vis dans un pays démocratique européen où la liberté d'expression et de réunion pacifique est inconditionnellement respectée et définie par la Constitution, où les policiers ne cachent pas leur visage sous des masques et protègent leurs citoyens", a déclaré Natalia Hershe lors de son audience au tribunal, en référence à la Suisse.

L'ambassadeur de Suisse en Biélorussie, Claude Altermatt, a dit aux journalistes après l'audience "regretter cette décision de justice".

>> Les explications dans le 19h30 :

Une Suissesse a été condamnée à deux ans de prison en Biélorussie pour avoir participé à des manifestations contre le régime.
Une Suissesse a été condamnée à deux ans de prison en Biélorussie pour avoir participé à des manifestations contre le régime. / 19h30 / 2 min. / le 8 décembre 2020

Divsersification des méthodes de répression

Valiantsin Stefanovic, un des responsables de l'ONG de défense des droits humains "Viasna" à Minsk, affirme mardi dans La Matinale que les autorités diversifient les méthodes de répression. L'une des plus dures, ce sont les poursuites pénales pour motif politique: "Au moins 900 personnes doivent faire face à des enquêtes pénales ouvertes à leur encontre depuis les élections cet été. Il y a des audiences presque tous les jours. La semaine dernière se sont tenues les audiences de deux affaires où cinq personnes ont été accusées de hooliganisme et d'importants dommages à la propriété, pour avoir simplement écrit sur l'asphalte: 'Nous ne t'oublions pas', sur le lieu où est mort l'un des manifestants".

Lutte contre les drapeaux

Le pouvoir mène une lutte systématique contre les drapeaux, graffitis et rubans rouge et blanc, aux couleurs de l'opposition. "A Minsk, il y a déjà eu plusieurs affaires administratives, où les gens ont été arrêtés, détenus pendant 15 jours, pour avoir suspendu un drapeau rouge ou blanc à leur propre fenêtre, et qui plus est non pas sur la façade, mais depuis l'intérieur", explique Valiantsin Stefanovic.

Les juges qualifient cet acte de piquet de protestation, alors qu'il s'agit d'un espace privé. Désormais, faute de pouvoir accéder au centre-ville le dimanche, les manifestants n'organisent plus de grande marche, mais ils se rassemblent par petits groupes dans les quartiers, ce qui demande à la police davantage de ressources pour les poursuivre et permet de rendre la contestation plus visible au pied de chaque immeuble.

Mais toute mobilisation est lourde de conséquences: passages à tabac, étudiants renvoyés des universités, licenciements, y compris de médecins - en période de Covid-19 - pour le simple fait d'avoir manifesté. Un quartier connu pour être contestataire s'est vu privé d'eau et de chauffage pendant plusieurs jours. La menace de se voir retirer la garde de ses enfants reste l'un des outils de répression les plus redoutés.

Détérioration de la situation

Vendredi, la Haut-Commissaire aux droits de l'homme de l'ONU, Michelle Bachelet a estimé que la situation des droits de l'homme en Biélorussie "avait continué à se détériorer" depuis septembre à cause de la répression du mouvement de contestation par les autorités. Face aux critiques, l'ambassadeur biélorusse à l'ONU a accusé le Conseil des droits de  l'homme d'en faire trop alors qu'ailleurs "il y a des vraies guerres, des conflits internes et des catastrophes humanitaires avec des milliers de morts".

Isabelle Cornaz/jpr

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