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Irak: 5 ans après, quel bilan, quel avenir?

Michael Calingaert, politologue américain, répond aux questions de Sébastien Faure sur la place de la guerre dans la campagne américaine.
Michael Calingaert, politologue américain, répond aux questions de Sébastien Faure sur la place de la guerre dans la campagne américaine.
La guerre en Irak débutait il y a 5 ans. Quel bilan tirer de cette aventure? Qui de Clinton, Obama ou McCain est à même de sortir de cette crise? Esquisse de réponse avec deux politologues américains: Michael Calingaert et Daniel Warner.

Le 19 mars 2003, le premier missile américain s'abattait sur
Bagdad. Cinq ans plus tard, le dossier irakien s'ajoute à la crise
économique dans l'agenda des candidats à la présidence des
Etats-Unis.



Et la question du retrait des troupes ou de l'envoi de contingents
supplémentaires prendra de plus en plus d'ampleur d'ici novembre
selon Michael Calingaert, politologue à la Brookings Institution à
Washington (voir vidéo ci-dessus).

"Une catastrophe"

Georges W.Bush expliquait à l'époque que son pays entrait en
guerre pour libérer l'Irak de Saddam Hussein, coupable de posséder
des armes de destruction massive, et mettre en place une démocratie
au coeur du Moyen-Orient. Cinq ans après, il est avéré que ces
armes n'ont jamais existé. Pire, l'Irak, théâtre d'une guerre
civile sanglante, s'éloigne jour après jour un peu plus de la
démocratie.



Daniel Warner, politologue américain à l'Institut des Hautes
Etudes Internationale et du Développement à Genève, tire un bilan
très sombre de cette aventure, "une catastrophe" selon ses propres
termes. Il conteste avec force les déclarations de George W. Bush
qui affirmait hier que l'intervention préventive en Irak avait
"ouvert la porte à une victoire stratégique majeure dans la guerre
plus large contre le terrorisme." (écouter interview
ci-contre
)

La guerre à l'agenda

L'invasion de l'Irak
a aidé les terroristes partout dans le monde.

Daniel Warner, politologue à
l'IHEID

Longtemps relégué au second plan dans
la campagne électorale, le débat sur la guerre en Irak a resurgi à
l'occasion de ce jubilé et de la récente visite du candidat
républicain John McCain à Bagdad, sa huitième depuis l'invasion du
pays en 2003.



John McCain a fait du dossier irakien une clef de son succès. Il
soutient sans férir l'engagement américain et assure que la
décision prise l'an dernier d'envoyer 30'000 soldats américains
supplémentaires sur place "porte ses fruits".



Les candidats démocrates à la Maison Blanche ont marqué le 5e
anniversaire de la guerre d'Irak, en soulignant mercredi leur
volonté de mettre fin à ce conflit tandis que le républicain John
McCain insiste pour maintenir des troupes jusqu'à la
victoire.



La guerre en Irak est déjà plus longue que la Première et la
Seconde Guerre mondiale et aucune solution n'est en vue, a affirmé
Barack Obama à Fayetteville en Caroline du Nord. Le candidat
démocrate a promis de "mettre fin" à cette guerre qui, selon lui, a
rendu "l'Amérique moins sûre" et l'a isolée de ses alliés. Il
prévoit de ramener toutes les troupes dans un délai de 16
mois.



Hillary Clinton de son côté a affirmé au cours d'un déplacement à
Detroit qu'il n'y avait "pas de solution militaire" au conflit.
Elle a promis de commencer à ramener les soldats américains dans un
délai de 60 jours après sa prise de fonction sans toutefois donner
un calendrier précis. Par ailleurs, elle a affirmé que c'était aux
Irakiens de prendre en main les destinées de leur pays. "Nous ne
pouvons pas gagner leur guerre civile", a-t-elle dit.



Axel Roduit/tsrinfo

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Les chiffres de la guerre

Depuis le 20 mars 2003, le total des pertes de la coalition menée par les Etats-Unis s'élève à 4298 morts, dont 3991 Américains, 175 soldats britanniques et 133 membres d'autres contingents, selon un décompte du site internet indépendant www.icasualties.org.

Environ 40% d'entre eux ont péri dans des attentats, le plus souvent lors de l'explosion d'engins piégés au passage de leurs patrouilles à pied et de leurs véhicules, d'après le décompte de ce site. Ces bombes artisanales, connues sous l'acronyme d'IED (Improvised Explosive Device) ont fait des ravages dans les rangs américains, forçant le Pentagone à déployer des véhicules de nouvelle génération aux blindages toujours plus performants.

L'année la plus meurtrière pour l'armée américaine a été 2007, avec 901 décès, suivi de 2004 (849), 2005 (846) et 2006 (822), ce qui démontre que la violence est en fait continue depuis quatre ans.

Depuis que le président George W. Bush a annoncé la "fin de la guerre" le 1er mai 2003, en combinaison de pilote de chasse sur le pont du porte-avions Abraham Lincoln, 3854 soldats américains sont morts en Irak.

A titre de comparaison, 58'000 Américains avaient trouvé la mort pendant la guerre du Vietnam (1964-1973).

Contrairement à une idée souvent avancée sur la sociologie des victimes, 75% des tués sont des Blancs, 10,72% sont d'origine hispanique et 9,4% des Afro-Américains. Cent deux femmes ont également été tuées, soit 2,38% des pertes totales. La très grande majorité des victimes (77%) sont des jeunes gens âgés de moins de 30 ans.

Le contingent américain s'élève actuellement à 158'000 hommes.

Les coûts de la guerre

Le coût du conflit en Irak, qui s'apprête à dépasser celui des guerres de Corée et du Vietnam, s'élève déjà à plus de 400 milliards de dollars aux Etats-Unis, et la facture totale dépassera trois mille milliards, selon le Prix Nobel d'économie américain Joseph Stiglitz.

Selon les chiffres avancés par le Pentagone, 527 milliards de dollars ont été alloués de septembre 2001 à fin décembre 2007 au financement de la lutte contre le terrorisme, dont 406,2 milliards à la guerre en Irak.