Echaudés par la cérémonie d'allumage lundi à Olympie (sud),
perturbée par des militants de l'organisation française Reporters
sans Frontières, les Grecs avaient entouré la flamme d'un
déploiement policier très important.
Une douzaine de manifestants postés à l'entrée du Stade de
marbre, où venait de démarrer en grande pompe la cérémonie de
passation, ont à peine eu le temps de déployer une banderole qu'ils
ont aussitôt été interpellés, alors qu'ils criaient "Libérez le
Tibet". Au total, une vingtaine de personnes ont été arrêtées après
avoir tenté de forcer le cordon de sécurité.
Fouilles et hélicoptères
Quelques milliers de personnes, dont beaucoup de touristes
chinois venus en groupe, avaient pris place dans le Stade aux bancs
très clairsemés, sous la surveillance de centaines de policiers. Un
dispositif de sécurité sans précédent depuis 1936, année du premier
trajet de la flamme olympique, avait été déployé pour
l'occasion.
Des fouilles systématiques avaient lieu à l'entrée du stade,
survolé par des hélicoptères. Le centre d'Athènes avait été
totalement bouclé à la circulation.
La flamme a été remise au responsable chinois du Comité
d'organisation des Jeux, Liu Qi, en présence des président et
Premier ministre grecs Carolos Papoulias et Costas Caramanlis.
Un relais annulé
Alors que la torche devait effectuer un relais dans la matinée
dans les rues de la capitale, le Comité hellénique olympique a
préféré repousser cette course de plusieurs heures, afin de limiter
au maximum le temps passé en ville. Des restrictions ont aussi été
prises contre les médias, interdits d'accès au site de
l'Acropole.
Cette situation a provoqué la colère de l'Association des
journalistes de la presse étrangère d'Athènes et de RSF, qui a
estimé que "la Chine déteignait sur la Grèce".
Départ pour la Chine
La torche a ensuite pris l'avion pour relier Athènes à Pékin et
elle sera officiellement accueillie lundi sur la place Tiananmen de
Pékin. Les autorités chinoises ont d'ores et déjà annoncé qu'elles
procèderaient à des contrôles aléatoires, afin de "renforcer la
sécurité publique".
Mercredi, la flamme démarrera un périple de 137'0000 kilomètres à
travers le monde. Celui-ci s'annonce mouvementé, les militants
pro-tibétains ayant déjà prévu plusieurs manifestations, notamment
à Londres, Paris et San Francisco. Après son retour en Chine en
mai, la flamme passera comme prévu au Tibet, a assuré Pékin.
agences/boi/cer
Nouvelles manifestations
A Lhassa, des manifestations rassemblant des milliers de personnes ont à nouveau eu lieu ce week-end encore, a indiqué le gouvernement tibétain en exil.
A Katmandou, la police népalaise a aussi chargé dimanche à coups de bâtons des manifestants pro-tibétains à proximité d'un bureau de l'ambassade de Chine et arrêté plus de 113 personnes.
Elle a indiqué que des manifestants avaient été blessés.
La police chinoise a en outre arrêté 26 personnes, soupçonnées d'avoir participé à des manifestations antichinoises, et affirmé avoir saisi des armes et des explosifs dans le monastère de Geerdeng, dans la province du Sichuan (sud-ouest).
Une Chine à la rhétorique guerrière
Selon plusieurs politologues, la Chine fait à nouveau appel à la rhétorique guerrière du passé pour défendre ses positions dans la question tibétaine.
Le dalaï-lama est "la griffe des forces internationales anti-chinoises", les moines tibétains sont "la lie du bouddhisme" et les critiques étrangers ont "une mentalité sombre et méprisable", ont ainsi déclaré les autorités chinoises.
Trois décennies de réformes économiques et d'évolution de la société n'ont que peu d'impact sur le ton employé par le régime lorsque des questions de souveraineté territoriale et de pouvoir entrent en jeu, selon les spécialistes. Même les JO ne parviennent pas à modérer les propos des autorités.
Et c'est pour le dalaï-lama que la Chine réserve son langage le plus dur dans cette guerre des mots. Le secrétaire général du Parti communiste l'a ainsi traité de "loup en costume de moine, diable à visage humain mais avec un coeur de bête".
Puisant également dans le lexique de la Révolution culturelle (1966-76), les autorités ont exhorté la population à adopter une "position bien arrêtée" contre les manifestants tibétains.
Et le point de vue officiel est largement partagé par l'opinion publique. Le Chinois est "si profondément socialisé" que toute tentative de remise en question entraîne de fortes réactions émotionnelles, explique un politologue.