Le 3 janvier 2019, sur ordre du président américain Donald Trump, un tir de missile lancé par un drone américain tuait à Bagdad ces deux figures majeures de la lutte contre le groupe "Etat islamique".
S'ensuivent ripostes iraniennes contre des bases américaines en Irak, attaques de groupes armés chiites contre des convois et intérêts américains, menaces de fermeture de l’ambassade des Etats-Unis à Bagdad et maintien des soldats américains malgré un vote du Parlement.
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Commémoration à Bagdad
Ce dimanche, des milliers de partisans des paramilitaires irakiens pro-Iran se sont réunis lors d'une démonstration de force à Bagdad pour commémorer le 1er anniversaire de ces assassinats.
Après une veillée aux bougies à l'endroit même de l'explosion, la foule s'est rendue place Tahrir pour honorer leurs "martyrs", dénoncer "l'occupant américain" et conspuer celui qu'ils accusent d'être son "agent" en Irak, le Premier ministre Moustafa al-Kazimi.
Les manifestants ont brandi la photographie d'Abou Mahdi al-Mouhandes, numéro deux de "Hashed al Shaabi" ("Unités de Mobilisation populaire"), cette force armée de plus de 100'000 hommes, à majorité chiite, placée sous l’autorité du Premier ministre.
Le frère d'al-Mouhandes, Abou Feras, se souvient: "Ma mémoire est pleine de douleurs et de tristesse. Il a servi l’Irak, sa famille, ses amis et tous les Irakiens. L'EI était aux portes de Bagdad et il les a combattus. Tout ce qu’il voulait, c’était instaurer la sécurité en Irak."
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Disparition d'un équilibre fragile
L'assassinat de cette figure héroïque a humilié une grande majorité de la population, fracassé tout espoir de souveraineté et posé de sérieuses questions quant aux accords de sécurité passés avec les Etats-Unis. En a découlé l'émergence de nouveaux groupes armés.
"Ces groupes sont parfois hors de contrôle", explique Mohanned al Akabi, porte-parole des Unités de Mobilisation populaire. "Abou Mahdi et Qassem Soleimani équilibraient les forces en Irak et dans la région. Ils savaient aussi résoudre les divergences en Irak. Cet équilibre a disparu."
En le tuant, ils ont rendu plus complexe la situation en Irak qu’elle ne l’était.
Hostile à toute politique de mainmise iranienne, un haut-gradé de l'armée irakienne, souhaitant garder l’anonymat, partage ce constat: "En le tuant, ils ont rendu plus complexe la situation en Irak qu’elle ne l’était. Le gouvernement a perdu cette personne capable de résoudre les différends avec la résistance."
Pour Mohanned al Akabi, ces assassinats ont surtout servi les intérêts d'Israël: "Sous pression américaine, certains pays ont osé normaliser leurs relations avec l’entité sioniste. Cela ne va pas être un facteur de stabilité dans la région, mais conduira à plus de désordre et de combats."
Combattre l'EI et les troupes américaines
Bien qu’amputées de leur leadership, les Unités de mobilisation populaire et autres groupes armés chiites disent marcher dans la droite lignée d’al-Mouhandes et de Soleimani. Leur objectif est d'éliminer les cellules restantes du groupe "Etat islamique" et de bouter les troupes américaines hors d’Irak.
Pendant ce temps, les tensions entre gouvernements iranien et américain persistent. Jeudi passé, le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif a tweeté qu'en Irak, "des agents provocateurs israéliens préparent des attaques contre des Américains" pour placer "Trump dans une impasse avec un casus belli fabriqué".
Et d'avertir dimanche lors de la commémoration: "Attention au piège. Tout feu d'artifice connaîtra un sérieux retour de flamme, notamment contre votre meilleur ami (Israël, NDLR)". De son côté, le président américain a prévenu: "Si un Américain est tué, je tiendrai l'Iran pour responsable".
Des menaces qui font craindre le déclenchement d’une guerre ouverte entre les Etats-Unis et l’Iran sur le sol irakien. Le pays retient désormais son souffle jusqu'au départ le 20 janvier du républicain de la Maison Blanche.
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mh / agences