"Honte", "tragédie", "république bananière": l'Amérique sous le choc après les événements du Capitole
"L'Histoire se souviendra des violences aujourd'hui au Capitole, encouragées par un président qui a menti sans relâche sur l'issue d'une élection, comme d'un moment de déshonneur et de honte pour notre pays", a jugé l'ex-président américain Barack Obama.
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"Mais on ne regarderait pas la vérité en face si on considérait cet événement comme une surprise totale", a-t-il ajouté, dénonçant le "crescendo violent" des derniers mois, alimenté par le refus des républicains de "dire la vérité".
L'ancien président Bill Clinton a aussi dénoncé une "attaque sans précédent" contre les institutions américaines, "nourrie par plus de quatre années de politique empoisonnée". "La mèche a été allumée par Donald Trump", a accusé l'ancien chef d'Etat démocrate.
"République bananière"
Pour le républicain George W. Bush, l'irruption de partisans pro-Trump au Capitole et l'interruption de la séance de certification de la victoire de Joe Biden à la présidentielle pendant plusieurs heures étaient dignes d'une "république bananière".
"Je suis consterné par le comportement irresponsable de certains dirigeants politiques depuis l'élection et par le manque de respect montré aujourd'hui à l'égard de nos institutions, de nos traditions et de nos forces de l'ordre", a souligné le 43e président des Etats-Unis.
"C'est une tragédie nationale et cela ne représente pas ce que nous sommes en tant que nation", a abondé l'ancien président démocrate Jimmy Carter, qui a appelé de ses voeux "un dénouement pacifique".
Des républicains très critiques
Plusieurs politiciens, démocrates ou républicains, ont aussi donné de la voix pour condamner les événements de mercredi, y compris des personnes qui soutenaient Donald Trump jusqu'ici.
Le chef des républicains au Sénat, Mitch McConnell, a martelé à la reprise de séance que le Sénat "ne serait pas intimidé". "Ils ont essayé de perturber notre démocratie et ils ont échoué", a-t-il asséné.
Le sénateur républicain Mitt Romney, critique fréquent du milliardaire républicain, a abondé en son sens: "Ce qui a eu lieu aujourd'hui est une insurrection incitée par le président des Etats-Unis".
Son homologue démocrate Chuck Schumer a affirmé que les événements de mercredi, provoqués "par les mots, les mensonges" de Donald Trump, laisseraient une "tache qui ne serait pas aisément effacée".
Le sénateur républicain Lindsey Graham, un proche allié de Donald Trump, a reconnu la victoire de Joe Biden et a annoncé qu'il cessait d'emboîter le pas du président. "Ne comptez plus sur moi. Trop c'est trop", a-t-il dit
Mais plusieurs républicains, dont l'élu de Floride à la Chambre des représentants Matt Gaetz, ont répété que l'élection a été volée et que des "membres du violent groupe terroriste antifa" avaient infiltré la manifestation en faveur de Donald Trump.
Même le ministre de l'Economie Steven Mnuchin a réagi dans un tweet: "La violence n'est jamais acceptable. Nous devons respecter la Constitution et le processus démocratique."
Le monde économique condamne
Des grands noms du monde des affaires aux Etats-Unis ont aussi vivement condamné les violences. "Nous valons mieux que ça", a affirmé le patron de la plus grande banque du pays JPMorgan Chase, Jamie Dimon, dans un tweet.
"Nos responsables politiques ont la responsabilité d'appeler à la fin des violences, d'accepter les résultats et, comme notre démocratie le fait depuis des centaines d'années, de soutenir une transition pacifique du pouvoir", a-t-il ajouté sans toutefois nommer directement Donald Trump.
A la tête de la banque Citigroup, Michael Corbat s'est, lui, dit "dégoûté" par les événements. "En tant qu'une des plus vieilles entreprises des Etats-Unis, nous avons vu notre pays faire face à des événements éprouvants", a-t-il souligné.
Le patron d'Apple, Tim Cook a déploré de son côté un "chapitre triste et honteux de l'histoire" des Etats-Unis. "Les responsables de cette insurrection devront être tenus pour responsables", a-t-il rappelé.
IBM a aussi condamné "l'anarchie sans précédent" observée à Washington et appelé à l'arrêt "immédiat" des violences.
"Le chaos dans la capitale de la nation est la conséquence d'efforts illégaux pour changer les résultats légitimes d'une élection démocratique", a aussi fustigé le lobby Business Roundtable, qui représente les plus grandes entreprises américaines.
boi avec afp
De multiples réactions internationales
Le secrétaire général des Nations Unies Antonio Guterres s'est dit "attristé" par les événements au Capitole: "Dans de telles circonstances, il est important que les leaders politiques insistent auprès de leurs partisans sur la nécessité de s'abstenir de toute violence et de respecter les processus démocratiques et la règle de droit."
Le président français Emmanuel Macron a déclaré avoir "confiance dans la force de la démocratie américaine". La France se tient avec "force, ferveur et détermination" au côté du peuple américain, a-t-il dit dans une vidéo publiée sur Twitter.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson a qualifié les incidents à Washington de "honte", déclarant via Twitter que les Etats-Unis défendaient la démocratie à travers le monde et qu'il était "vital" qu'il y ait désormais dans le pays une passation pacifique et ordonnée du pouvoir.
Angela Merkel s'est dite "triste" et "en colère" après l'intrusion de partisans de Donald Trump au sein du Capitole, dont le président sortant porte, selon elle, une part de responsabilité. "Je regrette profondément que le président Trump n'ait pas concédé sa défaite, depuis novembre et encore hier" mercredi, a déclaré la chancelière allemande à la presse, relevant que "les doutes sur le résultat de l'élection ont été alimentés et ont créé l'atmosphère qui a rendu possible les événements" de Washington.
Le président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez a indiqué sur Twitter qu'il suivait "avec inquiétude" les informations en provenance de Washington. Il a toutefois fait part de sa confiance dans "la force de la démocratie américaine".
Charles Michel, le président du Conseil européen, a qualifié le Congrès américain de "temple de la démocratie". "Nous avons confiance en les Etats-Unis pour garantir une transition pacifique du pouvoir" à Joe Biden, a-t-il dit sur Twitter.
La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a exprimé sa confiance en "la force des institutions et de la démocratie américaines". "Joe Biden a remporté l'élection. J'ai hâte de travailler avec lui comme nouveau président des USA", a-t-elle déclaré.
Le système électoral "archaïque" des Etats-Unis ne remplit pas les critères démocratiques, a critiqué la porte-parole de la diplomatie russe, tout en indiquant qu'il s'agissait d'une "affaire interne" à Washington.
Au Canada, le Premier ministre Justin Trudeau a fait part de sa préoccupation concernant la situation à Washington, disant suivre les événements "minute par minute". "Les institutions démocratiques américaines sont solides, espérons que tout revienne très vite à la normale", a-t-il dit lors d'un entretien à une radio de Vancouver.
"Ce que nous avons observé aux Etats-Unis hier soir et aujourd'hui a montré, tout d'abord, à quel point la démocratie occidentale est vulnérable et fragile", a déclaré le président iranien Hassan Rohani dans une allocution.
Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a estimé jeudi que les scènes de violences représentaient "un acte scandaleux" devant être "vigoureusement condamné". "Je n'ai aucun doute sur le fait que la démocratie américaine triomphera, elle l'a toujours fait", a-t-il ajouté.
Tout en disant espérer un "retour à l'ordre", la Chine a ironisé sur les évènements en dressant un parallèle entre la situation à Washington et les manifestations pro-démocratie à Hong Kong. Cette fois, "la réaction de certaines personnes aux Etats-Unis, y compris de certains médias est complètement différente", a relevé, sans les nommer, une porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
Le Conseil fédéral "consterné"
Le Conseil fédéral est "consterné par les évènements qui ont conduit à la mort de plusieurs personnes à Washington", a déclaré Guy Parmelin sur Twitter. "Nous avons cependant confiance dans la force des institutions américaines", ajoute-t-il.
Le président de la Confédération se dit confiant "qu'une transition pacifique pourra avoir lieu vers la nouvelle administration selon les règles prévues par le droit et la Constitution des Etats-Unis." "La démocratie américaine est un bien précieux pour notre pays et nos concitoyens parce que nous partageons ses valeurs," ajoute-t-il.
Le chef de la diplomatie suisse Ignazio Cassis a lui estimé que la liberté, la démocratie et la cohésion nationale sont des biens précieux qui doivent être défendus, a-t-il écrit sur Twitter. "Je condamne chaque attaque à ce propos", a-t-il poursuivi.
Le président du Conseil national Andreas Aebi (UDC/BE) et le président du Conseil des États Alex Kuprecht (UDC/SZ) ont aussi condamné ces incidents, les qualifiant d'atteinte à l'Etat de droit. Les choix démocratiques doivent être acceptés, soulignent-ils. La démocratie est une réalisation fragile qui doit être protégée et défendue, écrivent-ils jeudi dans un message sur Twitter.