La démocratie américaine est solide et les appels solennels de responsables politiques, y compris républicains, de ministres en fonction, de militaires, de patrons d’entreprise l’ont montré très vite et rassuré. Mike Pence lui-même, soutien inconditionnel du président pendant 4 ans, a su prendre ses distances au moment ultime et agir en homme d’Etat. L’ancien président George Bush parle de déshonneur. Barak Obama de honte ; il évoque des manières de république bananière. Les médias américains rapportent que des discussions ont eu lieu entre membres du gouvernement sur l’opportunité d’écarter le président Trump sur la base du 25 amendement. A l’assaut fou, le sursaut de la raison.
Mais l’exercice démocratique a été mis à mal. Les accusations répétées de Trump, son déni incessant de la défaite, ses pressions à la limite de la légalité, son appel final à un coup de force laisseront des traces dans la conscience des Américains. Surtout ils ont contribué à les diviser. Trump a-t-il perdu tout ou partie de sa puissance politique ? Est-il en mesure de poursuivre sa campagne « Make America Great Again », comme il a twitté, et de viser la présidentielle de 2024 ? Et surtout, va-t-il garder son emprise sur le parti républicain ? On voudrait croire qu’il a fait le coup de trop mais on n’en est pas certain.
C’est aussi d’une certaine manière la question du populisme et de son avenir qui est en jeu. Les anxiétés identitaires de l’Amérique n’ont pas disparu. Trump a ouvert la boîte de Pandore et les vents mauvais s’en sont échappés : les ressentiments, le mépris, la violence, la haine. Il sera difficile de refermer la boîte. Mais l’épisode du Capitole est un choc salutaire qui va peut-être faire réfléchir, mobiliser les énergies bienveillantes, déciller les yeux, à défaut de convaincre tous ceux qui auront soutenu jusqu’au bout un fanfaron égocentrique.
L’émotion s’est emparée du monde entier car ce qui touche à la démocratie en Amérique touche le monde entier. Le Conseil fédéral, toujours prudent dans ses prises de position à l’international, s’en est ému dans une déclaration officielle, se disant consterné par les événements qui ont conduit à la mort plusieurs personnes à Washington. Ce que l’autocrate Trump a réalisé, encouragé, osé faire tout au long de son mandat, jusqu’à ce final qui s’est soldé par des blessés et des morts, aura su séduire les autocrates du monde. Quant aux régimes qui ont essuyé les critiques de la grande démocratie, ils se gaussent aujourd’hui du donneur de leçon.
On se réjouissait de quitter 2020 et d’oublier l’année horrible, on commence 2021 sur un épisode sombre. Ce 6 janvier ne fut pas la fête des rois.
André Crettenand
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