Depuis mercredi soir, l'accès à internet est largement perturbé dans ce pays enclavé d'Afrique de l'Est. Les autorités ont officiellement suspendu réseaux sociaux et services de messagerie mardi, au terme d'une campagne particulièrement violente, émaillée d'arrestations et d'émeutes, et endeuillée par plusieurs dizaines de morts.
"Je continue à encourager tous les Ougandais à se déplacer pour voter", a déclaré Bobi Wine en fin de matinée, après avoir lui-même voté avec son épouse dans un bureau en périphérie de la capitale, Kampala, quadrillée par des unités de policiers en tenue anti-émeutes.
Les quelque 18 millions d'électeurs ougandais avaient jusqu'à 16h00 pour se rendre dans un des 34'600 bureaux de vote du pays afin de choisir leur président et leurs députés. Certaines urnes ont immédiatement été ouvertes pour faire un premier décompte devant la foule, en signe de transparence.
Yoweri Museveni a voté en fin d'après-midi dans l'ouest du pays à Kiruhura, dans la région rurale de sa famille d'éleveurs. "Le président est sûr de gagner. Mais il acceptera le résultat des élections du moment qu'elles sont libres et justes", a assuré à l'AFP son porte-parole, Don Wanyama.
Observateurs arrêtés
Le chanteur a affirmé que plusieurs observateurs électoraux de son parti ont été arrêtés dans la matinée. Selon lui, "nos équipes ont fui dans 22 districts, car elles étaient encerclées et pourchassées comme des criminels par la police et par l'armée."
En dehors de la capitale, le scrutin se déroulait dans le calme avec une forte présence des forces de sécurité, selon les premiers retours de certains districts.
Choc des générations
Le duel fait figure de choc des générations, dans un Ouganda où trois quarts des 44 millions d'habitants ont moins de 30 ans. D'un côté Yoweri Museveni, 76 ans, au pouvoir depuis 1986. Surnommé "M7", l'ex-guérillero s'est mué en dirigeant autoritaire et s'affiche en grand favori.
En face, Bobi Wine, 38 ans, a capitalisé sur sa popularité auprès des jeunes urbains et s'est imposé comme son principal rival, au sein d'une opposition divisée qui présente 10 candidats contre le Mouvement de résistance nationale (NRM), l'hégémonique parti au pouvoir.
Craintes et violence
Des craintes ont émergé quant à l'équité et la transparence du scrutin au cours de cette campagne plus violente que les précédentes, où des journalistes, des critiques du régime et des observateurs, américains notamment, ont été empêchés de travailler.
Mettant en avant les mesures de prévention contre le Covid-19, le régime a interdit de nombreux meetings de l'opposition, tandis que Yoweri Museveni bénéficiait d'une large visibilité médiatique grâce à son statut de président.
afp/jpr
Au moins 54 morts
La campagne a été marquée par des arrestations d'opposants, des tirs de gaz lacrymogènes et parfois de balles réelles sur leurs partisans. En novembre, au moins 54 personnes ont été tuées par la police au cours d'émeutes déclenchées par une énième arrestation de Bobi Wine.
Le secrétariat général de l'ONU "s'inquiète des violences et des tensions qui ont précédé le scrutin et appelle tous les acteurs politiques et leurs soutiens à ne pas recourir aux discours haineux, aux intimidations et à la violence", a fait savoir mercredi soir son porte-parole, Stéphane Dujarric.
Yoweri Museveni a confirmé mardi la suspension des réseaux sociaux et des services de messagerie, tels Facebook, Twitter, WhatsApp, Signal et Viber, expliquant que cette mesure venait sanctionner la fermeture par Facebook de plusieurs comptes liés au pouvoir et accusés d'influer de manière artificielle sur le débat public.