Plus de quatre ans après le référendum sur la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne (UE), approuvé par 52% des Britanniques le 23 juin 2016, l'accord fixant les termes du divorce est tombé in extremis, à la veille de Noël. Après 47 ans de vie commune, les deux alliés d'hier doivent apprendre à fonctionner l'un sans l'autre, selon les termes du traité entré en vigueur au 1er janvier.
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D'un côté de la Manche comme de l'autre, il s'agit désormais de trouver un nouvel équilibre. "Pour l'Union européenne, l'aboutissement de cette négociation ardue représente une vraie réussite parce que c'était compliqué face à des Britanniques qui sont réputés excellents diplomates et excellents négociateurs", souligne le journaliste suisse Richard Werly, interrogé dans l'émission
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C'était très important pour les Européens de montrer qu'ils continuaient d'avancer malgré le Brexit
Les Britanniques, qui peuvent se réjouir d'être à nouveau "souverains", devront eux aussi se refaire une place dan le monde, et affronter les velléités d'indépendance des Ecossais qui avaient voté majoritairement contre le Brexit.
Une cohésion à retrouver
L'UE, bien qu'elle ait relevé avec succès le premier défi de se séparer avec un accord du Royaume-Uni, doit encore trouver ses marques à Vingt-Sept. "Elle va devoir démontrer qu'elle peut avoir une cohérence sans le Royaume-Uni qui servait souvent de balancier entre des rivalités continentales, en plus de retrouver une cohésion malgré la fracture Ouest-Est et la pandémie qui complique encore la donne en ce moment", estime le correspondant du Temps à Paris.
Il faut une Europe efficace, qui apporte des solutions concrètes, qui contrôle ses frontières: c'est ça que veut aujourd'hui l'Européen moyen
Le départ des Britanniques, lesquels étaient traditionnellement opposés à des investissements communs, pourrait cependant favoriser une plus grande intégration politique de l'UE. Le plan de relance record de 750 milliards d'euros ficelé non sans mal par Bruxelles pour aider les pays européens à surmonter les conséquences économiques de la pandémie de Sars-CoV-2 fait partie de ces exemples sur lesquels l'UE pourra s'appuyer à terme pour montrer que l'union fait la force.
Un "crash test" nommé Covid
"La pandémie est un très bon test pour l'Europe. Au début, elle n'était pas prête, c'est évident, mais elle a depuis retrouvé une raison d'être avec les commandes de vaccins, avec les dispositifs sanitaires (...) et le plan de relance", relève Richard Werly. Pour le journaliste, c'est une certitude: "il faut qu'à la fin de la pandémie, les Européens se disent qu'ils ont mieux pu supporter le choc grâce à une Union européenne efficace, qui a apporté des solutions concrètes dans un contexte de fragilité générale".
Rallier l'opinion publique autour de projets communs tangibles, quitte à renoncer à la quête d'une unanimité des Vingt-Sept sur tous les sujets, c'est ce que préconise ce fin observateur de l'Europe basé à Paris. Car au-delà de renforcer sa cohésion intérieure, l'UE devra toujours plus jouer des coudes pour s'imposer sur la scène internationale face à la Chine qui monte en puissance, à la Russie et à la Turquie qui imposent leur style autoritaire, et aux Etats-Unis qui pourraient revenir en force. "Il ne faut pas rêver: Joe Biden à la Maison Blanche sera plus conciliant, plus diplomate et plus poli que Donald Trump, mais il a le même objectif d'une hyper-puissance américaine et de faire valoir la suprématie des Etats-Unis face à la Chine, mais aussi dans le secteur numérique", insiste Richard Werly.
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En définitive, le Brexit aura été une sorte de baptême du feu pour l'Union européenne qui - pour la première fois - rétrécit après des années d'élargissement. En négociant la sortie d'un de ses membres, elle a cependant appris à fourbir ses armes et à s'affirmer. Une expérience utile, sans doute, au vu des combats qui l'attendent.
Juliette Galeazzi