Le spectacle est apocalyptique: des bouteilles en plastique, des sacs-poubelles, des pneus, des réfrigérateurs et même un cercueil à la dérive.
Il y a quelques jours un phénomène régulièrement observé dans plusieurs pays des Balkans a atteint des proportions inédites. Des cours d'eau du Monténégro, de Serbie et de Bosnie-Herzégovine se sont en effet retrouvés submergés par des ordures, au point de menacer le fonctionnement de plusieurs barrages de centrales hydroélectriques.
Seul 1% des déchets recyclé
Il faut dire que dans les Balkans, où il n'existe presque pas de solutions de traitement des déchets, c'est à peine 1% des détritus qui sont recyclés, contre 44% dans l'Union européenne en moyenne.
Certes, l'Union européenne essaie de stimuler la création d'une filière de retraitement dans cette région. Mais comme l'explique au micro de La Matinale Jean-Arnault Dérens, corédacteur en chef du courrier des Balkans, elle y exporte dans le même temps ses poubelles.
"On aboutit à des situations totalement kafkaïennes. Je pense par exemple à l'Albanie où l'on a une importation de déchets venus notamment d'Italie, alors que le pays n'a pas d'infrastructures lui permettant de traiter ses propres déchets", raconte-t-il.
Pour lui, les organisations criminelles telles que la mafia y jouent un rôle crucial. "On sait que l'importation de déchets à l'échelle européenne est très largement contrôlée par les structures criminelles, notamment par la Camorra napolitaine", poursuit-il.
La crise sanitaire n'y arrange rien
Et à cela s'ajoutent aussi, depuis le début de la pandémie, les poubelles européennes de la crise sanitaire.
"Il y a effectivement des problèmes spécifiques liés aux exportations de déchets sanitaires ou hospitaliers, notamment les masques, vers les pays des Balkans. Il y a notamment une affaire de déchets hospitaliers italiens importés en Bosnie-Herzégovine. Mais on ne peut pas affirmer l'implication des réseaux criminels dans ce dossier."
Et l’alternative pour ces ordures se résume à finir dans une décharge sauvage, dans les cours d'eau ou à être brûlées, venant alors dans ce cas alourdir l’air déjà saturé. Une pollution qui, elle, ne se dissipe pas aux frontières de l’Union européenne.
Foued Boukari/fgn