L'armée a mis brutalement fin lundi à la fragile transition démocratique du pays, instaurant l'état d'urgence pour un an et arrêtant Aung San Suu Kyi ainsi que d'autres responsables de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND).
L'ex-dirigeante de 75 ans, mise depuis au secret, a été inculpée pour avoir enfreint une obscure règle commerciale.
Rassemblements
Jeudi, plusieurs centaines de partisans de l'armée se sont réunis à Naypyidaw, la capitale. "On ne veut plus des traîtres nationaux vendus à des pays étrangers", "Tatmadaw (les forces armées) aime les gens", pouvait-on lire sur des pancartes.
Non loin de là, 70 députés LND ont signé un "engagement à servir le public", organisant une session parlementaire symbolique pour dénoncer la prise de contrôle du parlement.
Dans les rues, aucune manifestation importante n'a eu lieu depuis le coup, la peur des représailles restant vive dans le pays qui a vécu, depuis son indépendance en 1948, sous une dictature militaire pendant presque 50 ans. Mais les signes de résistance se multipliaient.
Un petit rassemblement a eu lieu à Mandalay (centre), des manifestants arborant des pancartes: "Protestation du peuple contre le coup d'État militaire!". Quatre personnes ont été interpellées, selon les médias locaux. L'AFP n'a pu confirmer à ce stade ces arrestations auprès des autorités.
A Rangoun, à la tombée de la nuit, des habitants klaxonnaient et tapaient sur des seaux et des casseroles pour la troisième soirée consécutive, certains scandant: "Vive Mère Suu!" Kyi.
Sur les réseaux sociaux, des avocats arboraient un ruban rouge, aux couleurs de la LND, et faisaient le salut à trois doigts, un geste de résistance adopté par les pro-démocrates à Hong Kong ou en Thaïlande.
Chef de l'armée tout puissant
Le chef de l'armée birmane, Min Aung Hlaing, qui concentre désormais l'essentiel des pouvoirs, a justifié son putsch en évoquant d' "énormes" fraudes lors des législatives de novembre remportées massivement par la LND.
En réalité, les généraux craignaient que, malgré une constitution qui leur est très favorable, leur influence diminue après la victoire d'Aung San Suu Kyi, estiment des analystes.
agences/cab
"Préoccupation" du Conseil de sécurité
Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a assuré qu'il ferait tout "pour mobiliser tous les acteurs-clés et la communauté internationale afin de mettre assez de pression sur la Birmanie pour s'assurer que (le) coup d'Etat échoue".
Le Conseil de sécurité a exprimé jeudi dans une déclaration sa "profonde préoccupation" et a demandé "la libération de tous les détenus".
Ce texte, rédigé par le Royaume-Uni, ne condamne cependant plus le coup d'Etat militaire, comme envisagé dans un premier texte lors d'une réunion d'urgence mardi. La Chine et la Russie - qui disposent d'un droit de veto au Conseil - se sont opposées à cette formulation, selon des diplomates.
Pression américaine
Le président américain Joe Biden a exhorté jeudi les généraux birmans à "renoncer au pouvoir" sans conditions.
"L'armée birmane doit renoncer au pouvoir dont elle s'est emparée, libérer les défenseurs et militants qu'elle a arrêtés, lever les restrictions sur les communications et s'abstenir de toute violence", a déclaré Joe Biden.
Quelques heures auparavant, la Maison Blanche avait annoncé envisager des "sanctions ciblées" contre les militaires putschistes.